Le Mali, à l’instar des autres pays du monde, a célébré ce samedi 3 mai 2025 la 32e édition de la Journée internationale de la liberté de la presse, couplée à la Semaine nationale de la liberté de la presse du Mali. Cette commémoration, tenue à la Maison de la Presse de Bamako, a rassemblé les acteurs du secteur autour du thème : « Le journaliste malien face aux défis de l’intelligence artificielle : information et désinformation en période de crise multidimensionnelle ». Une journée marquée par des hommages, des échanges enrichissants et le lancement du Salon des Médias au Mali.
La cérémonie d’ouverture a été présidée par M. El Hadj Bandiougou Danté, Président de la Maison de la Presse du Mali. Elle a enregistré la présence du Représentant résident de l’UNESCO au Mali, du ministre de la Communication, de l’Économie numérique et de la Modernisation de l’administration, ainsi que de nombreux journalistes, étudiants en journalisme et partenaires du secteur médiatique.
Dans son discours inaugural, le président Bandiougou Danté a tenu à exprimer une pensée pieuse à l’endroit de tous les enfants du pays disparus, notamment les journalistes assassinés, enlevés ou emprisonnés dans l’exercice de leur métier. Il a rappelé que le thème retenu cette année, « Informer dans un monde complexe : l’impact de l’intelligence artificielle sur la liberté de la presse et les médias », souligne la complexité du travail journalistique à une époque marquée par des tensions politiques, sociales, économiques et diplomatiques.
« Les professionnels des médias risquent leur vie pour tenter d’informer le monde sur tous les sujets, de la guerre à la démocratie », a-t-il souligné, insistant sur le fait que le 3 mai n’est pas qu’une journée symbolique, mais un rappel aux gouvernements de leurs obligations envers la liberté de la presse.
Le président de la Maison de la Presse a aussi évoqué les cas de Birama Touré, Hammadoun Niaïlibouly, et Moussa Bana Dicko, tous portés disparus depuis des années, ainsi que celui d’Alfousseiny Togo, Directeur de publication du Canard de la Venise, placé sous mandat de dépôt depuis le 9 avril. « Je réitère ici ma demande de clémence pour le journaliste Alfousseiny Togo à la justice malienne », a-t-il lancé avec gravité.
Il a également salué les engagements récents du Président de la Transition pour la relecture des textes régissant le cadre juridique des médias, tout en appelant à des actes concrets. Bandiougou Danté a mis en garde contre la précarité économique des médias maliens, reprenant l’analyse de Reporters Sans Frontières (RSF) selon laquelle : « Les médias sont aujourd’hui pris en étau entre la garantie de leur indépendance et leur survie économique. »
Il a aussi rappelé que le Mali a perdu 5 places dans le classement mondial de la liberté de la presse 2025 de RSF, signe d’un recul préoccupant.
L’un des moments forts de la journée a été l’intervention de M. Sambou Biagui, représentant du Directeur de la Maison de la Presse du Sénégal. Dans un discours fraternel, il a salué l’initiative malienne de mettre en débat les enjeux de l’intelligence artificielle dans le traitement de l’information. Les représentants de l’UNESCO et du ministère en charge de la communication ont, quant à eux, réaffirmé leur engagement à accompagner les médias dans ce tournant technologique.
Une projection pédagogique sur le thème de la journée a permis d’éclairer les participants sur les enjeux liés à l’IA, les fondamentaux du journalisme, et la responsabilité sociale du métier. « L’intelligence artificielle est une machine qui fonctionne selon notre raisonnement. Elle peut être un allié précieux, mais aussi un danger si elle est mal utilisée », a rappelé un intervenant.
Dans la continuité de cette réflexion, le président Danté a annoncé deux événements majeurs à venir dans le cadre de la Semaine nationale : une grande rencontre des acteurs de la presse, coordonnée par M. Mamoudou Bocoum, pour dresser un diagnostic lucide de la situation médiatique, et le lancement du Fonds de solidarité de la presse, porté par M. Bassidiki Touré. « Il s’agit d’un mécanisme innovant de financement de nos préoccupations sociales, une preuve que nous devons d’abord compter sur nous-mêmes », a-t-il expliqué.
La journée s’est clôturée par le lancement officiel du Salon des Médias au Mali, édition 2025. Dans son allocution, le président du comité d’organisation, M. Issa Kaba Sidibé, a précisé que le salon, désormais rebaptisé, vise à devenir une vitrine de l’excellence journalistique malienne et un espace de dialogue sous-régional.
Ainsi, cette 32e Journée internationale de la liberté de la presse a été un moment fort de mobilisation, de dénonciation, mais aussi d’espérance pour les acteurs des médias. À travers les mots de Bandiougou Danté. « La liberté de la presse n’est pas un choix, c’est une nécessité. » Un message fort, à méditer dans un contexte où la survie même de l’information libre est en jeu.
Ibrahim Kalifa Djitteye