La dynamique de la réconciliation intercommunautaire gagne du terrain à Ténenkou. Peulhs, Tamasheqs, Bambaras, Bozos ont ainsi fait la paix à Bourouwell dans la commune rurale de Diondiori. Ils s’engagent dans la voie du dialogue, de la tolérance, de la paix, du vivre ensemble.
Depuis la libération par l’armée malienne et ses alliés, en janvier 2013, des régions du Nord et d’une partie de Mopti qui étaient sous la domination des djihadistes et terroristes, on assiste à des vengeances, au réveil de litiges fonciers, à des sentiments de frustration, de méfiance et, dans certains cas, à des règlements de compte au sein des communautés vivant dans ces localités. Les actes de grand banditisme régulièrement perpétrés ont installé une psychose d’insécurité à Ténenkou.
L’économie locale affectée, tarde à redécoller. Cette situation ne favorise pas le retour de la paix, de l’entente et de la confiance entre les communautés de ces régions qui pourtant vivaient en parfaite symbiose avant la crise.
Avec le retour des réfugiés constitués en majorité de Tamasheqs en provenance de Mauritanie, dans la commune de Diondiori et celle de Ténenkou, une méfiance totale s’est instaurée entre les habitants de ces contrées.
Actuellement, dans la ville de Ténenkou et à Bourouwell, un village de la commune de Diondiori, les scènes de règlements de compte sont courantes entre les différentes communautés.
Ainsi, la tension est vive à Bourouwell où l’élément amplificateur des difficultés de cohabitation entre les communautés, réside dans la gestion des ressources naturelles. Deux familles de ce village – la famille de Sékou Diall et celle de Yéro Cissé – se disputent un site maraîcher. Au retour des réfugiés et déplacés internes et en l’absence de l’administration locale, le conflit s’est réveillé et divise le village.
Face à ces défis à la paix, à l’initiative de la Commission communale de réconciliation (CCR) de Ténenkou et de Diondiori, en collaboration avec le gouvernement, l’Ong Enda-Mali, à travers son projet « Yaafa To » (le temps du pardon), appuyée par la coopération allemande Caritas, a été organisée le 21 novembre dernier, une journée de dialogue intercommunautaire pour le bon vivre ensemble.
La rencontre s’est déroulée sur la place publique de Bourouwell, une localité située à 25 km à l’ouest de Ténenkou. Présidée par le maire adjoint de Diondiori, Sidiki Guindo, elle a regroupé plus d’une centaine de personnes venues des deux communes et des communautés voisines. Les participants étaient composés d’élus des collectivités, de représentants des Commissions communales de réconciliation (CCR) de Ténenkou et de Diondiori, de leaders coutumiers et religieux, de communicateurs traditionnels, de membres des structures traditionnelles de gestion de conflits, des chefs des deux familles opposées de Bourouwell, des représentants d’associations de jeunes et de femmes, des chefs de village et des conseillers. Le secrétaire général de la mairie de Diondiori, le coordinateur régional du projet « Yaafa To », Ousmane Bouaré, et le facilitateur de ce dialogue, Mohamed Fall Baby, étaient également présents. Des personnes réfugiées en Mauritanie et revenues au bercail et d’autres vivant encore dans ce pays voisin ont participé au forum.
A l’ouverture des travaux, le maire adjoint a fait observer une minute de silence en la mémoire des personnes mortes dans l’attaque terroriste de l’hôtel Radisson et souhaité prompte guérison aux blessés. La journée a été marquée par des discussions directes, franches, cordiales et constructives sur le thème principal : « paix et réconciliation et comment les consolider ».
Après une analyse profonde de l’évolution actuelle de la situation, le rôle et les responsabilités de tous les acteurs ont été clairement dégagés. Les leaders coutumiers, religieux, les communicateurs traditionnels, les structures traditionnelles de gestion des conflits, les CCR de Ténenkou, Diondiori et les Ong partenaires intervenant dans les communes de Ténenkou, se sont tous engagés à s’impliquer davantage dans la recherche et la consolidation de la paix et de la réconciliation. Cette dynamique de réconciliation, selon les participants, permettra de barrer la route aux terroristes qui cherchent à perturber la paix en marche à Ténenkou et au Mali.
Des solutions concrètes de sortie de crise ont été recommandées telle le lancement de grandes actions de développement dans toutes les communes. Des stratégies de pérennisation des acquis ont également été proposées.
Peulhs, Tamasheqs, Bambaras et Bozos ont ainsi signé un pacte de paix et de réconciliation à Bourouwell. Les deux familles opposées sur la propriété d’un site maraîcher ont décidé d’enterrer la hache de guerre. D’un commun accord, le site litigieux est passé sous le contrôle du chef de village de Bourouwell. « Nous sommes obligés de vivre ensemble. Créons les conditions de ce vivre ensemble car nous sommes les fils d’un même pays. Le Maliba est un et indivisible », ont rappelé en substance les deux chefs de famille dont la poignée de main a scellé définitivement la réconciliation dans le village, voire dans tout le cercle.
A la clôture des travaux, le maire adjoint de Diondiori a salué la grande mobilisation des populations à cette rencontre de la paix qui permettra aussi de barrer la route aux terroristes. Ensemble, les participants ont fait des prières et des bénédictions pour la consolidation de la paix et de la réconciliation au Mali
Exécuté par Enda Mali, le projet « Yaafa To » s’étend sur 3 ans (2014-2017). Financé par le gouvernement avec la coopération Caritas Allemagne, il couvre les régions du Nord et les cercles de Ténenkou, Youvarou et Douentza.
M. DEMBELE
AMAP-Ténenkou
Les communautés Peulhs, tamasheqs, Bambaras, bozos scellent un pacte pour la paix et la réconciliation à Bourouwell dans la commune de Diondiori
source : Essor