Ouverture en Suisse ce mercredi 22 janvier de la conférence dite de «Genève 2» sur la Syrie, en présence d’une quarantaine de délégations, dont celle du pouvoir de Bachar el-Assad et celle de l’opposition syrienne en exil. Beaucoup de Syriens doutent du succès de la conférence, à commencer par ceux qui se battent contre le régime de Damas. Notre envoyé spécial à la frontière turco-syrienne, Nicolas Falez, a rencontré un combattant islamiste syrien.
Sur le téléphone portable de Melek défilent les vidéos des combats qu’il a filmés. Images d’explosions, crépitement des rafales d’armes automatiques ponctuées des « Allah Akbar » lancés par les rebelles. Et à la fin de la séquence : des images de cadavres de soldats de l’armée régulière syrienne.
« C’est l’une de nos batailles, c’était pour la prise d’un aéroport », raconte le jeune homme, grand gaillard au visage d’enfant, encadré d’une barbe soigneusement taillée. Cela fait un an et demi que l’ex-étudiant en droit originaire d’Azzaz (nord de la Syrie) a rejoint un groupe rebelle islamiste, l’Armée de Mohammed, composée de Syriens mais aussi de jihadistes français, libyens, tchétchènes ou bosniaques. « On leur apprend à se battre, à utiliser les armes, à les entretenir », raconte Melek, pour qui l’apprentissage le plus important reste « celui de la charia ».
Jihadiste français
Sur Facebook, le jeune homme nous montre la photo d’un garçon coiffé d’un bonnet : « un Français » assure Melek selon lequel ce jihadiste aurait été tué au combat à l’été 2013 à al-Safira, près d’Alep dans le nord de la Syrie. « Nous avons prévenu sa famille qui n’était même pas au courant qu’il était parti faire le jihad en Syrie », raconte Melek. Qui affirme que les effets personnels de son camarade attendent toujours que quelqu’un les récupère.
Lorsque nous rencontrons Melek, à Kilis, dans le sud de la Turquie, il s’apprête à rentrer en Syrie, pour y rejoindre son groupe armé. Il n’attend rien de la Conférence de Genève 2 : « Cela va donner du temps au régime pour reprendre les zones rebelles, c’est une tromperie pour le peuple syrien », assure le jeune combattant. Il est persuadé : « A la fin Bachar mourra… ou alors ce sera nous… Il n’y aura qu’un seul survivant… »
80 dollars par mois
Melek explique que L’Armée de Mohammed est financée par des donateurs syriens. Il dit toucher « 80 dollars par mois » mais que la solde est plus importante pour ses camarades qui ont une famille, contrairement à lui.
Le combattant syrien affirme que son organisation reste « neutre » dans la bataille que se livrent actuellement l’Etat Islamique en Irak et au Levant (EIIL) et les autres groupes rebelles. « Nous avons les mêmes objectifs qu’eux [l’EIIL, Ndlr] mais pas les mêmes méthodes », murmure Melek qui rêve que la Syrie devienne « un Etat islamique ».