Dans le cadre de la 31e édition de la Journée mondiale de l’enfant, célébrée le 20 novembre 2020, le président de la Coalition malienne pour les droits de l’enfant (Comade), Antoine Akplogan, a accordé une interview à L’Indicateur du Renouveau. Dans cet entretien, il a été question des violations des droits de l’enfant dans notre pays.
IR : C’est quoi la Comade… ?
Antoine Akplogan : La Coalition malienne pour les droits de l’enfant (Comade) est une association humanitaire, apolitique, laïque et à but non lucratif. Elle peut s’affilier à toutes les organisations poursuivant le même but et les mêmes objectifs. La Comade a pour but de promouvoir et de défendre les droits de l’enfant. Pour ce faire, nous nous sommes fixés des objectifs qui sont : coordonner les actions des structures membres travaillant dans le domaine des droits de l’enfant ; encourager et assurer la participation des structures membres aux activités initiées en faveur des enfants ; influencer et renforcer les politiques et actions gouvernementales en faveur des enfants ; œuvrer pour la mise en application des lois et textes existants en faveur des enfants ; promouvoir la diffusion et la connaissance des textes juridiques relatifs aux droits et à la protection de l’enfant ; promouvoir la participation des enfants à la promotion, à la protection et à la vulgarisation des droits de l’enfant.
IR : Vous venez de célébrer la Journée mondiale de l’enfant. Quelle est la situation dans notre pays par rapport à la violation des droits des enfants ?
Antoine Akplogan : Dans notre pays, nous constatons malheureusement l’augmentation drastique des incidents de protection et des violations graves des droits de l’enfant. Le Mali est en guerre depuis 2012. Un nombre croissant d’enfants fait partie des victimes civiles de cette guerre.
Dans les régions du Nord et du Centre de notre pays, la présence d’engins explosifs et les attaques délibérées contre les infrastructures civiles (écoles, centres de santé, foires, points d’eau, moyens de subsistance) nuit à l’épanouissement des enfants, qui sont souvent recrutés par les groupes armés. Ils sont aussi exposés aux cas de violence sexuelle dans les zones de conflits armés.
Au Mali, le nombre de personnes déplacées par le conflit et la violence a plus que doublé, passant de 187 139 personnes en septembre 2019 à 287 496 personnes déplacées en septembre 2020. 55 % des personnes déplacées internes sont des enfants et 30 % sont des filles de moins de 18 ans.
Concernant la violence domestique sur les enfants, la situation des jeunes filles aide-ménagères nous interpelle tous. Elles sont plus de 300 000 pour la seule ville de Bamako, soit une aide-ménagère par foyer au moins. Ces jeunes filles aide-ménagères sont sans qualification, très souvent analphabètes ou en abandon scolaire.
A San, dans la région de Ségou, il y a plus de 500 petits garçons de moins de 12 ans, qui mendient et errent dans la ville. Certains de ces enfants sont victimes d’exploitation par des personnes dans les travaux domestiques, économiques et champêtres. Dans les grandes villes maliennes, surtout à Bamako, des enfants dits jumeaux sont utilisés comme fonds de commerce par certaines femmes qui les trainent depuis 6 heures du matin entre les véhicules, les motos durant toute la journée. Des milliers d’enfants de Bla, San, Sikasso travaillent en violation de leurs droits sur les sites d’orpaillage.
IR : Dites-nous les actions menées par la Comade au cours de l’année 2020…
Antoine Akplogan : Au cours de l’année 2020, nous avons mené plusieurs actions qui sont, entre autres, la révision et l’adoption des textes statutaires ; la coordination de la prise en charge juridique par les organisations membres des cas de violences domestiques sur de petites filles aide-ménagères suite à un signalement de citoyen ; le plaidoyer sur la protection des enfants lors des manifestations sociopolitiques de juin-août 2020 et dans les zones de conflits armés.
Pendant les mouvements de contestation contre l’ancien régime, certaines associations et formations politiques mobilisaient des enfants pour leurs meetings. Nous avons publié des communiqués pour dénoncer ces faits qui constituent des violations des droits des enfants. Cette année, nous avons également constitué une base de données de 48 structures membres ; créé un site web d’information et de sensibilisation de promotion des droits de l’enfant : www.comademali.com ; renouvelé le bureau exécutif et mis en place du bureau régional de Ségou.
IR : Quelles sont vos rapports avec le ministère de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille ?
Antoine Akplogan : La Comade entretient de bons rapports avec la nouvelle ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant de la Famille, qui connait très bien le monde de la société civile. Cependant, tel n’était pas le cas avec l’équipe précédente avec laquelle nous avons difficilement obtenu une audience.
IR : Avez-vous un appel à lancer ?
Antoine Akplogan : Nous lançons un appel pour la finalisation de la relecture du Code de protection de l’enfant (loi sur la protection de l’enfant) ; la prise de décision officielle permettant la mise à disposition de la Coalition malienne pour les droits de l’enfant d’un siège dans toutes les capitales régionales où il existe une Maison de la femme et de l’enfant.
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