Le président de la République française, Emmanuel Macron, n’effectuera plus le déplacement au Mali, où il était attendu ce lundi pour une visite dont le programme prévoyait une rencontre avec le président de la Transition, le colonel Assimi Goïta. Ensuite, il devait se rendre sur la base militaire française de Gao pour communier avec les troupes autour d’un repas de Noël.
L’Élysée a invoqué des raisons sanitaires liées à la pandémie de Covid-19 pour justifier cette annulation, décidée, vendredi dernier, à l’issue du Conseil de défense sanitaire qui a débouché sur une série de mesures visant à ralentir la cinquième vague de Covid-19 qui frappe la France. “Cette décision a été prise dans un souci de cohérence entre les mesures annoncées au niveau national et l’agenda international du président, et dans un souci de ne pas exposer notre dispositif militaire dans un moment de dégradation de la situation sanitaire en métropole”, a expliqué l’Élysée.
Au-delà de ces raisons, certains observateurs croient savoir que Paris et Bamako ne se seraient pas entendus sur le format de la rencontre entre les deux chefs d’État. Emmanuel Macron voulait qu’elle soit élargie aux présidents du Ghana, Nana Akufo-Addo et du Tchad, Mahamat Idriss Déby Itno, qui assument respectivement la présidence de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et du G5 Sahel. Un format qui aurait été rejeté par les autorités maliennes, qui souhaitaient un entretien bilatéral.
Aussi, le président Macron aurait souhaité que le mini sommet du G5-Sahel se tienne à l’Aéroport international président Modibo Keïta Sénou pour éviter à sa délégation de croiser les manifestants hostiles à la politique française. Ce que les autorités de Bamako auraient refusé. Elles auraient plutôt souhaité que toutes les rencontres se passent au palais de Koulouba. Or en traversant la ville de Bamako pour se rendre à Koulouba, le cortège du président Macron aurait pu risquer d’être hué par des manifestants anti-français. Une telle image serait négative pour sa prochaine campagne électorale.
De l’avis de plusieurs observateurs, l’annulation de cette visite est une occasion ratée qui aurait pu dissiper les malentendus à propos d’un certain nombre de sujets, sur lesquels l’on fait un procès d’intention au Mali. Alors que les autorités de la Transition ne font qu’une lecture pragmatique et non dogmatique par rapport à la situation du pays, nomment sur le plan sécuritaire. Dans cette dynamique, elles bénéficient du soutien des populations. Celles-ci voient surtout aux péripéties actuelles, la fin du «dirigisme français».
L’erreur est de penser que ce sentiment et les manifestations contre la France ne sont que le fruit de manipulations, ils sont également le résultat de la politique de l’Hexagone au Sahel. «Il est hors de question d’imaginer que le peuple malien nourrit un sentiment anti-français», avait encore déclaré le Premier ministre, devant les médias à Genève où il participait à la Journée mondiale du coton.
Il avait ajouté que le «Mali et la France constituent un vieux couple. Il y a par moments des scènes de ménage qui peuvent survenir de l’un ou de l’autre membre du couple. Mais je ne crois pas que cela va aboutir au divorce…».
Issa DEMBÉLÉ
Source : L’ESSOR