En un peu plus de deux semaines le président IBK et Soumaïla Cissé ont eu trois entretiens à l’allure de conciliabules. Rien n’en a filtré et pour cause ! Les deux hommes ont opté pour la démarche consistant à procéder à une large consultation de personnalités réputées avoir une solide expérience dans la gestion des affaires publiques (anciens présidents de la République et anciens Premiers ministres) ou occupant le devant de la scène nationale à divers titres (chefs de partis politiques, leaders de la société civile etc ). A l’issue de laquelle concertation un canevas de discussion sera établi qui déterminera lui-même le format et la durée du dialogue qui va s’ouvrir.
A l’évidence, la majorité présidentielle, conduite pat Dr Bocary Tréta, est acquise à un dialogue circonscrit aux réformes administratives et institutionnelles mises en chantier par le gouvernement Soumeylou Boubèye Maïga. A l’effet « d’approfondir la décentralisation » de rendre » plus performante la démocratie malienne » et de mettre le pays en phase avec ses engagements nationaux (accord pour la paix d’Alger) et sous-régionaux (création d’une Cour des Comptes préconisée par l’UEMOA).
Dans ce cas, le Cadre de Concertation National créé sous l’égide du ministre de l’Administration territoriale Mohamed Ag Erlaf devrait suffire et la durée des échanges ne devrait pas excéder trois ou quatre semaines.
On connait le sort que lui ont fait les deux pôles de l’opposition, le FSD et la Cofop. Après avoir participé à sa séance inaugurale, elles se sont rétractées et ont mis en avant « un dialogue politique national » ou » un dialogue refondateur« . Deux vocables visant un même objectif : en plus d’un réaménagement de la Constitution notamment pour réduire substantiellement les pouvoirs du président de la République, la prise en compte de tous les dossiers qui hantent le pays : le péril terroriste, le processus de paix fragilisé, les conflits communautaires, le banditisme ambiant, la crise financière, le chômage des jeunes, la migration sauvage, les revendications salariales, l’embourbement de l’école. Et tutti quanti.
Si cette formule est retenue et ce serait un miracle si elle ne l’était pas, nous irions vers une conférence nationale dans le style de celle de 1991 qui déboucherait sur une 4ème République. Le régime IBK s’est fait tellement d’ennemis dans tous les compartiments de la vie nationale (et, hélas, les frasques de ses têtes d’affiche en rallongent la liste chaque jour que Dieu crée) qu’on voit mal comment il pourrait échapper à cette révolution silencieuse en gestation.
Dans la meilleure des hypothèses il devra s’accommoder d’une Conférence d’entente nationale, à l’instar de celle de 2017, dont les recommandations seront toutefois contraignantes.
Dans les deux cas les débats prendront plus de temps et, pour éviter au Mali de basculer dans » un vide constitutionnel » à partir de la date butoir du 30 juin à venir, la révision de la Constitution sera imparable avant cette échéance. Et les rédacteurs du futur projet de la Loi fondamentale seront bien avisés d’y inscrire une période de transition de six mois, une année, peut-être plus, pour la mise en place du nouveau dispositif institutionnel notamment l’Assemblée nationale.
En attendant, Soumeylou Boubèye Maïga reste plus que jamais solide à la primature. Pendant qu’IBK explore les voies de » la décrispation politique » en prenant soin de ne pas en être la principale victime, le Premier ministre a renoué avec son sport favori : voyager dans les contrées périlleuses du Centre et du Nord, ouvrant ici des chantiers de développement, rassurant là des populations se sentant à l’abandon. Tout en continuant à assumer son rôle de bouclier pour le président, qui le rend si haïssable aux yeux de certains.
Saouti Haïdara
Source: L’Indépendant