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Situation à Kidal : L’heure de vérité

Rescapé des combats fratricides qui l’ont opposé au tandem An sardine et Mujao et miraculeusement sauvé d’une mort militaire certaine par l’opération Serval, le Mnla poursuit ses exactions contre les populations civiles noires du nord. Blotti sous le parapluie des Forces armées françaises auxquelles ses combattants doivent d’avoir aujourd’hui la vie sauve et qui empêchent l’armée malienne de prendre la ville de Kidal, le mouvement séparatiste vient en effet de s’illustrer par des actes de déportation et des agissements qui s’assimilent à une vaste opération d’épuration ethnique.

 

MNLADepuis, plusieurs jours et sous l’œil indifférent des troupes françaises présentes à Kidal, des dizaines de personnes ont été enlevées et soumises à des sévices graves avant d’être chassées par des hommes armés appartenant au Mnla.

 

Face à ce qui apparaît aux yeux des observateurs comme un énième dérapage de ce mouvement armé créé par le Gouvernement Sarkozy pour contraindre l’ex – président ATT à adhérer aux vues françaises en matière de lutte contre le terrorisme et l’immigration clandestine, l’attitude des autorités maliennes est difficilement lisible.

 

Hormis les condamnations verbales, l’on ne voit en effet de la part du gouvernement malien aucune initiative permettant d’entrevoir l’abandon du dogme des négociations et d’un accord préalables avec le Mnla, dogme imposé par la France et présentant le Mnla comme étant un interlocuteur obligé dans tout règlement politique concernant l’avenir du Nord. Or pour que le Mali retrouve une marge suffisante de manœuvre dans le cadre de ce futur règlement politique, il est impératif que le gouvernement de Bamako parvienne à faire douter la communauté internationale de la légitimité politique du Mnla, faussement présenté comme un interlocuteur politique honorable alors que ses dirigeants et ses combattants ont commis les pires crimes de guerre depuis le déclenchement de l’actuelle rébellion armée en janvier 2012.

 

En lieu et place de cette nécessaire riposte diplomatique, qui suppose une campagne efficace et urgente de plaidoyer et de lobbying auprès de la communauté internationale, y compris des institutions représentatives et de l’opinion publique française, l’on assiste à des déclarations incantatoires du genre : « rien n’empêchera l’armée malienne d’entrer à Kidal !» les élections se tiendront sur l’ensemble du territoire national ! ». Pendant ce temps, le Mnla multiplie les provocations et tente insidieusement d’affaiblir le consensus existant dans le pays autour du gouvernement de Transition dont l’incapacité à gérer la question est mise à nu toutes les fois  que le mouvement touareg se met en scène.

 

Déjà, les mouvements opposés à la Transition actuelle tels que le MP 22, la Copam ou encore le parti Sadi tentent de récupérer et de capitaliser le mécontentement créé par la persistance de la présence militaire du Mnla à Kidal et l’impuissance manifestée jusque là par le Gouvernement malien à mettre un terme à cette situation anormale. En tout état de cause, il y a fort à parier que le pays renouera fatalement avec le cycle dangereux de l’instabilité et de l’aventurisme politique si Kidal n’était pas rapidement libérée et si le scrutin présidentiel  ne s’y tenait pas en même temps que dans les autres régions du Mali.

 

De fait, les derniers développements de la situation à Kidal amènent à s’interroger sur la capacité réelle du Gouvernement à créer un rapport de force ou une dynamique politique, à défaut d’être militaire, susceptible d’infléchir la position de la France quant au rôle et à la place que doit jouer le Mnla dans le processus de paix.

 

On peut également déplorer l’impuissance du Gouvernement malien à proposer des pistes de solution alternatives au schéma concocté par la France et à faire partager la nécessité d’une approche différente du règlement de la crise du Nord à nos partenaires de la Cedeao et de l’Union africaine.

En effet, en dehors des déclarations de soutien faites du bout des lèvres par nos partenaires africains, l’on ne voit pas une véritable prise en charge de la question par ces derniers. Or, si le Mali veut échapper à tout tête  – à – tête, il lui faut impérativement récuser le schéma mis en avant par la France en vue de la résolution de la crise du Nord, et démontre les faiblesses et périls inhérents à ce schéma pour l’ensemble des Etats du sahel, qui sont presque tous confrontés à des conflits caractérisés par des revendications irrédentistes.

 

La mise en place de la Commission Dialogue et Réconciliation reste certes une piste intéressante pour minimiser l’influence  politique du Mnla, mais il faut une action politique et diplomatique plus agressive, plus imaginative et plus audacieuse pour éviter à terme la prise en otage de la question du futur statut à accorder aux populations touarègues du Mali. Car derrière les mots et les précautions de langage, ce qui est en cause c’est bien cette question qui sous tend l’action de la France, qui entend monnayer jusqu’au bout  le soutien militaire et politique apporté à notre pays au moment où plus rien ne s’opposait à la conquête de toutes les régions par les groupes jihadistes.

 

Devant les crises à répétition et les revendications irrédentistes au Nord du Mali, il faut savoir en effet qu’une bonne partie de l’opinion publique et des milieux politiques français, s’est laissé convaincre depuis fort longtemps qu’il faut accorder aux régions habitées par la minorité touarègue un statut particulier et  qu’elle manifeste une grande sympathie pour les mouvements irrédentistes touaregs. Pour renverser la vapeur et battre en brèche les thèses des tenants de cette ligne, qui rejoint en fait celle anciennement défendue par les milieux colonialistes de l’hexagone prônant la création d’un Etat touarègue dans le Sahara, il urge pour le Mali d’explorer toutes les voies politiques et de déployer enfin une véritable politique de communication sur le sujet.

 

Si l’on peut comprendre que le Gouvernement français s’entoure des plus grandes précautions pour prévenir d’éventuelles représailles contre les populations touarègues de Kidal, lesquelles pourraient entrainer des poursuites pénales contre ses plus éminents membres, rien ne justifie en revanche qu’elle impose quasiment le Mnla comme étant le seul et légitime interlocuteur du mali dans le cadre de futures négociations. Et surtout rien ne justifie qu’une partie du territoire malien reste occupée par des groupes armés opposés à toute présence de l’armée régulière.

 

 

Aux dernières nouvelles, le gouvernement malien semble s’être enfin décidé à prendre le taureau par les cornes et à mettre la France face à ses responsabilités en dépêchant des troupes chargées selon toute probabilité, de reprendre le contrôle de la ville de Kidal.

Birama FALL

 

L’intégrité territoriale du Mali et le cas de Kidal

Cela paraît en tout cas bien curieux de savoir pourquoi cette région de l’extrême Nord constitue une exception dans le processus de rétablissement de l’intégrité de notre territoire. Ici où ailleurs, l’on se demande pourquoi Kidal reste toujours aux  mains du Mouvement national de libération de « l’Azawad », alors même que ce groupe armé ne représente pas l’ensemble des populations de cette région, encore moins celles du Nord de façon générale. Mais, l’examen du contexte permet de comprendre que la situation de Kidal, s’explique en grande partie par un problème ethnique (notamment entre Ifogas et Imghads) auquel s’est greffé une guerre de contrôle territoriale qui passe, elle aussi, par une dimension ethnique. Toute chose qui a contribué à un émiettement systématique du politique avec son corolaire de foisonnement d’associations de toutes sortes. Ce qui pose d’ailleurs des problèmes dans le cadre de la commission dialogue et réconciliation. A cela s’ajoutent des rivalités d’ordre politique qui prennent sources dans les rapports entre les différentes communautés. Ces antagonismes s’accentuent avec l’arrivée au pouvoir, par le biais de la démocratie, de la communauté des Imghads. Or, de l’avis d’observateurs, si Kidal est laissée aux mains du Mnla, cela s’explique par le fait que les Ifoghas, produits des circonstances issues de la colonisation, ne veulent pas que cette région soit sous le contrôle d’Ag Gamou et des Imghads. D’ailleurs, cette dimension ethnique dans la gestion du politique a eu pour conséquence la dissolution du bataillon du Colonel Gamou alors même qu’il détenait une capacité d’intervention qui pourrait être utile à Kidal. Et en voilà une contradiction qui, selon des analystes, risque de contribuer à l’exacerbation du nationalisme malien.

 

Par ailleurs, il y a lieu de préciser que la base sociale que d’aucuns imputent prétendument au Mnla et la méfiance des populations de Kidal vis-à-vis du Sud qu’ils évoquent nous paraissent bien loin de la réalité sur le terrain. Aussi, la question essentielle que plus d’un Malien se pose au sujet de Kidal est de savoir si l’armée française a une responsabilité dans le fait que notre armée a mis tout ce temps avant de se mouvoir vers Kidal, jusque là dans le giron des narcotrafiquants du Mnla.

Bakary SOGODOGO

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