L’enfant de Soudou Baba, le combattant contre le ver de Guinée, le soldat de la démocratie malienne, le Hogon, le grand bâtisseur, l’homme de paix… ATT s’en est allé pour toujours. Les Maliens n’entendront plus ses taquineries à plaisanteries (les Coulibaly, les Keita…). Celui qui incarnait la paix, le vivre ensemble au Mali s’est éteint. Le cousin à tout le monde, l’ami des enfants est parti. Il a rejoint ses aïeux cette semaine après avoir passé toute sa vie au service du développement et de la paix au Mali et ailleurs.
L’ancien président de la République du Mali de 2002 à 2012 est décédé le lundi, tard dans la nuit, à Istanbul en Turquie où il était allé pour des soins médicaux. Durant toute sa vie, le « Soldat de la démocratie » s’est battu pour un Mali meilleur. Il s’était battu pour la paix, le vivre ensemble. Il était un président proche de ses citoyens, ouvert à tous.
ATT, un brave militaire !
Né le 4 novembre 1948 à Mopti (Soudan français, actuel Mali), Amadou Toumani Touré a fréquenté l’école primaire dans cette ville qu’il a tant aimée. Entre 1966 et 1969, il est inscrit à l’école normale secondaire de Badalabougou à Bamako pour devenir instituteur. Il intègre, par la suite, l’armée en entrant à l’école militaire interarmes de Kati. Au sein du corps des parachutistes, il grimpe rapidement les échelons. Après plusieurs stages en URSS et en France, il devient commandant des commandos parachutistes en 1984. Parmi ses camarades militaires, ATT était connu pour son intelligence, sa bravoure, son amour pour le travail bien fait. En mars 1991, après les manifestations populaires réprimées dans le sang, il participe au coup d’État contre Moussa Traoré et prendra la présidence du Comité de transition pour le Salut du peuple et assurera les fonctions de chef d’État pendant la transition démocratique.
Comme promis, ATT a organisé, avec brio, la conférence nationale du 29 juillet au 12 août 1991), puis des élections législatives et présidentielles en 1992. À l’issue de ces élections, il remet le pouvoir au président démocratiquement élu, Alpha Oumar Konaré. C’est pourquoi les Maliens, en guise de reconnaissance, l’ont surnommé « Soldat de la démocratie ». ATT a mené un combat ardent contre le vert de Guinée au Mali. Après la transition, l’ancien président de la République du Mali a fondé « La fondation pour l’enfance ». Ami des enfants, il l’a été avant d’être Président ; ami des enfants, il y était resté pendant sa présidence et jusqu’à son décès hier.
L’officier de l’armée malienne a participé à plusieurs missions de résolution de la crise partout en Afrique. Ainsi, en juin 2001, il est l’envoyé spécial du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, en République centrafricaine, après un coup d’État manqué contre Ange-Félix Patassé.
Une vie politique civilisée
Pendant les 1 an en tête de la transition et après, ATT a su convaincre les Maliens par son savoir-faire, son amour pour la patrie. Ainsi, en 1er septembre 2001, il a demandé et obtenu sa mise en retraite anticipée de l’armée. Il a ainsi décidé de se lancer dans la vie politique en posant sa candidature pour l’élection présidentielle en tant qu’indépendant. Il est élu président du Mali lors de l’élection présidentielle en mai 2002, avec 64,35 % des voix au second tour.
Pendant son premier quinquennat, ATT a travaillé dur. Les infrastructures routières, les projets multiformes, l’unité des Maliens… lui ont valu sa réélection en 2007. Pendant la campagne en 2007, le général a présenté son « programme pour le développement économique et social (PDES)» autour de neuf priorités : le renouveau de l’action publique en matière de démocratie et de gouvernance ; une plus forte croissance économique avec à la clef un taux de croissance d’au moins 7 % l’an ; le développement du secteur privé ; celui des ressources humaines ; l’emploi des jeunes ; une plus grande implication des femmes dans le développement ; le soutien aux initiatives culturelles et au sport ; la participation des Maliens de l’extérieur au développement du pays et l’institution d’une diplomatie plus agressive.
Il a été réélu président le 29 avril 2007 dès le premier tour. Il a obtenu 71,20 % des votes, tandis que son principal concurrent, Ibrahim Boubacar Keïta, qui n’a recueilli que 19,15 %.
Les grandes réalisations d’ATT
En dix ans, ATT a consacré sa vie à la construction d’un Mali meilleur. Dans le domaine de la stabilité politique et sociale, la gouvernance démocratique, les réformes institutionnelles, le pouvoir économique, l’argent, le panier de la ménagère, les infrastructures routières, hospitalières et sanitaires, scolaires et éducatives, les logements sociaux, l’urbanisation .. il a donné une nouvelle image au Mali en ses 10 ans de gouvernance.
Renforcement de la démocratie malienne
Même si certains l’ont qualifié de laxisme, le régime d’ATT a contribué au renforcement de la démocratie malienne par le respect de la liberté d’expression. Dans le domaine des reformes, ATT à, travers la commission Daba Diawara a fait d’énormes propositions pour le renforcement de la démocratie malienne, de la loi fondamentale malienne, la crédibilité des élections au Mali. Sous ATT, les libertés individuelles et collectives, et de la presse par les autorités maliennes étaient bien respectées.
Les infrastructures , une des grandes réussites d’ATT
Le président ATT a été celui qui a fait le plus dans le domaine des infrastructures au Mali. Sous son régime, Il y a eu la construction ou les chantiers de construction de moult axes routiers. Entre autres : Niono – Nampala – Léré -Tonka – Diré – Goundam – Tombouctou ; Gao – Bourem – Kidal ; Kayes – Sadiola – Kéniéba ; Bamako – Kangaba – Dioulafoundou ; Zantiébougou – Kolondiéba – Frontière Côte d’Ivoire ; Bandiagara – Bankass – Koro – Frontière Burkina ; Bandiagara – Douentza avec une bretelle Togo – Tongo ; Gao – Bourem, Ansongo – Ménaka – Andéraboukane et Kidal – Frontière Algérie.
Les axes Didiéni-Diéma 187 km ; Gao-Ansongo-Labbezanga 200 km ; Kati-Kita167 km ; Bougouni-Yanfolila 81 km ; Bamako-Narena 91 km a été construite et bitumée…
Il y a aussi la construction et le bitumage des routes Bamako-Kangaba 86 km, Sekokoto 38, 5 km, Sekokoto – Bafing plus contournement de Kita 73 km, Bafing-Falemé156 km, Kayes-Bafoulabé 156 km, Bandiagara-Wô 38 km ; la construction de l’échangeur Multiple à Bamako, du pont de Balé, du 3è pont de Bamako, du pont de Fourou, d’un échangeur multiple et de ses voies d’accès au rond-point de la paix à Bamako.
Selon le journal l’Aube, dans le domaine du transport aérien, il y a eu la réhabilitation et l’extension de l’aéroport de Bamako- Sénou dans le cadre du Millenium Challenge Account pour environ 95 milliards de FCFA ; la réhabilitation et/ou l’extension des aéroports de Gao, Tombouctou, Sikasso, Kayes et Mopti et la construction des aéroports de Kidal et Taoudénit.
En matière d’équipement, précise l’Aube, on peut noter le rapatriement de 18 000 anciens clichés photographiques aériens ; la couverture de 50 localités du Mali en image du satellite Quick-Bird et 14 065 km2 ; la matérialisation de la Frontière Mali – Burkina Faso sur 200 Km ; la construction et l’équipement des stations météorologiques à Yanfolila et à Macina ; l’acquisition d’équipements météorologiques pour 10 stations météorologiques ; la réhabilitation de 8 stations: Bamako-ville, Gourma Rharouss, Niafunké, Kangaba, Kolondiéba, Sélingué, Goundam, Niono ; la mise en œuvre du programme de pluies provoquées par la location de deux avions, l’acquisition d’un radar météo pour Gao. Kadiolo.
Le 3ème pont de Bamako, l’autoroute Bamako-Ségou et le 3è pont de Bamako… font partie des réalisations d’ATT.
Dans le domaine de la santé, l’instauration de l’AMO a été l’une des plus grandes réussites de ATT. Il a également construit l’hôpital du Mali à Bamako, l’hôpital de Sikasso et l’hôpital de Sévaré-Mopti, sont autant d’autres ouvrages de référence à retenir de l’héritage d’ATT.
ATT, un homme de paix !
Le président Amadou Toumani Touré a été, durant tout son mandat, un homme de paix. A ses adversaires politiques, aux syndicats, aux groupes armées, ATT a toujours joué la carte du dialogue, de la paix. ATT a toujours prêché pour la résolution pacifique de la crise malienne. Il n’a pas été écouté, mais le temps lui a, enfin, donné raison.
Le coup d’État de 2012
Dans la nuit du 21 au 22 mars 2012, un peu plus de deux mois avant la fin de son mandat, ATT est renversé par un coup d’État. Les mutins du Comité national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l’État, dirigé par le capitaine Amadou Sanogo, dénoncent la gestion du conflit au nord du pays entre l’armée et la rébellion touareg.
Suite à ce coup d’État, la CEDEAO engage une série d’actions afin de rétablir l’ordre constitutionnel. ATT accepte toutefois de démissionner officiellement de ses fonctions de président de la République du Mali le 8 avril 2012, et s’exile à Dakar (Sénégal) jusqu’au 24 décembre 2017 où il retourne définitivement au pays.
Il est décédé dans la nuit de lundi à mardi, à l’âge de 72 ans. ATT avait subi une opération du cœur à Bamako avant d’être évacué en Turquie.
Ce qui est important de retenir, ATT est très bien aimé par le peuple malien jusqu’à son décès. Il était considéré, pour beaucoup de citoyens, comme le meilleur président que le Mali ait eu après Modibo Keita.
Boureima Guindo
Source: Le Pays– Mali