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Tombouctou : L’Armée monte la garde

Pour que la peur change de camp, les FAMa ont créé des unités spécialisées, organisent des patrouilles urbaines et offrent des escortes sur les axes routiers les jours de foires hebdomadaires

 

Sur l’axe bitumé Goundam-Diré, 35 km, une colonne de véhicules de l’Armée escorte les forains. Lundi, c’est la foire de Goundam et mardi, celle de Diré. «La fête (Tabaski), c’est demain. Du coup, ce lundi-ci devient la foire de toute la Région», fait observer Abou Aldjoumat, commerçant itinérant. Dans leurs pick-up, les soldats sont sur le qui-vive. Les regards perçants, les doigts sur la gâchette, impossible de leur arracher ne serait-ce qu’un sourire.

Dans cette zone, chaque moment d’inattention peut être fatal pour les éléments et la file de véhicules marchands qu’ils escortent. 

«Bonjour ! Ça se passe bien?». Le soldat, mine serrée, multiplie par zéro le coucou du passant. Durant tout le trajet, aucun incident. Les forains rentrent à la maison, saints et saufs.

Les militaires regagnent leur garnison de Goundam avec la fierté d’avoir accompli leur mission. Devant leur camp, une sentinelle filtre l’entrée. Une équipe légère ouvre l’œil. Mais ce n’est que la face visible de l’iceberg. Le camp est toujours en alerte. Le mal peut venir de partout. Et à tout moment.

À Tombouctou, le camp militaire fait face à la place de l’Indépendance. à droite, la police et tout droit se dresse majestueusement le gouvernorat de la région. à gauche, le périmètre de sécurité est élargi jusque sur la route qui mène au monument surplombé par la sculpture de Elfarouk, redoutable et célèbre gardien de la cité aux temps immémoriaux. Selon la légende, Al Farouk fut le génie protecteur de Tombouctou. Il se montre aux méchants et aux malveillants une fois la nuit tombée. Les pieux, il les craint et les protège. Le mystérieux Cavalier blanc prend en flagrant délit les voleurs et les jouisseurs. Selon la légende, il est habillé de boubou blanc, de babouches blanches, de litham blanc et conduit toujours un cheval blanc avec un grelot au son lugubre et grave.



DES MOMENTS DIFFICILES- 
Les Fama ont vécu de moments difficiles dans le Septentrion. Des hordes de terroristes sortent des dunes de sable pour s’attaquer aux symboles de l’État. Tout comme les groupes armés séparatistes qui portaient aussi des coups. Dans la confusion et l’impréparation à la guerre contre un ennemi sans visage, nos soldats ont abandonné leurs positions.

Aujourd’hui, la situation a radicalement changé. Les militaires tiennent vaillamment leurs positions et mènent des patrouilles régulièrement. Le temps d’une armée en débandade est révolu. Dans le camp Cheick Sidi Elbakay (un des 333 saints de Tombouctou), les jeunes soldats sont dévoués et rompus à la tâche. 

Le commandant de zone, le colonel Mamadou Keïta, reçoit dans ses bureaux gardés par des hommes lourdement armés. Assi sur une banquette, le chef militaire saisit son téléphone portable et montre des photos prises en brousse avec ses hommes. « C’était le jour de la Tabaski.

Au lieu d’aller à la mosquée ou dévorer un bélier en famille, je suis allé auprès de mes hommes sur le terrain pour partager avec eux des moments de réjouissance », confie fièrement l’officier supérieur, ajoutant que les FAMa font «également du social en apportant de l’eau potable aux populations dans les villages qui en manquent. En plus des distributions de vivres aux plus démunis, les militaires organisent très souvent des consultations médicales gratuites». «La guerre que nous menons ne se fait pas seulement qu’avec les baïonnettes mais aussi avec des actions qui rapprochent les militaires des civils sur le terrain», ajoute le chef militaire.

SOIF DE VICTOIRES. Quid des escortes de convois? Le colonel Keïta rassure : «Les escortes se poursuivent. Entre Léré et Nampala, les patrouilles nous ont permis de mettre la main sur du matériel et des bandits. Les gens vaquent à leurs occupations sur le tronçon». Même assurance quant au moral de la troupe. Il est au beau fixe, tranche-t-il. Les formations continuent en «ambiance de guerre». «Nous mangeons avec les troupes et nous dormons avec eux. C’est pourquoi, nous avons une troupe motivée et qui a soif de victoire. Nous agissons afin que la peur change de camp», enchaîne le commandant de zone. 

Dans la région, les types de menaces sont nombreux : les terroristes et les bandits armés. «Nous sécurisons toutes les foires de la région. On connaît le programme hebdomadaire de toutes les foires.

Cela permet d’éviter beaucoup d’attaques sur les tronçons. L’une des grosses menaces est l’explosion des engins improvisés», indique le chef militaire. C’est justement pourquoi des opérations spéciales sont organisées pour détruire le dispositif de l’ennemi. 

Pour être plus efficace sur le terrain et pouvoir répondre aux besoins tactiques, le commandement militaire a créé des unités spéciales notamment la section «Pirates» dédiée aux missions délicates avec la devise «Nous faisons de mauvaises choses aux mauvaises personnes». Cette section est appuyée par l’UMIR (Unité mixte d’intervention rapide) composée de tous les corps pour les patrouilles, empêchant les infiltrations et les actions nuisibles.

La zone militaire couvre 512.000 km, soit 40 % du territoire national. Elle correspond à plus de 100 fois la Gambie et 10 fois le Togo. Pour couvrir cette étendue désertique, il faut des effectifs en hommes et du matériel adapté, sans compter la couverture aérienne. «Je dors très souvent dans mon bureau pour les raisons de commandement. L’ennemi est informé de tous nos mouvements. Nous devons alors être réactifs pour apporter le soutien nécessaire aux hommes déployés sur le terrain. L’ennemi évite le combat frontal. Après quelques rafales et des hommes tombés, c’est déjà leur victoire. L’ennemi dispose de fusils de longue portée et il disparaît rapidement sur des motos», développe l’officier supérieur.

Le colonel Keïta révèle que l’Armée ne se contente pas de riposter aux attaques. Elle organise des missions de recherche de l’ennemi. «La sécurisation des personnes et leurs biens, des axes routiers et des autorités administratives régionales. Ce sont des missions régaliennes pour nous», martèle-t-il. Soudain, il se lève. «Je suis obligé de vous quitter parce que les éléments m’attendent dans la salle des opérations pour préparer l’arrivée d’une mission et la sortie d’une autre immédiatement», explique-t-il. à la porte, attend le commandant Issa Djibril Ouattara, responsable de la salle des opérations, avec un talkie-walkie qui ronronne des messages dans un jargon incompréhensible pour le profane.

Envoyé spécial
Ahmadou CISSÉ

Source : L’ESSOR

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