Pour l’exécution d’une décision de justice, Me Aliou Kéïta, huissier de justice de son état a procédé à la démolition de 309 concessions au lieu de deux, protestent les populations dont les maisons ont été démolies. L’huissier n’a fait que son travail dans les règles de l’art, car cette décision concernerait toutes les personnes qui ont occupé illégalement lesdites parcelles, précisent les responsables de l’Association Malienne Raoul Follereau qui seraient les vrais propriétaires du Titre Foncier N° 180 situé à Kalabambougou, en Commune IV du District de Bamako. En tout cas, l’Huissier a fait les frais car il séjournerait actuellement en prison. Révélations !
Cette affaire dite de Kalabambougou fait couler actuellement beaucoup d’encre et de salive, surtout dans les colonnes des journaux et sur les ondes des radios. Aujourd’hui, un Huissier de Justice du nom de Me Aliou Kéïta, séjourne en prison pour avoir exécuté une décision de justice. Qu’en est-il exactement de cette affaire ?
Cette affaire a éclaté quand l’huissier, dans sa main une décision de décision avec la grosse, se rend à Kalabambougou, en Commune IV du District de Bamako, pour exécution cette décision. La décision fut exécutée mais pour certains habitants, l’huissier aurait outrepassé les limites. Car, disent-ils, la décision ne concernerait que deux maisons, c’est-à-dire, celles des sieurs Lassine Camara et Chakaba Kéïta et non 309 concessions. D’où leur colère !
Informé, le Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, Me Mohamed Aly Bathily se présenta sur les lieux et aura même des entretiens avec les personnes dont les maisons ont été démolies. Immédiatement, le Ministre de la justice procéda à l’arrestation de l’huissier. D’où le mécontentement de ses collègues qui menacent même d’aller en grève si ce dernier ne recouvre la liberté.
Un geste d’ailleurs salué par les populations de Kalabambougou qui voyaient dans cette action de Me Bathily, une lueur d’espoir dans son combat pour le renouveau de la justice malienne. Car, aujourd’hui, pensent les populations, la famille judiciaire serait le seul secteur où on se croit permis. Où les pauvres n’ont droit à rien. Où l’argent est et demeure roi.
Cependant, la vérité est tout autre selon les vrais propriétaires desdites parcelles, l’Association Malienne Raoul Follereau, à travers le Centre National d’Appui à la Lutte contre la Maladie (CNAM). Pour eux, l’huissier n’a fait qu’exécuter un Arrêt de la Cour d’Appel qui lui avait été remis. Voici leur version des faits.
Cette affaire remonte aux années 94, c’est-à-dire sous le régime du Président Alpha Oumar Konaré. Dans une lettre adressée au Directeur National des Domaines et du Cadastre, le Ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, M. Boubacar Sidiki Touré, attire l’attention de ce dernier sur l’attribution d’une parcelle de 24 hectares à l’Association des Maliens de la Lèpre à Kalabambougou, en Commune IV du District de Bamako. Cela rentrait dans le cadre de l’extension du Centre National d’Appui à la Lutte contre la Maladie et de recasement des malades blanchis de la lèpre. Ainsi, le Directeur National des Domaines et du cadastre, M. Haiballah A. Maïga, avait instruit à M. Mamadou Camara, Directeur du Cabinet » Topo Mandé » de procéder à l’abornement de ladite parelle de terrain au profit du Centre National d’Appui à la Lutte contre la Maladie.
Aussi, un additif leur a été accordé compte tenu de leurs nouvelles missions comme le prouve la décision N° 79/M. CIV en date du 24 janvier 2011 relative à la régularisation des parcelles à usage d’habitation sur le plan de recollement sur le Titre Foncier N° 180 de Kalabambougou. En effet, le Maire de la Commune IV d’alors, Moussa Mara, aujourd’hui Premier ministre du Mali, avait sollicité et obtenu auprès du Directeur général du Centre National d’Appui à la Lutte contre la maladie, des compléments d’informations sur ce sujet. Il s’agissait de la preuve que le titre 180 est juridiquement établi et que son transfert a effectivement eu lieu au nom du CNAM et aussi la preuve que la commission inter-ministérielle a été juridiquement constituée en mettant également tout document y afférent à sa disposition. Ceux qui furent faits.
Cependant, dans une lettre en date du 02 septembre 2011 et signée de M. Abdoualye Guindo, ingénieur de Génie civil, expert assermenté près les Cours et Tribunaux du Mali, les autorités ont été informées que suivant les bases constas retenues et conformément à l’application du tracé dudit Titre foncier (N° 180), il a été constaté que les parcelles occupées par MM. Lassine Camara, Chakaba Kéïta et d’autres personnes empiétaient sur ce titre foncier suivant le lotissement officiel approuvé de Kalabambougou. Et que presque la totalité des constructions sur ce site était en banco et que les bornes de délimitation ont été enlevées par les occupants desdites parcelles.
Au cours d’un premier procès entre l’Union Malienne Raoul Follereau représentée par Goulou Moussa Traoré, son président et les sieurs Lassine Camara et Chakaba Kéïta en date du 12 janvier 2012 et enregistré au Greffe le 06 mars de la même année, le Tribunal de Première Instance de la Commune IV du District de Bamako, statuant publiquement, contradictoirement en matière civile et en premier ressort, a déclaré l’Union Malienne Raoul Follereau irrecevable en sa demande pour défaut de qualité mais a reçu le CNAM (Centre National d’Appui à la Lutte contre la maladie) en son intervention en la forme et au fond la déclare bien fondée et y faisant droit.
Comme on pouvait s’y attendre, la partie perdante, c’est-à-dire les sieurs Lassine Camara et Chakaba Kéïta firent appels. Dans son audience du 05 juin 2014, la Cour d’Appel de Bamako n’a fait que confirmer l’Arrêt du Tribunal de Première Instance de la Commune IV du District de Bamako. Cette décision a été notifiée à l’Association Malienne Raoul Follereau par leur Avocat, Me Aliou Touré à travers une correspondance en date du 18 juillet 2014.
Pour l’exécution de cette décision de justice, une grosse a été remise à la partie gagnante. Donc, l’Huissier a travaillé en conformité avec la loi et les textes en vigueur en République du Mali, précisent les responsables de l’Association Malienne Raoul Follereau, qui seraient les vrais propriétaires des parcelles objet de démolition. A suivre !
B.Koné