Chacun a son tour chez le coiffeur, a-t-on coutume de dire. C’est le schéma qui semble se dessiner entre le Premier ministre de la Transition Dr Choguel Kokalla Maïga et l’ex-majorité présidentielle autour de certains axes du plan d’action gouvernemental. Il s’agit notamment de la création de l’organe unique de gestion des élections et la tenue des assises nationales de la refondation (ANR).
L’ex-mouvance présidentielle se reconnaissant dans la plateforme des partis et regroupements politiques du cadre d’échange pour une transition réussie au Mali, est farouchement opposée au processus d’organisation des ANR que Choguel veut en faire une question d’honneur.
Or, les ténors de cette coalition ne voient pas la pertinence de ces assises. Pourquoi ? Il n’y a pas de fumée sans feu. En réalité, cette prise de position de l’ex-majorité n’est pas fortuite. Au-delà des vives inquiétudes qu’elle a émises face aux conditions de préparation de ces ANR, la vérité est que les partisans du régime IBK veulent rendre à Choguel sa monnaie. Il s’agit de la monnaie de la pièce que l’actuel patron de la Primature avait donnée lors de la tenue des assises du dialogue national inclusif (DNI) à Bamako du 14 au 22 décembre 2019.
L’histoire a retenu que Dr Choguel Kokalla Maïga, membre de la conférence des présidents du FSD, avait boudé ces travaux, tout comme feu honorable Soumaïla Cissé, malgré les nombreuses démarches entreprises çà et là. A l’époque, l’absence remarquée du FSD à ces assises a fortement impacté la valeur ajoutée que prônait l’inclusivité du processus. Le DNI sans le FSD aura été traité de tous les noms d’oiseaux. Voilà que deux ans après, Choguel est rattrapé par l’histoire.
Dos au mur, c’est lui qui court derrière ses anciens adversaires pour obtenir le consensus de l’ANR. Qui l’eut cru ? Le locataire de la Primature fait face au défi de l’inclusivité autour des ANR. La mission apparait impossible au vu des positions prises par l’ex-majorité.
En témoigne l’échec émat de la rencontre du vendredi 27 août dernier au Cicb. Or, ce cadre d’échange se fondait sur le principe d’inclusivité pour la réussite de la transition. L’objectif est de jeter les bases d’un plus large consensus sur les priorités de la transition, notamment la détermination des actions nécessaires à la tenue d’élections générales à date échue.
Malheureusement, il s’est avéré que cette opportunité d’échanges n’a nullement tenu ses promesses, car la rencontre s’est déroulée comme à l’habitude dans un climat peu serein, à allure d’un meeting. De ce fait, dans une atmosphère de méfiance, l’ex-majorité a estimé qu’il s’agit d’une affirmation de fait accompli.
Car, de toute évidence, le PM Maïga, en voulant dicter sa vision unilatérale de la conduite de la transition, a affiché sa ferme intention de tenir les ANR, et aussi sa décision irréversible de créer et d’opérationnaliser l’organe unique de gestion des élections.
C’est pourquoi, l’ex-majorité estimant que cette démarche qui n’est pas de nature à favoriser le rassemblement entre les filles et fils du pays, est revenue sur ses préoccupations et recommandations rédigées dans un mémorandum daté du 24 août 2021 et transmis aux autorités de la Transition. Contrairement au chef du Gouvernement, l’ex-mouvance présidentielle ne voit pas la pertinence de ces assises.
De ce fait, elle insiste sur l’intensification des mesures de sécurisation du territoire et la publication d’un chronogramme clair, réaliste et réalisable pour l’organisation des élections générales. Cette monnaie que veut rendre l’ex-majorité à Choguel constitue une grosse épine sous les épines de la transition. Le vin étant déjà tiré, au Dr Maïga de s’armer d’intelligence pour le rendre buvable.
Jean Goïta
Source : La lettre du Peuple