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Atteinte aux biens publics, délit de favoritisme et complicité d’atteinte aux biens publics : Maria Diarra condamnée à 5 ans de réclusion et au paiement de 10 millions de F CFA de dommages et intérêts

image d’illustration

Poursuivis pour atteinte aux biens publics, délit de favoritisme et complicité d’atteinte aux biens publics, Maria Diarra, son fils Habib Samuel Kéïta, son neveux Seïni Tambadou, Almoudou Coulibaly et Bourama Koné ont comparu le jeudi 11 juillet devant les jurés de la Cour d’assises spéciale. Reconnu coupable, Maria Diarra, âgée de 69 ans, a été condamnée à 5 ans de réclusion avec son gestionnaire Almoudou Coulibaly et au payement de 10 millions de F CFA de dommages et intérêts. Son fils Habib Samuel Kéita et son neveux Seïni Tambadou qui ont bénéficié de circonstances atténuantes de la Cour ont écopé de 5 ans de prison avec sursis. Bourama Koné a été acquitté et Maïmouna dite Yaye Tambadou et Kafounè Diamouténé, pour leur absence à la barre, ont été jugés par contumace et condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité. Les accusés rembourseront collectivement 610 438 003 F CFA à l’ambassade des Pays-Bas au Mali.

A la barre, Maria Diarra a nié en bloc les faits qui lui sont reprochés, alors que sur plus d’un milliard de F CFA reçu du bailleur, les responsables de l’Institut de l’éducation populaire (IEP) n’ont pas pu apporter la moindre justification de plus de 630 millions de F CFA.

Tant à l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur, les accusés ont catégoriquement nié les faits qui leur sont reprochés. Habib Samuel Kéita a toutefois reconnu que les véhicules de sa société étaient exclusivement loués par l’Institut dont la directrice est sa mère biologique et qu’on lui versait un minimum de 3 millions de F CFA par mois.

Seïni Tambadou, gérant du GIE, parlant du lien contractuel avec l’Institut, a soutenu que son contrat prévoyait un montant initial de 150 000 F CFA par agent de gardiennage qui a été ramené à 300 000F par agent et par mois, mais dans la pratique, il ne payait que 75 000F par agent.

Au cours des débats, le ministère public a requis 10 ans de prison ferme et 10 millions de F CFA de dommages et intérêts contre Maria Diarra. “Au-delà de la retenir dans les liens des accusations de délit de favoritisme et complicité d’atteinte aux biens publics, il faut la condamner à 10 ans de prison ferme et 10 millions de F CFA à titre de dommages et intérêts. Elle doit rembourser l’argent qu’elle a détourné. Cet argent était destiné à nos enfants. Il faut qu’elle sache que l’argent public est inviolable et sacré”, a déclaré le procureur. L’avocat de Maria Diarra a répliqué que sa cliente a le sens de la famille. “Ma cliente voulait simplement aider sa famille, c’est pourquoi, elle s’est entourée de beaucoup d’elle. Messieurs le président de la Cour, les jurés, sa détention ne servira rien à l’ambassade des Pays-Bas au Mali. Il faut donc la condamner à une peine assortie de sursis”, a-t-il plaidé.

La partie civile a réclamé aux accusés la somme de 50 millions de FCFA à titre de dommages et intérêts et le remboursement des 610 438 003 F CFA.

Dans sa délibération, la Cour a souverainement condamné Maria Diarra et Almoudou Coulibaly à 5 ans de réclusion. Maria devra en plus payer 10 millions de F CFA à titre de dommages et intérêts. Son fils Habib Samuel Kéïta et son neveux Seïni Tambadou ont écopé de 5 ans de prison avec sursis.

Bourama Koné a été acquitté. Maïmouna dite Yaye Tambadou et Kafounè Diamouténé, pour leur absence à la barre, ont été jugés par contumace et condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité. Les accusés rembourseront collectivement 610 438 003 F CFA à l’ambassade des Pays-Bas au Mali.

Les faits se sont déroulés en 1993, l’Institut de l’éducation populaire (IEP) est une organisation non gouvernementale qui intervenait dans les domaines du développement de l’éducation.

Dans le cadre de ses activités, l’IEP a obtenu en 2012 du Royaume des Pays-Bas à travers son ambassade en République du Mali un financement de plus d’un milliard en vue de la généralisation du curriculum de l’enseignement dans l’éducation fondamentale au Mali sur la période allant de 2012 à 2014, puis sur prorogation jusqu’à 2016.

A la signature du contrat, les deux parties convenaient de leurs droits et obligations réciproques. Ainsi, en contrepartie de la mise à disposition des fonds par les Pays-Bas, l’IEP devait les utiliser aux fins convenues, conformément à une procédure rigoureuse tout en produisant des rapports narratifs et financiers annuels afin de permettre au bailleur d’assurer le suivi, puis des rapports sous-tendus par l’audit de fin d’activité pour s’assurer de la sincérité des différentes opérations de dépenses à travers l’examen des pièces justificatives.

A l’échéance de la relation contractuelle, Maria Diarra, directrice de l’IEP, s’est illustrée par un comportement qui a inspiré le doute chez le bailleur de fonds. En effet, contrairement aux termes du contrat, l’IEP tardait à produire les pièces justificatives pour une partie du montant utilisé du fait de la maladie de la directrice.

Cette situation a conduit le cabinet CAO, chargé de l’audit de fin d’activité, à émettre des réserves quant à la sincérité de la gestion faite par l’IEP des fonds mis à sa disposition par les Pays-Bas. C’est ainsi que l’ambassade dudit pays au Mali a commis en juin 2017 un auditeur externe et étranger en l’occurrence le cabinet Erudit, un cabinet béninois d’expertise comptable qui, dans son rapport final produit en novembre 2017, a conclu à des irrégularités.

Il s’agit d’un montant de 20 millions de F CFA utilisé en violation totale des procédures et plus de 610 millions engagés par l’IEP sans la moindre pièce justificative.

Au vu des conclusions troublantes de ce rapport d’audit, l’ambassade des Pays-Bas au Mali a porté plainte devant le parquet contre la directrice de l’IEP, Maria Diarra, et ses collaborateurs.

L’enquête préliminaire diligentée par la suite a permis de découvrir que Maria Diarra, pour réussir ses malversations financières agissait avec le gestionnaire en la personne de Almoudou Coulibaly qui refusait d’utiliser le logiciel comptable de la boîte. Il a été aussi découvert qu’elle s’était entourée de plusieurs de ses proches qui ont injustement manié des fonds de l’ONG.

Ainsi, Habib Samuel Kéita, un de ses enfants a créé et pilotait le GIE Curerma, puis la société Socopse-SARL pour répondre aux besoins de l’Institut en moyens de transport. Il opérait dans ce cadre avec Kafounè Diamouténé, un fils adoptif de Maria qui a fini par devenir assistant comptable de l’Institut.

Au même moment, Seïni Tambadou, un neveu de Maria, à la tête du GIE Pro-Services, bénéficiait systématiquement des contrats de nettoyage-gardiennage et autres travaux étrangers à sa vocation pour des montants mensuels de plus d’un million.

Quant à Maïmouna dite Yaye Tambadou, nièce de la directrice, elle était logisticienne de l’IEP et a effectué le retrait de plus de 6 millions de F CFA sur les comptes de l’ONG et cela en violation flagrante du manuel de procédure régissant les opérations financières.

Pour réaliser les différents marchés de fournitures de matériels de l’IEP, Almoudou Coulibaly et Maïmouna Tambadou recouraient régulièrement aux services de Birama Koné, leur opérateur économique qui leur fournissait ce dont l’Institut avait besoin et cela suivant des contrats de gré à gré sans la mise en œuvre préalable du jeu de la concurrence. Maria Diarra et Almoudou Coulibaly ont nié en bloc les faits qui leur sont reprochés devant le magistrat instructeur. Alors que sur plus d’un milliard reçu du bailleur, les responsables de l’Institut n’ont pu apporter la moindre justification de plus de 630 millions.

Visiblement, Maria Diarra a puisé dans les fonds de l’Institut pour acquérir plusieurs biens mobiliers et immobiliers tant à son compte personnel qu’à celui des membres de sa famille. Almoudou Coulibaly a reconnu lors de son interrogatoire au fond en réponse à une des questions du magistrat instructeur que : “Souvent, l’argent n’a pas été utilisé pour le programme et certaines activités du programme ont été menées sans rapporter les pièces justificatives, c’est le cumul de ces dépenses et activités qui explique les montants injustifiés”.

S’agissant de Maïmouna Tambadou, n’ayant pas pu être inculpée dans le cadre de l’instruction, il n’en demeure pas moins qu’elle reste sous le coup des poursuites. Tant à l’enquête préliminaire que devant le magistrat instructeur, les premiers ont catégoriquement nié les faits qui leur sont reprochés tandis que la seconde a décidé de se soustraire délibérément à l’action de la justice en partant pour une destination inconnue.

Cette dénégation parait pour le moins curieux dans la mesure où Habib Samuel Kéita, Maïmouna Tambadou, Birama Koné, Kafounè Diamouténé et Seïni Tambadou ne sont nullement étrangers aux malversations financières incriminées.

Habib Samuel Kéïta a reconnu que les véhicules de sa société étaient exclusivement loués par l’Institut dont la directrice est sa mère biologique et qu’on lui versait un minimum de 3 millions par mois. Kafounè Diamouténé, enfant adoptif de la directrice, a confirmé ses dires et enfoncé le clou en soutenant que la société de Habib Samuel Kéita percevait souvent jusqu’à 7 millions par mois de l’IEP.

Seïni Tambadou, gérant du GIE, parlant du lien contractuel avec l’Institut, a soutenu que le contrat prévoyait un montant initial de 150 000 F CFA par agent de gardiennage qui a été porté à 300 000 F CFA par agent et par mois. Mais dans la pratique, ils ne payaient que 75 000 F CFA par agent.

Notons que ce dossier avait été jugé le mardi 30 novembre 2021 pour les même faits d’atteinte aux biens publics, délit de favoritisme et complicité d’atteinte aux biens publics.                          

 Marie Dembélé

 

Source: Aujourd’hui-Mali

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