Dans une missive publiée fin janvier, le site d’information www.africakibaru.com a rendu virale la rumeur d’un coup d’état au Mali qui serait liée à un éventuel départ du Premier ministre SBM. Cette information, qui serait tenue de source militaire, tendait à faire comprendre l’attachement d’une partie de l’armée à l’ancien ministre de la défense aujourd’hui Premier ministre. Au-delà de la rumeur, elle a un intérêt analytique particulier. Sans spéculer sur « à qui bénéficie le crime », il est vrai que le timing de cette rumeur est troublant.
En effet, depuis quelques semaines, le cycle des scoops sur un remaniement imminent s’est installé dans le paysage informationnel du Mali. Chacun allant de son analyse et de ses sources plus que crédibles, la constante étant le départ plus que probable du Premier ministre. Le timing est troublant d’autant plus que le Premier ministre sort d’une démonstration de force avec une élection réussie et la présentation de la vision du second mandat du Président IBK lors des 100 jours de ce dernier au pouvoir.
Lors de cette cérémonie, le Premier ministre a dégagé plusieurs pistes qui ont redonné de l’espoir tant la forme et le fond du discours s’apparentaient à un vrai programme de gouvernance. Dans le même sillage, le Premier ministre a effectué plusieurs tournées dans le centre du pays qui ont eu le mérite de rapprocher les populations des gouvernants. Des promesses ont été faites pour circonscrire l’insécurité de la zone mais avec le temps, les résultats sont loin d’être probants.
Cet argumentaire sécuritaire, au centre et à Bamako, couplé d’avec le front social et religieux en ébullition, ainsi que l’absence sur le terrain de beaucoup de ministres, ont sans doute fragilisé le Premier ministre, qui fait face à une campagne minutieuse. Cette campagne n’est pas tant de faire partir un Boubeye sur de bons résultats malgré tout mais bien de préparer l’après IBK. Le parti du Premier ministre a vu ses rangs grossir, en réduisant par la même occasion les rangs des cadres des autres partis (y compris celui au pouvoir) comme peau de chagrin.
Les enjeux politiques sont de telles sortes que le rapprochement RPM (ou EPM ?) d’avec l’URD (ou le FSD ?) ne peut paraître fortuit et loin de ne pas concerner le patron de l’ASMA-CFP. Le RPM se donne déjà les moyens de rester le seul légataire de l’héritage IBK. Pour ce faire, il lui faut participer pleinement à la gestion de ce second mandat et ceci ne peut se faire sans être le maître du jeu gouvernemental. Un Premier ministre issu du rang du parti au pouvoir (et non plus de l’alliance de la majorité) est la seule porte de sortie du RPM des jeux jugés troubles du Premier ministre SBM.
Vouloir et pouvoir sont deux choses différentes, c’est bien connu. Rien ne garantit au parti du tisserand qu’il aura, cette fois-ci, après 8 gouvernements sous IBK, l’oreille du Président encore moins sa confiance. Il est reproché au RPM ses propres guerres intestines et son manque de cadres. Il peut lui être, surtout, opposer son envie de revanche qui n’augure pas d’une saine gestion de la chose publique.
Quant au Premier ministre, il continue sa route. Sa sérénité du début n’est plus un acquis parce qu’il est dit en froid avec le Président IBK. Seulement, il a prouvé, à plusieurs reprises que c’est dans l’adversité qu’il démontre sa réputation de fin tacticien. Cette tactique est visible dans sa présence redoublée dans les cérémonies de lancement de travaux de bitumage, comme celle du programme d’Assainissement et de Développement Urbain de Bamako (PADUB) ou autre.
Son retrait sur la grande question de l’insécurité à Bamako, gérée par le Ministre Général Salif TRAORE, de même que son discours de rassembleur lors de la Convention de son parti, sont une illustration de la gestion réfléchie de SBM. Malgré sa grande prudence, le Tigre (surnom que lui répètent fièrement ses admirateurs) pourra-t-il se sortir de la crise annoncée de la révision constitutionnelle ? Les boucliers se lèvent, pour l’instant du côté de l’opposition, mais ce ne serait pas cher de parier que les alliés du pouvoir vont décrier aussi la gestion du Premier ministre, pour le forcer au départ.