La prolifération des stations FM est aujourd’hui source de pagaille dépassant les limites de la saturation. À Bamako, les auditeurs ne savent plus où se donner la tête à cause des interférences des fréquences et des émissions malsaines livrées par plusieurs stations. Mais aussi irascible que cela puisse paraitre, les autorités semblent se résigner face à cette anarchie de certains promoteurs qui abusent de leur liberté pour nuire aux autres. Lire notre grand format.
L’anarchie qui a abouti à la saturation des ondes est un mal connu depuis longtemps. À preuve, l’Autorité malienne de régulation des télécommunications Tic et postes (AMRTP) conformément à une décision du gouvernement, a effectué une opération de contrôle du 03 août au 04 septembre 2012. Elle s’est rendue dans les régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso, Ségou, Mopti et le district de Bamako. Le but principal de cette mission a consisté à vérifier les dispositions techniques et réglementaires contenues dans l’arrêté interministériel autorisant la création des radios en modulation de fréquence.
Elle a aussi permis de faire respecter les paramètres d’assignation en conformité avec le plan Genève 84. Le rapport de l’AMRTP a révélé l’existence de 400 fréquences FM pour 369 stations visitées et certaines radios ont deux fréquences dont l’une est sans autorisation. Sur 31 stations pirates recensées Koulikoro et Bamako se taillent les 60%, une centaine de fréquences attribuées restent inexploitées et plusieurs cas de sites non autorisés ont été découverts.
Le constat amer est que Bamako bat le record d’irrégularité sur la modulation de fréquence. Pourtant, pendant la transition le gouvernement avait ordonné la fermeture de plusieurs stations qui émettaient dans l’illégalité. Mais curieusement depuis plus d’un an les promoteurs sanctionnés reviennent sans aucune crainte. Certaines radios ont repris de plus belle en changeant seulement de nom d’autres ont changé de sites et continuent à émettre.
Pire, de nouvelles radios illégales s’installent un peu partout au Mali avec son lot de pagaille. À Bamako, les fréquences s’entremêlent au point que certains auditeurs sont sevrés de leurs stations préférées. En sus de ce désagrément, la diffusion de fausses informations est devenue monnaie courante. À l’occasion de certains événements et faits d’actualité, ou même à propos des sujets sensibles, les radios libres rapportent des informations en mille versions.
Des animateurs et journalistes sèment la confusion dans la tête d’une grande partie de la population sur des sujets qu’ils ne maitrisent point. N’ayant aucune notion de base, la plupart de ces agents pensent qu’on peut parler n’importe comment. On assiste de plus en plus à des cas de diffamation, d’attaques ciblées des personnalités et même du non respect du principe de la confraternité. Il n’est pas rare d’entendre des injures lors de certaines émissions de libre antenne axées toujours sur des thèmes échappant à la compétence de l’animateur.
D’autre part, la prolifération des radios confessionnelles aussi devient une réelle source d’inquiétude. Aujourd’hui, chaque confrérie ou secte religieuse veut avoir son propre outil pour mieux passer ses propagandes. Ainsi, des leaders et leurs adeptes de tendance opposée s’adonnent à cœur joie à des guerres verbales sur les ondes. Quel dommage?
Mais le hic dans cet embrouillamini c’est qu’une source crédible raconte que certains cadres de l’Autorité malienne de régulation des télécommunications Tic et postes (AMRTP) favoriseraient cette pagaille en alléguant qu’ils ne peuvent pas travailler en voyant le ministère de la communication et de l’économie numérique empocher tout seul les sous générés par l’attribution des fréquences.
Est-ce une stratégie de créer des problèmes pour la Haute autorité de la communication (HAC) bien avant sa mise en place? En fermant les yeux sur ces dérives, le gouvernement ne fait que déchirer encore le tissu social et rendre difficile la réconciliation tant attendue. Les recommandations de l’AMRTP doivent donc sortir des tiroirs.
Issa Santara