Yacouba Katilé, secrétaire général de l’Union des Travailleurs du Mali, réitère la volonté de son syndicat à obtenir gain de cause. Et dénonce le “peu de volonté” à faire aboutir les négociations…
Journaldumali.com : Monsieur le secrétaire, la situation semble tendue entre l’Untm et le gouvernement. Où en êtes-vous avec les négociations ?
Yacouba Katilé : Avec le gouvernement, nous étions à l’arrêt puisqu’à la reprise des négociations le lundi 8 de ce mois, le gouvernement a tout de suite après l’ouverture demandé une suspension jusqu’au 12 pour avoir les différents éléments afin de pouvoir faire des contre propositions. Le gouvernement dit ne pas être prêt, chose que nous n’avons pas comprise puisque depuis longtemps nous sommes sur le sujet. Nous avons accepté la demande du gouvernement et avons mis à sa disposition ce que nous avions préparé comme éléments afin qu’il fasse des propositions. Le vendredi, les ministres n’ont pas fait de propositions concrètes, ils se sont limités à énumérer les questions relatives à l’incidence financière avant de dire que notre requête est trop élevée et que l’Etat ne peut pas faire face à cette incidence financière. Nous avons compris que le gouvernement n’est pas dans les dispositions pour négocier avec les syndicats raison pour laquelle nous nous sommes retirés et avons informé la base. Est-ce du dilatoire de la part du gouvernement ? A chacun d’interpréter. Le gouvernement a en tous cas une semaine et passé ce délai, nous prendrons des dispositions pour la suite de nos activités.
Journaldumali.com : Monsieur le secrétaire, que réclamez-vous exactement sur l’aspect financier ?
L’argent est le nerf de la guerre et en réalité au début nous avions dix sept points qui constituaient un ancien protocole d’accord qui date d’octobre 2011 et dont nous avons demandé l’extinction. Dans l’ancien protocole, seuls quatre points avaient été vidés d’où son caractère obsolète. Les autres questions concernent le relèvement de la valeur indiciaire notamment l’abaissement de l’ITS et l’annulation systématique des tarifs d’électricité parce qu’il faut rappeler que le gouvernement avait promis de baisser les tarifs après les investissements et les travaux sur le réseau de distribution mais en lieu et place c’est une augmentation tous azimuts et cavalière sans discussion avec les partenaires sociaux. Nous ne pouvons pas l’accepter tout comme nous récusons que l’allocation familiale ne soit passée que de 1000 à 1500 francs depuis l’indépendance or il y a des handicapés dans les familles. Nous avons proposé 6000 francs pour les handicapés majeurs, 4000 francs pour les moyens et 3500 pour les autres. Ce sont des propositions concrètes que le gouvernement doit analyser pour faire des propositions mais jusqu’ici le gouvernement est aphone sur ces questions. A la suite de la lettre que nous avons adressée au gouvernement pour lui fixer un délai d’une semaine, peut être que le pouvoir réagira et si tel n’est pas le cas nous prendrons nos responsabilités.
Journaldumali.com : Monsieur le secrétaire, vous donnez l’impression de ne pas croire aux dires du gouvernement qui soutient ne pas avoir les moyens d’accéder à vos requêtes financières ?
Nous n’y croyons pas. Vous savez, nous n’agissons pas au pied levé. L’Untm, c’est un ensemble et nous sommes au courant de la situation du pays. Nous sommes à tous les niveaux de l’Etat. Nos experts financiers savent si les dépenses actuelles de l’Etat en valent la peine ou pas. Nous avons fait nos propres simulations et savons que le gouvernement peut faire quelque chose. Je donne l’exemple d’une dame qui gagne 80 000 francs et met 30 000 francs sur l’électricité. Le reste du salaire est consacré au transport, aux enfants et au loyer (domaine où il n’y a pas de régulation), c’est intenable. Le gouvernement joue avec le temps or on doit discuter de façon responsable. Au début, nous faisions face à cinq ministres puis trois et à la dernière rencontre seuls deux ministres se sont présentés et certains ministres ne viennent même plus. Aucun ministre ne doit endosser les responsabilités de structures ne relevant pas de son département. Il faut que le gouvernement fasse attention et ne pas prendre les choses à la légère.
Journaldumali.com : Monsieur le secrétaire, vous voulez prendre langue directement avec le Président ?
Non, un ministre est nommé pour assumer des responsabilités et au besoin il se réfère au chef du gouvernement ou au Président de la république. Un ministre qui ne peut pas s’assumer est un démissionnaire.
Journaldumali.com : Le succès de votre dernière grève vous fonde à bousculer le gouvernement ?
Non, nous ne fonctionnons pas ainsi. Nous ne voyons que les préoccupations des travailleurs. Nous ne faisons pas des calculs axés sur la mobilisation passée ou à venir. Nous défendons les travailleurs et dans cette optique nous n’avons pas besoin de publicité autour de ce que nous faisons car les travailleurs savent que nos revendications sont légitimes. La grève est, pour nous, un dernier recours.
Journaldumali.com : Monsieur le secrétaire, l’idée de geler les salaires des ministres ne prouve t-elle pas que l’Etat ne peut pas satisfaire les exigences financières de l’UNTM ?
Quoiqu’on fasse nous sommes dans tous les secteurs de l’Etat. Nous avons nos militants partout donc nous sommes informés et savons se qui se passe. Il est quasi impossible de cacher des choses à l’UNTM. Nous savons que ce que nous demandons est possible. Nous nous battrons jusqu’au bout puisque nous savons que ce que nous réclamons est possible.
Journaldumali.Com : N’êtes-vous pas un bras armé de l’opposition politique ?
Non, non (catégorique). Notre mission est incompatible avec la politique. Aucun parti politique ne vous dira que nous sommes en contact avec ses leaders. Nous faisons du syndicalisme et nous refusons tout amalgame.