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TOUR DE LASSA : L’échec du Mouvement démocratie a-t-il plongé le Mali dans une crise profonde ?

Ce dimanche 12 juillet 2020 (un agréable souvenir pour nos ex-ancêtres les Gaulois suite à la victoire des Bleus d’Aimé Jacquet à la Coupe du monde « France 98 »), nous nous sommes réfugiés dans le calme et la douceur naturelle de notre bienveillante et verdoyante tour à Lassa. Un cadre idéal pour fuir Bamako et ses faux problèmes.

A nos pieds, nous avions tout le loisir d’observer la ville, de « sciencer » (réfléchir) sur la situation actuelle de notre pays. Entre un pouvoir qui joue au funambule (pour amuser la galerie) au lieu de prendre le taureau par les cornes (mesures courageuses attendues par les citoyens et les médiateurs) pour rester le seul maître de l’arène ; et des mégalomanes déterminés à réduire le pays en ruines pour avoir gain de cause, qui blâmer ?
A nos pieds, une ville calme. Une atmosphère qui contraste avec l’effervescence tragique des 10 et 11 juillet 2020. La circulation était visiblement fluide car il y avait moins de fumée de véhicules dans le ciel. Seulement de temps en temps, montait en clameur la voix d’une griotte ou d’un DJ vociférant dans un micro pour égayer un mariage.

Et si la Cité des « Trois Caïmans » pouvait être toujours si sereine ? Calme, nous avons peur de sortir et ramasser une mortelle balle perdue ; d’assumer nos opinions et défendre nos convictions ; de se battre pour des valeurs… Mais calme parce que nous avons pris conscience que la place du coq n’est pas entre deux couteaux qui se battent ; parce que nous avons compris que, depuis les années 80 et 90, il y a des gens qui nous manipulent et nous utilisent pour leurs propres ambitions et qui finissent toujours par s’entendre en sacrifiant nos préoccupations.

Ils poussent nos enfants à être des Martyrs des causes dont ils ignorent tout. Depuis le 5 juin 2020, avez-vous vu le fils, la fille, le neveu ou la nièce d’un des leaders du M5 à un rassemblement ? Étaient-ils dans la foule lancée à l’assaut des services publics et des institutions le 10 juillet ? Ils ont chauffé la foule avec un discours de haine politique avant de lancer une horde de citoyens déchaînés à l’assaut des institutions, des services publics et des domiciles privés. Et ils ont l’hypocrisie de charger le pouvoir pour se dédouaner. Ils sont aussi comptables des morts et des blessés que le régime qu’ils ne veulent plus sentir parce qu’il leur a coupé les vivres.

Nous aimerions vouloir la sérénité toujours prévaloir dans le pays et dans sa capitale parce que chacun de nous aurait eu le courage de se regarder dans la glace pour se remettre en cause ; parce que chaque citoyen a pris conscience qu’il est un maillon essentiel du changement auquel nous aspirons individuellement et collectivement.

 

Se remettre au travail pour vivre dans la dignité et l’honneur

La corruption est le lit des grands maux liés à la gouvernance de ce pays depuis la fin prématurée de la première République. Qui corrompt qui ? Est-ce que si chacun se mire dans nos valeurs pour ne plus lorgner sur les marchés de l’autre, sur ses richesses matérielles et foncières, sur l’héritage des orphelins…, aurions-nous besoin de corrompre un chef coutumier, un supérieur hiérarchique ou un juge pour avoir gain de cause ?

N’est-ce pas alors la meilleure manière de rééquilibrer la balance de notre justice, nos rapports sociaux et professionnels ? La meilleure manière d’amorcer le changement souhaité est que tout le monde se remette au travail en se battant avec honneur et dignité pour réussir.

Travailler et vivre de la sueur de son front comme ce paysan en train de désherber péniblement son champ de maïs et d’arachide au flanc d’une montagne et avec qui nous échangeons souvent avant de regagner notre tour. « C’est un travail pénible car l’herbe pousse sans cesse. Vous avez constaté que chaque année, ils sont nombreux à abandonner leurs cultures aux herbes autour de moi ? Les gens ne veulent plus peiner pour vivre. Face au moindre obstacle, ils abandonnent. C’est ce qui fait que ce pays n’avance pas », nous explique-t-il en marquant une pause.

« Les jeunes ont fui le village pour venir s’entasser dans les villes à presque ne rien faire. Il n’y a presque plus personne dans nos villages pour cultiver. Pis, ceux qui y restent ont vendu presque toutes les terres de culture pour payer des motos et des Smartphones, des téléviseurs… Rien de productif qui peut être rentabilisé pour s’assurer un avenir serein. Et vous voulez changer ce pays alors que les forces du changement sont abonnées à la paresse, au thé, à l’alcool, à la drogue… à la vie facile ?», nous interroge-t-il en retournant à sa daba.

En fait comment peut-on aussi motiver les gens à travailler dans un pays où ceux qui triment sont aussi ceux qui souffrent le plus, marginalisés, stigmatisés ? Comment susciter cette motivation alors que l’élite a sombré dans la cleptomanie, dans la corruption et la délinquance financière ? Des maux qui auraient dû pourtant disparaître avec la démocratie au lieu de prospérer comme nous le constatons amèrement aujourd’hui ?

Si les leaders du M5-RPF luttent réellement pour le changement, il faut espérer qu’à l’issue de cette crise ils vont dire : « Chers jeunes (nous ne parlons pas de cette jeunesse opportuniste, cupide et fainéante qu’ils ont pervertie), nous nous sommes battus pour redresser le navire qui tanguait dangereusement par notre faute. Maintenant, nous vous passons le témoin tout en restant disponibles pour vous conseiller » !

C’est cela le changement, sinon tout le reste n’est que verbiage ! Et à défaut, les jeunes compétents du pays et de la diaspora doivent se donner la main pour contraindre ces vautours et crocodiles de la démocratie à passer le témoin. Ils sont tous coupables de ce que notre pays vit depuis des décennies. C’est facile d’accabler IBK de tous les péchés d’Israël. Il n’est pas le seul qui a échoué, mais l’ensemble des « Démocrates convaincus » issus de Mars 91 qui a échoué à se hisser à la hauteur des attentes du peuple. Donc, qu’ils s’en aillent tous s’ils veulent le bonheur du Mali !

Hamady Tamba

Source: Le Combat

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