Au cours d’une conférence débat, tenue le 15 mars 2019 au Conseil national du patronat du Mali (CNPM), sur le thème : « Rôle du secteur privé dans la lutte contre la corruption », le conférencier, Pr. Clément Dembélé, a estimé que si rien n’est fait pour stopper ce comportement, le secteur privé va disparaître d’ici 2025.
Pour décrire le climat des affaires actuellement dans notre pays, Clément Dembélé n’est pas parti avec le dos de la cuillère. Dans sa définition de la corruption, le conférencier a précisé : «La corruption, c’est le fait de remettre quelque chose à quelqu’un visant à l’influencer dans l’exercice de sa fonction. » Selon lui, cette forme de corruption consiste à céder un pourcentage en vue de bénéficier d’un marché ou d’un contrat.« Sous le régime précédant ce pourcentage s’élevait à 10%. Aujourd’hui, nous frôlons les 30% accordés à une administration ou à une personne physique pour pouvoir bénéficier d’un marché ou d’un contrat. Dans ces conditions, si rien n’est fait, plus de 80% des entreprises sont en train de partir en faillite. Et, d’ici 2025, le secteur privé est appelé à disparaître », a-t-il ajouté, avant de rappeler qu’une économie crispée ne permet pas du tout à un pays de se développer.
Dans son exposé, le conférencier a également souligné que le Mali a obtenu en 2016 une note de 32 sur 100 à l’indice de la corruption de Transparency International, sur une échelle allant de 0 (extrêmement corrompu peu corrompu). «Cette note fluctue légèrement si l’on observe les classements des cinq dernières années: 35 en 2015, 28 en 2013 et 34 en 2012. Converti en rang, le Mali figure à la 116ème place sur 176 pays en 2016. Il se situe dans la médiane en Afrique subsaharienne, où il est classé 19ème sur 44 pays (Transparency International 2016)», a-t-il précisé.
Toutefois, Clément Dembélé a fait savoir que selon les enquêtes d’opinion réalisées en 2017 par Afrobarometre, parmi les élites, les groupes perçus comme les plus susceptibles de se livrer à des actes de corruption étaient les juges ; les magistrats ; les décideurs du secteur privé et la police. « Une majorité des sondés (59,3 %) estimait que la totalité ou la quasi-totalité des juges et des magistrats se livraient à la corruption. Pour les décideurs du secteur privé et la police, ces chiffres étaient respectivement de 55,8 % et 55 % », a-t-ajouté.
Le conférencier a aussi souligné que le Bureau du Vérificateur général continue de lever le voile sur des pratiques similaires sous le régime d’Ibrahim Boubacar Keita. « Selon le dernier rapport du Bureau du Vérificateur général, paru en 2017 et portant sur l’année 2015, le Mali aurait perdu près de 70 milliards de francs CFA (100 millions d’euros) en raison des fraudes et de la mauvaise gestion », a-t-il déclaré.
Pour palier tous ces maux, Clément Dembélé propose, entre autres, l’audit des comptes des partis politiques ; le contrôle du financement des campagnes électorales ; l’introduction de l’éducation civique et morale dans le cursus préscolaire, scolaire et universitaire ; le respect de la déclaration des biens de tous les cadres étatiques, les élus nationaux et locaux et les personnes occupants des postes de nomination… Il demande également à ce que ces déclarations des biens soient faites périodiquement et publiées dans le journal officiel.
Ousmane BALLO
Source : Ziré-Hebdo