Dix personnes, dont l’organisateur présumé du réseau, ont été mises en examen mardi et mercredi à Marseille dans l’enquête sur le trafic de viande de cheval impropre à la consommation, mis au jour dans le sud de la France et aux ramifications internationales.
La tête supposée du réseau de trafic, Patrick Rochette, un grossiste en viande chevaline de 59 ans, a été mis en examen mercredi soir pour “faux et usage de faux, tromperie et association de malfaiteurs pour établissement de faux administratifs”, et laissé libre sous contrôle judiciaire avec un cautionnement de 15.000 euros, selon le parquet de Marseille.
Installé depuis plus de 15 ans à Narbonne, il y faisait abattre en moyenne une dizaine de chevaux par semaine, selon un des actionnaires de l’abattoir, Frédéric Goixart.
Le négociant avait également ouvert en 2011 une boucherie dans une galerie commerciale, disposant d’une importante chambre froide où des carcasses ont été saisies lundi par les enquêteurs pour analyse.
Neuf autres personnes, toutes mises en examen pour des chefs similaires, notamment “faux et usage de faux” et “tromperie”, ont été laissées libres et placées sous contrôle judiciaire: le fils et la femme de M. Rochette, ainsi que six maquignons (marchands de chevaux) et un informaticien, soupçonné d’être un faussaire, poursuivi pour complicité.
Vingt-et-une personnes au total avaient été interpellées lundi dans onze départements du sud de la France lors d’une vaste opération mobilisant une centaine de gendarmes. Onze ont été relâchées pour être reconvoquées ultérieurement, dont quatre vétérinaires qui signaient des certificats, parfois sans même avoir vu les chevaux.
Ce trafic, aux ramifications européennes (des perquisitions ont eu lieu à Gérone en Espagne), porte à ce stade sur 200 chevaux revendus bien qu’étant impropres à la consommation. Mais, selon le procureur de Marseille Brice Robin, ce n’est que le “début de l’enquête” et la fraude pourrait concerner bien plus d’animaux. En effet, “50 chevaux par semaine, donc 200 par mois, transitaient par l’abattoir de Narbonne, dont 50% destinés à la consommation en France et 50% à l’exportation”, a-t-il précisé.
Des chevaux utilisés par l’industrie pharmaceutique
Ces animaux, achetés à bas prix, provenaient de centres équestres, de particuliers ou encore du laboratoire pharmaceutique Sanofi.
L’un des sites du groupe en Ardèche aurait cédé des animaux entre 2010 et 2012 à un marchand de chevaux du Gard, qui les aurait ensuite vendus au responsable présumé du trafic, selon les enquêteurs. Une soixantaine de chevaux sont concernés, mais pour l’heure, seulement deux certificats falsifiés ont été recensés.
Les animaux ayant servi à des expérimentations doivent toujours être écartés de la chaîne alimentaire, “par prudence”, a précisé le ministère de l’Agriculture. La plupart sont euthanasiés, étant dans de rares cas “placés” si un certificat vétérinaire atteste que les conditions sont réunies.
L’abattoir de Narbonne, dont l’activité viande de cheval représente 5 à 10% des 3.000 tonnes de viande qui en sortent chaque année, s’est dit mardi “complètement étranger à cette histoire”, indiquant n’être “que des prestataires de service”, selon M. Goixart.
L’information judiciaire a été ouverte début novembre 2013, à la suite d’une dénonciation anonyme dans l’Aude, pour des faits ayant débuté en mai 2011.
“En l’état de ce dossier, il n’y a aucun caractère nuisible à la santé humaine”, avait souligné lundi le procureur, précisant qu’il s’agissait d'”une fraude aux normes sanitaires, pas d’une fraude sanitaire”.
Si la viande de cheval était bien vendue sous cette étiquette-là, à la différence de l’affaire Spanghero, du nom de l’entreprise audoise qui faisait passer de la viande de cheval pour du boeuf, l’affaire risque d’éprouver à nouveau la filière.
SOURCE /AFP