N’en déplaise à ceux qui n’ont cessé de vouloir le dénigrer, le ministre Mohamed Ali Bathily n’a jamais changé d’adresse pour se retrouver logé dans une rue qui s’appellerait « spéculation foncière ». Il n’a rien cédé à quelque entrepreneur que ce soit. Dire le contraire relève du fantasme et de la diffamation.
En sa qualité de ministre chargé des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, il est concerné par les mesures et les actions entrant dans la préparation du Sommet Afrique-France, prévu à Bamako en décembre 2016.
A cet égard, compte tenu de la faiblesse de la capacité d’accueil des hôtels de la place, l’une de options devant permettre de garantir l’hébergement de tous les hôtes de marque attendus en cette circonstance, fut de dire qu’il fallait achever certains hôtels en construction, et construire de nouveaux hôtels.
Ainsi, les travaux sont commentés ou vont l’être, pour l’achèvement des hôtels « Mariétou Palace » et de l’hôtel de l’ACI. Ainsi des terrains vont être identifiés pour recevoir d’autres hôtels (Sheraton et Hyatt) ou toutes autres infrastructures prévues pour le Sommet.
L’hôtel Hyatt a souhaité s’installer sur l’esplanade créée par le décret n°10-401/P-RM du 3 août 2010, déclarant d’utilité publique la construction d’un monument, celui du Cinquantenaire de notre indépendance.
Lorsque ce souhait a été exprimé, le ministre des Domaines a saisi la direction nationale des domaines et du cadastre aux fins de préparer toutes les informations relatives à l’espace indiqué, qu’il s’agisse de celles qui ont trait à ses dimensions ou de celles qui se rapportent à sa situation juridique.
Ces informations ont permis de savoir que l’espace constitue un terrain de 3 hectares, 43 a, 9 ca, ce qui est loin d’être une servitude et que sa situation juridique fait l’objet du décret n°2010-401/P-RM du 3 août 2010 ci-devant évoqué.
Pour céder un tel espace, pour le vendre, il faut au préalable satisfaire à deux conditions dont l’une est juridique et l’autre économique.
La condition juridique est la suivante : le décret évoqué ayant déclaré d’utilité publique les travaux de construction d’un monument du cinquantenaire, pour pouvoir effectuer sur cet espace d’autres travaux que ceux-là, il faut obligatoirement abroger ledit texte.
Dans la mesure où il s’agit d’un décret du président de la République, seule cette institution est compétente pour procéder à cette abrogation. Et elle en a parfaitement le droit.
Mais, pour l’instant, S. E. M. le président de la République n’a point instruit qu’on lui prépare un projet d’abrogation du décret n°2010-401/P-RM du 3 août 2010. Le ministre des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières n’a aussi, pour sa part, jamais saisi le secrétariat général du gouvernement ou celui de la présidence d’un tel projet.
A fortiori, il n’a jamais saisi ses propres services pour établir quelque acte de vente que ce soit. Il s’est contenté de leur instruire de prendre toutes les dispositions en dehors desquelles la cession du terrain serait impossible, et de mettre à la disposition des représentants de Hyatt les informations disponibles sur la superficie du terrain et le prix qu’il coûterait sur la base du coût du mètre carré défini par le décret applicable en la matière.
D’autre part, il a demandé qu’une dérogation soit accordée à la direction nationale des domaines et du cadastre pour pouvoir céder le terrain au cas où sa vente devrait intervenir, cette dérogation étant conforme à l’article 5 de l’arrêté interministérielle n°2015-025/MDEAF-MATD/SG du 2 mars 2015 portant suspension des attributions de terrains du domaine public de l’Etat et des collectivités territoriales.
Faut-il rappeler qu’on était en juin 2015 et qu’il s’agit d’un projet de construction d’un hôtel destiné à abriter éventuellement les hôtes du Sommet Afrique-France prévu pour décembre 2016 !
Aussi, pour éviter d’être coincé par les délais, il n’y avait pas d’autres choix que de s’entourer de toutes les précautions pouvant permettre de prendre la décision ou non de céder le terrain.
La demande de dérogation participe de l’anticipation qu’il convient de faire dans le cas d’espèce. Elle entre dans l’ensemble des informations qu’il faut réunir et mettre à la disposition de l’institution habilitée à abroger le décret n°10-401/P-RM du 3 août 2010, déclarant d’utilité publique la construction d’un monument du Cinquantenaire de notre indépendance, afin qu’elle puisse prendre en pleine connaissance de cause sa décision.
Toute chose qui nous conduit à évoquer la condition économique. A cet égard, il faut rappeler que l’espace envisagé procède d’un terrassement du lit et des berges du fleuve, créant ainsi une nouvelle servitude en cet endroit. Les travaux entrepris à l’occasion ont un coût qu’il convient de répercuter nécessairement sur le prix de revient dudit espace au moment de sa cession éventuelle.
Les données financières relatives à ces travaux n’étant guère disponibles au niveau du ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, il restait tout simplement à les récolter auprès des départements de tutelle pour finaliser les conditions de cession au cas où elle devrait avoir lieu.
Ce sont là les circonstances qui ont amené le ministre à chercher à réunir toutes les informations, et à prendre certaines dispositions permettant de préparer la cession dans un délai compatible avec l’agenda du Sommet Afrique-France, de l’espace convoité pour la construction de l’hôtel Hyatt. Une fois en possession de toutes ces informations, et une fois les dispositions liées à la dérogation prévue à l’article 5 de l’arrêté interministérielle n°2015-0205/MDEAF-MATD/SG du 2 mars 2015, il pouvait se permettre de soumettre le dossier de la cession au conseil des ministres, lequel avait alors beau jeu d’en décider en toute responsabilité.
Le ministre serait-il sorti de ses attributions en préparant ce dossier ? Aurait-il vendu ou spéculé comme certains s’amusent à le dire rien que pour avoir travaillé à informer le conseil des ministres, et à instruire la décision du président de la République, seul compétent pour abroger le décret n°10-401/P-RM du 03 août 2010 déclarant d’utilité publique les travaux de construction du monument du Cinquantenaire ?
Nous croyons qu’il faut savoir raison gardée, et avoir l’accusation réservée jusqu’à sa preuve. Une chose est d’avoir parlé de la vente et une autre de l’avoir réalisée, a fortiori, d’avoir spéculé en catimini pour son seul profit.
En tout état de cause, il vaut mieux assimiler que ce bien appartient à l’Etat qui en dispose à sa guise, à tout moment, tant qu’il n’en a pas cédé la propriété. Il peut en changer la vocation comme il veut, si tel est son souhait. Pour y parvenir, il n’est tenu qu’au respect des procédures que le ministre des Domaines a entrepris de satisfaire dans le cas d’espèce.
Ce sont là autant d’informations disponibles qu’il aurait été loisible de chercher avant même que d’accuser. Comme à son habitude, le ministère des Domaines aurait donné ces informations au public une fois la procédure close à son niveau. Il n’aurait pu avant que le conseil des ministres n’ait été amplement informé de la situation, et avant que le président de la République n’ait décidé, livrer à la presse et à l’opinion publique une décision qui ne lui appartient pas et qui ne saurait lui appartenir.
Bamako, le 19 octobre 2015
NOTRE REPONSE
Les aveux du ministre Bathily
Le ministre Bathily a finalement « répondu » aux graves accusations de spéculation foncière contre quelqu’un comme lui qui en a fait son cheval de bataille.
Cependant, dans son cas, il aurait mieux fait de ne plus rien dire, car ses invectives ressemblent plus à des aveux. Notre article était simple et clair.
Le ministre Bathily a cédé les servitudes du fleuve a une société dont on peine à prouver l’existence, a un montant encore confidentiel. Dans ce cas entre la date qu’il dit à laquelle il a été saisi de la requête et sa réponse, il s’est écoulé moins de deux mois. Une performance pour une administration qui, en temps normal, mettrait deux ans. Voilà ce que nous avons écrit.
Pour toute réponse le ministre fait dans l’invective et le dénigrement. Nous n’utiliserons pas ce ton et nous ne le suivrons pas sur ce terrain mais nous retenons simplement qu’il a quand même mis trop de temps à réagir pour quelqu’un qui peut traiter aussi rapidement une demande de parcelle au cœur de Bamako.
Nous retenons également que l’objet de notre article n’est pas démenti. Tout juste tente-t-il de justifier pourquoi il l’a fait. Ça c’est un autre débat.
Alexis Kalambry
Source: leschos