Le système de santé au Mali est alarmant depuis des décennies. Si l’on peut encore parlé d’un modèle, Où en est-il ?, je fais référence à celui qui est censé couvrir toute la population en termes d’accès aux soins et aux médicaments, de façon égalitaire. Ce système obsolète en place depuis l’indépendance du pays le 22 septembre 1960, a pour objectif premier la baisse de la mortalité infantile, de la mortalité maternelle et autres maladies définies à tort, de « marginales », et qui s’expliquent par l’extrême pauvreté. Elles sont la cause de plusieurs décès au Mali.
En dépit de ce système de santé horizontal qui est inopérant, nous pouvons noter quelques améliorations dans les programmes de santé verticaux spécifiques, notamment dans le préventif et curatif, afin d’évincer des pathologies bien déterminées : Polio, SIDA, Tuberculose,…, ces progrès sont réalisés grâce aux financements extérieurs dont les Aides Publiques au Développement (APD). Aujourd’hui, le système de santé au Mali, a énormément besoin de ressources financières issues des caisses de l’Etat et impose des investissements significatifs dans les infrastructures sanitaires. Dans certains villages du Mali, l’offre de soins semble être d’une inconsistance pathologique.
Malheureusement, le constat est alarmant dans ces milieux où les populations exercent massivement en zone rurale et beaucoup de personnes sont dans l’urgence de survie. Ces personnes ont très souvent une santé fragile à cause de leur situation économique entrainant une sous-alimentation ou une malnutrition, mais aussi par les difficultés de leurs conditions de vie. Celles-ci pourraient s’améliorer grâce à l’évolution de leur état de santé en général résultant l’atténuation de leur vulnérabilité. Dans ce contexte, la question qu’il faut se poser est de savoir comment améliorer les soins des populations rurales ?
Par Dr Oumou SANOGO : Médecin généraliste-Spécialisation en Chirurgie Viscérale
Urgence à améliorer les soins des populations, notamment dans l’obstétrique
Depuis quelques années, le secteur privé dans les soins se développe un peu partout au Mali et c’est une alternative intéressante s’il y a une bonne organisation. Malheureusement, force est de constater que ce secteur est en grande partie accessible qu’à ceux qui ont les moyens financiers de recourir à la santé. Le gouvernement malien doit prendre conscience qu’il a le devoir de faciliter l’accès aux soins à l’ensemble de la population. Cela signifie, qu’il a le devoir d’équiper et de faciliter l’accès aux soins dans tous les hôpitaux publics et les centres de santé de référence. C’est une priorité indiscutable et dans l’urgence. Dans ces milieux ruraux compliqués d’accès, il y a une carence criarde d’offre de soins. De plus, pour des raisons d’impécuniosités en lien avec des ressources financières très limitées, la majorité de la population se retrouve privée des soins tant sur le préventif qu’en curatif.
La population a difficilement accès aux médicaments et cette situation engendre énormément de décès. Ces décès qui pouvaient être évités grâce à de meilleures prises en charge, sont très souvent dus aux piqûres de serpents, d’animaux domestiques et sauvages, mais aussi une mortalité liée simplement aux mauvaises prescriptions des médicaments de certains médecins mal formés.
Outre l’obsolescence des hôpitaux et des centres de santé, il est important de mentionner le niveau très réduit du nombre de lits pour couvrir des hospitalisations nécessaires afin de sauver des vies. De surcroît, les plateaux techniques s’ils existent, sont dans un état exécrable pour assurer efficacement les soins des populations.
Ces constats sur la problématique de soins dans les zones rurales sont des tares qui ne font que gangrener et nuire à notre système de santé. Ils sont également un frein pour améliorer certains indicateurs : baisse de la mortalité infantile et maternelle, amélioration de l’espérance de vie qui oscille autour de 59 ans pour une personne en bonne santé, etc. Bon nombre de milieux ruraux qui exhibent des taux inquiétants issus de ces indicateurs. Il faut impérativement améliorer ces taux pour garantir les grossesse et les accouchements. En parallèle, un nombre conséquent de femmes enceintes ont plus tendance à faire confiance aux pratiques traditionnelles et ne consultent donc pas un médecin. Ces femmes ne sont pas généralement informées, elles n’ont aucun suivi médical tout au long de la grossesse et c’est un « tabou » de parler de l’intimité de la femme dans la société traditionnelle. Les pouvoirs publics ont le devoir d’imposer aux collectivités d’informer ces femmes sur la nécessité de consulter un médecin lors de leurs grossesses et accouchements. De plus, les collectivités à travers les agents municipaux doivent mettre en place un processus ou guide de sensibilisation des populations sur la nécessité des soins médicaux et d’évincer progressivement la croyance traditionnelle. Celle-ci consiste à recourir aux soigneurs traditionnels qui peuvent avoir des pratiques très risquées avec des connaissances parfois limitées sur les soins obstétricaux pour la future maman et l’enfant lui-même.
Par Amadou SY : Consultant en Diagnostic Economique et Financier-Spécialiste en Economie Africaine, Membre du Centre d’Etudes et de Réflexion du Mali (CERM)
Urgence à améliorer les soins des populations, gage de croissanceéconomique
Les soins obstétricaux qui concernent les femmes depuis leurs grossesses jusqu’à l’accouchement sont de plus en plus risqués, notamment dans les zones rurales. Dans ce contexte, donner une attention particulière et faire un focus sur la santé des populations dans ces zones piètrement valorisées en termes d’actions publiques, est sans doute un pilier de progrès socio-économique. Nous n’allons pas nous attarder sur les discussions relatives à la croissance économique versus croissance démographique (augmentation du nombre de naissance), mais plus évoquer l’amélioration de la croissance économique en mettant en oeuvre des actions publiques efficaces dans le domaine des soins obstétricaux. En effet, il n’est plus à prouver qu’améliorer la santé des femmes en général, est synonyme de prospérité socio-économique d’un pays. L’économie ne se résume pas qu’aux chiffres, elle est avant tout sociale et les femmes occupent une place prépondérante pour atteindre le plein emploi dans un territoire donné. Nos « mamans » ont un rôle de socle social à promouvoir et à valoriser ! Si elles ne sont pas en bonne santé, les activités génératrices de revenus (AGR) n’existeront tout simplement. Ces activités en grande partie tenues par des braves femmes, sont la quintessence de notre économie et plus particulièrement dans les zones rurales. Elles permettent de créer des emplois notamment à vocation agricoles, quand l’on sait que la structure économique du Mali est fondée majoritairement sur le secteur primaire. L’agriculture et ses dérivés représentent environ 40% du Produit Intérieur Brut (PIB), ensuite le secteur secondaire avec près de 25% et pour terminer avec le secteur tertiaire avec 35%. Les femmes produisent plusieurs variétés de céréales dans l’Office du Niger et s’organisent généralement en associations coopératives. Comme l’on dit « l’union fait la force ! ». Certaines de ces coopératives sont financées par des Organisations Non Gouvernementales (ONG), l’Etat à travers l’Office de la Haute Vallée du Niger (OHVN) qui est une structure parapublique (une partie des capitaux appartiennent à une personne publique tandis que l’autre est prise en charge par une personne privée), etc.
Ainsi, une amélioration de la santé des femmes enceintes jusqu’à leur accouchement devrait être une priorité dans la politique de santé de l’Etat. Une femme en bonne santé mène des activités pour créer de la richesse afin de subvenir aux besoins de sa famille et in fine toute la communauté. Le rôle des pouvoirs publics est donc indéniable pour sensibiliser, éduquer et former le personnel de soins et la population locale et mettre en place les conditionnes idoines dans les hôpitaux et les centres de santé (communautaire et de référence) afin d’améliorer réellement les soins obstétricaux nécessaires pour une croissance économique soutenue.
Dr Oumou SANOGO – Médecin généraliste-Spécialisation en Chirurgie Viscérale
Amadou SY – Consultant en Diagnostic Economique et Financier-Spécialiste en Economie Africaine, Membre du Centre d’Etudes et de Réflexion du Mali (CERM)
Maliweb