Au moment où s’ouvrait le 31e Sommet de l’Union africaine, dimanche 1er juillet à Nouakchott, la capitale de la Mauritanie, un nouvel attentat frappait le nord du Mali, à Gao : une embuscade tendue aux soldats français de l’opération Barkhane (de lutte contre les groupes terroristes djihadistes, lancée en 2014). Il y aurait, selon un bilan encore provisoire, quatre morts et vingt-trois blessés, principalement des civils mais aussi quatre militaires français.

Cet attentat s’ajoute à celui de Sévaré (centre du Mali) vendredi 29 juin au quartier général de la force G5Sahel [de lutte antiterroriste dans la région, comprenant des soldats des cinq pays : Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Tchad].

Une situation sécuritaire “au rouge”

Une attaque à la voiture piégée revendiquée, précise Le Républicain, à Bamako, par l’alliance djihadiste liée à Al-Qaida dirigée par Iyad Ag Ghali. “Le bilan fait état de trois morts dont un civil. Des suspects ont été arrêtés par les forces armées maliennes, dont les hélicos ont survolé la ville pendant longtemps. Deux des assaillants sont morts, dont le kamikaze à bord de la voiture piégée. Selon une source sécuritaire, précise encore Le Républicainles auteurs de l’attaque ont utilisé en plus de la voiture piégée des éléments ayant infiltré le QG pour perpétrer l’attentat. C’est la première attaque contre le G5 Sahel.”

Ce regain de violence terroriste au Mali survient donc au moment même du Sommet de l’Union africaine à Nouakchott (1er-2 juillet). Le Pays, à Bamako, laisse éclater sa colère : “Il est temps que les dirigeants africains comprennent que les sommets aux allures de banquets, organisés pour bien manger, ne résolvent rien des problèmes réels de leur nation. […] La situation sécuritaire sur le continent est au rouge”, s’exclame le quotidien malien.

Les terroristes prennent chaque jour davantage le contrôle de nos États. Au Mali, le G5 Sahel a de la peine à entrer en vigueur. Les fonds qui doivent être mobilisés pour cela ne sont pas jusqu’ici disponibles. […] L’insécurité devient de plus en plus une réalité au nord comme au centre du Mali”.

“Énormément de failles dans le déploiement du G5 Sahel”

En effet, complète L’Observateur Paalga à Ouagadougou, “il y a énormément de failles dans le déploiement de cette force sur le terrain […]. On comprend alors pourquoi le G5 Sahel peine à monter en puissance. Outre les problèmes financiers et logistiques, il y a visiblement des problèmes tactiques et stratégiques.”

“Par ailleurs, poursuit le quotidien burkinabé, quand on sait que les chefs d’État de la région ont des divergences d’approche sur le déploiement territorial de cette force, leurs pays n’étant pas affectés avec la même intensité par les attaques terroristes, la France a encore du pain sur la planche au Sahel et pour longtemps. […] En attendant, conclut L’Observateur Paalga :

Al-Qaida, l’État islamique et leurs affidés peuvent terroriser les populations du centre du Mali au nord du Burkina et narguer nos présidents occupés à leurs interminables conciliabules.”

Pour l’heure, “le véritable enjeu sécuritaire au Mali est en rapport avec le processus électoral, relève pour sa part Ledjely.com, en Guinée. Devant permettre l’élection d’un nouveau président ou la réélection du président sortant [Ibrahim Boubacar Keïta], le scrutin du 29 juillet prochain passe par la victoire de l’ordre démocratique sur le désordre et la terreur que certains tentent d’imposer au Mali depuis plus de cinq ans.”

Des cibles qui ne sont “pas choisies au hasard”

“À vrai dire, poursuit Ledjely.com, la tenue effective du scrutin dans certaines régions du pays relevait déjà d’un défi. Et justement, dans un contexte aussi incertain et un climat sécuritaire aussi précaire, la recrudescence des attentats n’a rien de rassurant. Surtout que, pour faire montre de leur capacité, les auteurs de ces attaques n’ont pas choisi les cibles au hasard. Ils s’en prennent à ceux dont Bamako espère l’appui et le soutien pour réussir l’exercice électoral. Alors même que la campagne électorale démarre samedi prochain.”

Et Wakat Séra, au Burkina, de s’interroger :

Quel sera le sort des populations du Sahel que cette force G5 est censée protéger des exactions et des tueries menées par les djihadistes ? En tout cas, la balle, au propre comme au figuré, est dans le camp du G5 Sahel, qui, après avoir connu un accouchement difficile, vit des heures chaudes.”

Frédéric Couteau /rfi.fr