Celui dont le parcours politique était excellent jusqu’à sa deuxième nomination au poste de Premier ministre en 2015, aurait jeté l’éponge, après tant de semaines de rumeurs de sa démission. Modibo Keita, puisque c’est de lui qu’il s’agit, aura été un homme affable et intègre pendant plus d’une quarantaine d’années de carrière avant de laisser une tache noire sur les pages glorieuses de son parcours professionnel, celle de l’embarrassante affaire des logements sociaux dont il a fait l’objet et de tous les manquements aux principes démocratiques et de bonne gestion sous son autorité. A la retraite politique, à défaut de se repentir, Il aura certainement sur sa conscience les actes maladroits et peu honorables qu’il aurait commis dans l’exercice de sa fonction primatoriale. Ecrira-t-il un jour ses mémoires pour se faire bonne conscience ? N’a-t-il pas trop attendu pour rendre le tablier ?
Modibo Keita désormais ancien Premier ministre a eu un destin exceptionnel, celui d’avoir eu l’estime de trois Présidents de la République à savoir, Moussa Traoré, Alpha Oumar Konaré et Ibrahim Boubacar Keita. Tous lui ont déroulé le tapis rouge à cause de son intégrité, de sa loyauté et de sa compétence. Modibo Keita, né le 31 juillet 1942 à Koulikoro, fut d’abord instituteur à Kéniéba, puis professeur à l’Ecole normale secondaire de Bamako, avant d’être nommé directeur du Centre de recherche pédagogique et de production audiovisuelle (télévision scolaire) et directeur général de l’Institut pédagogique national. Son premier poste politique a été celui de directeur de cabinet du ministre de l’Education nationale. Il fit son entrée au gouvernement en 1982 en qualité de ministre de l’Emploi et de la Fonction publique. Avant d’occuper le très stratégique département des Affaires étrangères et de la Coopération internationale de 1986 à 1989. Pour parfaire sa carrière diplomatique, il fut nommé ambassadeur du Mali auprès de la République Fédérale d’Allemagne, de la Suisse, de la Suède, du Danemark, de l’Autriche, de la Norvège et auprès des organisations du système des Nations-Unies à Genève et à Vienne. Après l’avènement de la Démocratie en 1991, il rentre au bercail en 1992, et occupe successivement les postes de conseiller pédagogique à l’Institut pédagogique national, conseiller chargé de l’éducation à la Présidence de la République puis Secrétaire général de cette institution. En 2002, il est nommé Premier ministre, après le départ de l’économiste Mandé Sidibé. Il organisa les élections de 2002 qui ont vu le Général à la retraite ATT succédé au Pr Alpha Oumar Konaré. Comme le phœnix, Modibo Keita renaitra de ses cendres politiquement pour occuper en avril 2014 le poste de « Haut représentant de l’Etat pour le dialogue inclusif inter-malien ». Il aura mené avec doigté la mission à lui confiée par le chef de l’Etat, avant de se voir confier de nouveau la Primature après le départ de Moussa Mara. Le PM a-t-il été à hauteur de mission ? La réponse est mitigée tant il avait suscité un espoir incommensurable en arrivant à ce poste en janvier 2015. Malgré tout, la corruption n’a pas diminué d’un iota, le chômage des jeunes est toujours criard. Il n’aura aussi réussi ni à mettre l’Administration d’Etat au travail, ni à résoudre la lancinante crise au nord du Mali, encore moins à contenir le front social de plus en plus ébullition. Le désormais ancien Premier ministre aura sur sa conscience l’embarrassante affaire des logements sociaux où il aura laissé sa femme et certains de ses enfants bénéficier des faveurs indues, laissant planer l’odeur du népotisme et du délit moral. Vivement les Mémoires de « Monsieur » comme le surnommaient, à son insu, certains de ses ministres.
Youssouf Sissoko
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