Depuis ce dimanche 15 août 2021, l’Afghanistan est passé sous le contrôle des Talibans après le désengagement des troupes américaines. Or, face à la dégradation du climat sécuritaire au sahel, on constate que de plus en plus des voix réclament le départ des forces étrangères dont la présence n’aurait servi à rien. A l’instar de l’Afghanistan, les pays du Sahel ne vont-ils pas sombrer après le départ des forces étrangères ?
Si les deux décennies de présence des forces étrangères, notamment des forces américaines en Afghanistan n’ont pas mis à l’insurrection des Talibans, leur absence a néanmoins laissé un vide qui a occasionné, voire favorisé le triomphe des Talibans. Ces derniers n’avaient en face d’eux qu’une armée afghane ruinée par la corruption, le sous équipement et la mauvaise formation, donc peu résistante. Pour preuve, il n’a fallu que dix jours de combat aux Talibans pour reprendre le contrôle de la capitale provinciale Zaranj, la grande ville de Kunduz, de la capitale du Helmand, de Kandahar, la plus deuxième ville du pays et de Mazar-i-Sharif et même de la capitale Kaboul le 15 août dernier alors que toutes les tentatives de prise de pouvoir par les Talibans se sont soldées par des échecs au cours des dernières années lorsque les forces américaines étaient encore sur le terrain.
Lors d’une émission sur CNN au début du mois de juillet, Joe Biden, le président américain jugeait que « la probabilité que les Talibans prennent complètement le contrôle et dirigent le pays en entier est très improbable ». Mais face à la fulgurante avancée des Talibans, le président afghan Ashraf Ghani a quitté le Pays pour éviter “un bain de sang“. Quelques heures plus tard, les Talibans annonçaient avoir pris le contrôle du palais présidentiel pendant que Washington, Londres et d’autres capitales occidentales cherchaient à évacuer leurs personnels diplomatiques et leurs ressortissants à l’exception de la Russie.
Le sahel doit tirer des enseignements du cas de l’Afghanistan
Si « gouverner, c’est prévoir », les gouvernements des pays du sahel doivent tirer les meilleures leçons possibles de la crise Afghane et la considérer comme un avertissement. Même si la France semble déterminée à éteindre la flamme du terrorisme au Sahel comme en témoigne le récent passage de la force Barkhane à Takuba, ils feraient mieux de se préparer à toutes les éventualités pour éviter toute surprise désagréable de la part de leurs partenaires et notamment de la France dont la présence est de plus en plus décriée par une bonne partie des organisations de la société civile et par certains hommes politiques. Pour Tiebilé Dramé, ancien ministre des affaires étrangères du Mali : « l’issue de la guerre d’Afghanistan devrait faire réfléchir au Mali et au sahel. Notamment ceux qui, depuis des années formules les mêmes demandes que les chefs de guerre terroristes ». Plutôt dans la journée, Jean-Luc Mélanchon, le leader de la France insoumise déclarait sur son compte twitter : « Il est temps de réfléchir avant de s’engager dans des guerres sans issue car si la guerre ne change rien, la défaite change tout. » puis ajoute-il « on ferait bien d’y penser au Mali ».
Malgré la méfiance des populations des pays sahéliens vis-à-vis des forces étrangères, il convient de signaler que son appui aérien et en information dans la lutte contre l’hydre du terrorisme au Sahel demeure considérable et précieux. Pour preuve, lorsque la France a suspendu sa coopération militaire avec le Mali suite aux évènements du 24 mai dernier, les responsables militaires maliens interviewés par les médias notamment RFI n’ont pas caché leur inquiétude. Cela prouve à suffisance que les armées locales ne sont pas suffisamment prêtes à relever le défi sécuritaire sans l’aide de leurs partenaires et que le risque de sombrer comme l’Afghanistan en cas de retrait de la France demeure probable aussi longtemps que les armées locales présenteront les mêmes symptômes que l’armée afghane.
Ibrahim Diarra, stagiaire
Source: LE PAYS