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Terrorisme : Bankass le martyr

Koulogon, Ogossagou I et II, Niamia, Pissa, Gouary, Wela, Bagourou, Yabatalou, Diallassagou, Dianweli, Deguessagou, Koumoudou, Berembé, Ségué… Elle est très longue, la liste des villages endeuillés par les forces terroristes dans le cercle de Bankass. Toutes les 12 communes ont été touchées. Malgré les efforts en cours pour la sécurisation des personnes et leurs biens par les autorités de la transition, les Bankassois, eux, continuent impuissamment de compter leurs morts. Le nombre de personnes déplacées se multiplient et le risque de famine s’agrandit chaque jour. Ce cercle est, sans nul, l’une des localités martyres de la barbarie humaine.

Terre de paix, de cohésion sociale et de vivre ensemble entre toutes les communautés, le cercle de Bankass est devenu, depuis des années, une zone invivable. Et oui, c’est malheureux, mais les ennemis de la paix l’ont voulu ainsi. Ce cercle convoité par les touristes (Endé par exemple) est, de nos jours, l’une des localités les plus craintes au Mali, à cause des attaques terroristes qui endeuillent la nation malienne presque chaque semaine, depuis bientôt 4 ans. Toutes les communautés de la localité en sont victimes.

Des centaines de personnes tuées, des villages vidés, des milliers de personnes déplacées, le commerce à l’arrêt, des animaux volés ou brûlés, des milliers d’engins incendiés…Il est sombre, le tableau des attaques terroristes dans le cercle de Bankass.

Le bilan macabre

Le cercle de Bankass a connu, depuis 2018, plusieurs dizaines d’attaques terroristes qui ont endeuillé des centaines de familles. Des villages entiers ont été rayés de la carte du Mali. Des milliers de personnes sont devenues sans abris, des dizaines d’écoles fermées, hypothéquant ainsi l’avenir de milliers d’enfants. Des dizaines de villages ont été empêché de cultiver (leur activité principale), exposant les populations à la famine. Des dizaines de personnes enlevées depuis des années pour certains, des mois pour d’autres, sont dans les mains de leurs ravisseurs terro-djihadistes. Le commerce, une activité principale, dans beaucoup de localité dans le cercle, est pratiquement impossible.

Le Mouvement patriotique pour l’Unité et la sauvegarde du cercle de Bankass fait état de « 280 attaques dans les villages, sur les routes, dans les foires et les champs » dans le cercle de Bankass depuis 2018. Selon le bilan de cette association, des centaines de personnes sont mortes et de milliers d’autres ont été contraintes à quitter leurs localités. « 171 villages et hameaux ont été directement ou indirectement victimes de ces attaques terroristes et environ 3 929 personnes provenant de 87 villages sont déplacées. 225 personnes ont été enlevées dont environ 140 personnes encore détenues depuis novembre 2021, mars et juin 2022 et dont nous n’avons aucune nouvelle », a précisé le mouvement de Abdalla Togo. Selon ce mouvement, « 662 personnes ont perdu la vie suite aux attaques, sans comptabiliser la situation des attaques survenues en 2022 dans les villages de Bèrimbè, Ouendékoro, Diallassagou, Dèguèssagou et Dianweli ».

Il est important de rappeler que l’attaque de Diallassagou, Dianweli et Deguessagou a fait 132 morts (bilan officiel). Mais, selon des sources locales, plus de 200 personnes ont été tuées. Les mêmes sources ont précisé que « tous les otages de Diallassougou, Dianweli et Deguessagou ont été exécutés ». Au-delà de ces villages, les récentes attaques dans plusieurs villages du cercle ont fait des morts.

En plus du bilan humain très lourd, le cercle a été totalement appauvri par les forces terroristes. « Entre 2018 et 2021, 10 428 animaux ont été enlevés, 351 habitations brûlées, 5 197 greniers brûlés, 110 matériels agricoles enlevés ou brûlés…Les écoles sont fermées dans 9 communes (Lessagou, Baye, Diallassagou, Koulogon, Ouenkoro, Ségué, Sokoura, Soubala et Tori) », précise le Mouvement patriotique pour l’unité et la sauvegarde du cercle de Bankass.

Des accords locaux sans résultats escomptés

Dans le cercle de Bankass, la plupart des communes ont signé des accords locaux de paix. Ont-ils porté fruit ? Même si ces accords ont amené un peu d’accalmie dans le cercle, ils n’ont pas pu empêcher les attaques contre les populations. La preuve : bien qu’ils soient signataires des accords, les villages de Diallassagou, Dianweli et Déguessagou ont été endeuillés par les terro-djihadistes. D’autres villages signataires des accords ont été également attaqués. « Les communes qui ont signé les accords locaux de paix souffrent même plus que celles qui n’ont pas signé. La seule solution pour ramener la quiétude dans le cercle de Bankass, c’est la présence des forces armées maliennes. Il faut une base de l’armée à Bankass pour la sécurité des personnes et leurs biens », a laissé entendre un manifestant à Bankass, aux lendemains du massacre des civils à Diallassagou, Dianweli et Déguessagou.

Lesdits accords étaient-ils sincères depuis leurs signatures ? Doute forte. Ils n’auraient pas échoué s’ils étaient sincères. Selon Mamoudou Ziguimé, conseiller communal à Baye, « les communes ont signé ces accords pour pouvoir vivre ». Ce qui voudrait dire que les populations ont signé les accords malgré elles-mêmes. Elles les ont signés parce que l’État qui doit assurer leur sécurité était absent.

L’État n’est pas le seul responsable. Certains acteurs sur le terrain y sont beaucoup dans  la dégradation de la situation sécuritaire. En tout cas, selon notre interlocuteur. « Il y  a beaucoup de membre de comité de gestion qui marchandent les accords. D’autres en profitent pour accroitre leurs revenus », nous a confié l’élu communal.

Bankass sans nouvelles de ses fils pris en otage

Une soixantaine de ressortissants de Bankass ont été enlevés en novembre 2021,  sur la route du poisson, au niveau de pont de Parou-Songobia, devenu « l’enfer » pour les usagers de l’axe Bandiagara-Bankass. 8 mois après, Bankass n’a aucune nouvelle de ses enfants. Malgré les efforts des autorités locales et de l’Association pour le développement du Seno-Bankass, ces otages n’ont pas recouvré la liberté. Vivent-ils ? Où sont-ils ? Dans quelles conditions sont-ils ?  Quand seront-ils libres pour rejoindre les leurs ? Seuls leurs ravisseurs ont la réponse à ces questions. Les initiatives, selon nos sources, sont toujours en cours en faveur de leur libération. L’espoir pour un dénouement heureux est donc toujours permis. Les autorités de la transition doivent, si elles ne le sont pas déjà, s’impliquer, réunir toutes les conditions pour la libération de ces otages.

Ce qu’il faut

Tout le Mali se glorifie de la montée en puissance de l’armée. Effectivement, l’armée fait des exploits depuis des mois. Mais dans le cercle de Bankass, malgré les efforts en cours, le mal est toujours là. Il est d’ailleurs profond. Pour Mamoudou Ziguimé qui ne mâche pas ses mots, la montée en puissance de l’armée doit se sentir à Bankass aussi. Pour lui, l’armée, après avoir neutralisé les terroristes dans un village, doit faire le ratissage dans toute la localité. Car, déplore-t-il, « sans ce ratissage, les djihadistes viendront tuer de paisibles citoyens en représailles ». L’armée doit, à son entendement, prendre au sérieux les alertes concernant les menaces d’attaques contre telle ou telle localité.

Quant aux populations, elles doivent continuer à collaborer avec l’armée en dénonçant les terroristes et leurs complices.

B. Guindo

Source: LE PAYS

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