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Soutenabilité de la dette africaine : REAO–Mali engage le débat

Le Réseau de l’entreprise en Afrique de l’Ouest (REAO-Mali) apporte sa contribution au débat houleux en cours sur l’impact et les enjeux de la dette des pays africains. Jeudi dernier, le Réseau a, en effet, organisé son 2è webinaire sur le thème : «La dette africaine, mythes, réalités et impacts sur le développement du continent». Quatre panélistes étaient face à la presse : l’ancien Premier ministre, Moussa Mara, son homologue du Bénin, Lionel Zinsou, Dr Ibrahim Assane Mayaki du Niger (CEO Nepad) et le représentant résident du FMI au Mali, René Tapsoba.

 

À la lumière des exposés, une position unanime s’est dégagée : la dette en soit, si elle est accordée à des taux d’intérêt raisonnables, contribue toujours à l’atteinte des résultats souhaités, à condition d’être bien gérée. «Si l’on s’endette pour réaliser des infrastructures, elle est toujours nécessaire», a indiqué Lionel Zinsou. Mais pour René Tapsoba, lorsqu’un pays africain emprunte 100 millions de Fcfa, ce sont en moyenne 60 millions qui sont investis dans les infrastructures physiques, 40 millions font objet de déperdition.

Le taux de déperdition est de 49% au Mali en moyenne, à cause de la surfacturation, des problèmes de gouvernance, a-t-il ajouté. Pour sa part, l’expert-comptable Moussa Mara a confirmé qu’une majeure partie des fonds bi et multilatéraux vont dans les poches des travailleurs publics ou leurs partenaires.

La dette africain, faut-il le rappeler, est estimée à environ 800 milliards de dollars (environ 400.000 milliards de Fcfa) aujourd’hui, contre 300 milliards (environ 150.000 milliards de Fcfa) au début des années 2000. Cela, à cause à la dette intérieure, des euro-obligations. La dette intérieure représente plus de 200 milliards de dollars d’augmentation (environ 100.000 milliards de Fcfa), contre un peu plus de 50 milliards (environ 25.000 milliards de Fcfa) pour les dettes bi et multilatérales.

Parlant de la dette intérieure, Moussa Mara trouve que les entreprises sont utilisées comme variables d’ajustement de la trésorerie de l’État. «Cela contribue à étouffer nos économies», a déploré l’ancien Premier ministre et député élu en Commune IV. La question de la dette intérieure est au cœur des discisions à l’Union africaine (UA), a assuré Dr Ibrahim Assane Mayaki. Le CEO Nepad a été formel : «Il n’y aura pas de décollage économique réel souhaité s’il n’y a pas de remboursement des arriérés intérieurs. Ne négligez pas vos dettes intérieures».

Concernant la soutenabilité de la dette, l’économiste béninois a écarté toute équivoque : «L’Afrique n’est pas surendettée, parce qu’aujourd’hui, avec plus de 50% du PIB, nous sommes en dessous du seuil de la dette des pays développés rapportée à leur PIB : 100% en France, 130% en Italie et 200% au Japon, etc». Surtout que, a insisté le banquier, l’Aide publique au développement, accordée aux pays à faible revenu comme le Mali, est un prêt concessionnel au taux d’intérêt presque négatif payable sur plus de 10 ans.

Pour lui, l’Afrique est au contraire confrontée à un problème de financement pour accélérer son développement socio-économique. «Nous sommes sous financés, l’aide publique au développement a été réduite de 60 milliards de dollars (environ 30.000 milliards de Fcfa) ces quelques années. Cette situation, selon l’ancien PDG du Fonds d’investissement européen PAI Partners, nous oblige à aller sur les marchés financiers. Où les taux d’intérêt sont très élevés : 6 à 7% en Afrique subsaharienne pour une durée maximale de cinq ans», a expliqué Lionel Zinsou.

Cette situation ne se justifie pas, quand on sait qu’en 2009, l’Afrique a eu la deuxième croissance la plus forte au monde, derrière l’Asie et loin devant l’Europe et l’Amérique du Nord. La dette est-ce une arme de pression massive contre l’Afrique ?, interrogea le vice-président du REAO, Mossadeck Bally, modérateur de la session virtuelle. Aucun intervenant n’a répondu directement à cette question. Certains ont suggéré le recours aux marchés et mécanismes internes de financement.

«Du point de vue géopolitique, cela permettra à l’Afrique de discuter de façon autonome», a tranché un paneliste. D’autres ont estimé qu’une volonté de cohésion et de consultation est en train de se dégager à l’échelle continentale en matière de négociation du coût des prêts accordés au continent. «Les ministres des Finances essaient d’avoir une position commune. Lorsque nous discutions avec le club de Paris par exemple, il y avait une stratégie commune», a rappelé l’ancien Premier du Niger.

Par ailleurs, «nous sommes capables de nous auto-financer. Nous avons des leviers liés à l’épargne africaine. Nous sommes le continent qui épargne le plus avec un plus de 20% rapporté au PIB national», analysera pour sa part l’ancien Premier ministre béninois. Les fonds de pension et les fonds souverains africains qui financent les économies d’autres pays, s’élèvent à plus de 1.000 milliards de dollars (environ 500.000 milliards de Fcfa), a ajouté Dr Ibrahim Assane Mayaki. À l’Union africaine, nous travaillons pour ramener 5% de ces 1.000 milliards de dollars sur le continent», a-t-il révélé.

Pour le représentant résident du FMI au Mali, les transferts des migrants qui sont passés de 4 à 6% du PIB ces dix dernières années, peuvent être également mis à contribution. Aussi, existe-t-il d’autres mécanismes alternatifs comme le partenariat – public privé – (PPP). «Le but doit consister à faire un partage de risque soutenu par un transfert de technologie. Y recourir pour des contraintes budgétaires est contreproductif», a précisé René Tapsoba au Mali depuis octobre 2018.

De même, pour l’amélioration de la qualité de la dépense publique, Dr Ibrahim Assane Mayaki a invité le FMI à rendre publiques les informations sur ses rapports d’évaluation rédigés suite aux missions de ses services. «Il faut remettre en cause les dimensions secrètes de ces discussions qui se passent entre le FMI et les gouvernants», a plaidé l’ancien Premier ministre nigérien.

En tout état de cause, l’ancien Premier ministre, Moussa Mara a mis en garde contre le recours récurent au marché financier qui rendra, selon lui, la dette insoutenable dans les années à venir. Surtout que les fonds levés sur ces marchés sont de plus en plus utilisés pour financer les charges courantes, a déploré le nouveau député de la Commune IV.

Cheick M. TRAORÉ

Source : L’ESSOR

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