Hier, dimanche, les Maliens étaient appelés aux urnes pour élire leur prochain Président de la République. Ils avaient le choix entre IBK et Soumaïla Cissé. Un scrutin qui n’a pas suscité assez d’engouement populaire auprès des citoyens.
Il est 9 heures au Centre de Kalabancoro-Adeken. Depuis plus d’une heure de temps, les Bureaux de vote sont ouverts. Les Présidents, les observateurs, les Délégués, tous sont présents. Le matériel est au grand complet. Mais, les électeurs pour lesquels tout ce dispositif est mis en place se faisaient désirer. Une fine pluie s’abattait sur le quartier depuis l’aube. Pour Jonas Traoré, Président du Bureau n° 16 dudit centre, la faible affluence est due « à la pluie qui empêche les gens de sortir de chez eux ».
Il n’était pas le seul à le penser. Son collègue du Bureau numéro quatre, qui n’avait reçu que moins de 10 électeurs sur plus de 400 qui doivent voter dans son Bureau, il espérait que les électeurs feraient le déplacement après la pluie. Les quelques-uns qui avaient bravé cette pluie matinale pour accomplir leur devoir de citoyen disaient mesurer la portée de leur vote. «La pluie ne peut pas m’empêcher de venir voter. Il s’agit de l’avenir de mon pays. Je dois me mouiller pour choisir mon dirigeant ; cela ne me gêne pas du tout au contraire », dit cet Instituteur à la retraite. Tout trempé, il venait d’accomplir son devoir de citoyen et exhibait fièrement son index fraichement plongé dans l’encre indélébile.
À deux cents mètres du centre de vote, des jeunes autour d’une théière fumante, taillent bavette. Ils ont tous leurs bulletins de vote. Mais n’ont pas encore voté. Ils saluent en cœur le vieil Instituteur qui vient de voter. C’est le paternel d’un de leur ami. Eux, ils vont aller voter, mais, attendent qu’il cesse de pleuvoir. En tout cas, c’est le cas pour Moussa et Issa. Selon eux, avec la faible affluence, ils n’auront pas de mal à voter après avoir fini de siroter leur thé. Si les deux copains attendent que la pluie cesse pour aller voter, ce n’est pas le cas pour d’autres membres du grin. Eux, le disent à qui veut l’entendre, leurs bulletins de vote appartiennent au plus offrant. Au premier tour, ils affirment avoir perçu de l’argent pour voter en faveur d’un candidat qui, malheureusement, n’est pas au second tour. «Nous attendons jusque vers le petit soir, c’est en ce moment que les partis politiques se décident à débourser de grosses sommes pour une seule voix. Tôt le matin, ils ne donnent rien sinon très peu. Puisque la Présidentielle c’est chaque cinq ans, mieux vaut prendre de grosses sommes », lâchent-ils dans un éclat de rires qui irrite leur ami Issa qui désapprouve leur comportement.
Faible enjeu ?
Au premier tour, le taux de participation, selon la Cour Constitutionnelle, a atteint les 42%. Une prouesse quand on sait que plus de 800 centres de vote n’ont pu ouvrir. Donc, un tiers de l’électorat privé de vote. La faible affluence d’hier risque de faire chuter ce taux. Si la pluie était considérée comme la cause de la faible mobilisation dans la matinée, Dougoukolo Coulibaly, observateur de la CENI au Centre de Kalabancoro-Adeken, estime, lui, que la cause est plutôt la réduction du nombre de candidatures. «Vous savez, beaucoup sont ceux qui ne viendront pas voter parce que leur candidat n’est pas au second tour». En plus de cette réduction des candidatures, il dira aussi que le fait que de nombreux candidats n’aient donné de consigne de vote, cela va influer sur le taux de participation.
Les autres centres sillonnés dans la Commune V jusqu’à la mi-journée n’avaient pas plus bonne mine que le centre de Kalabancoro-Adeken. Ce dernier centre, lors du premier tour, avait enregistré plus de 150 votants dans ses 18 Bureaux. Le plus jeune des candidats, Mamadou Traoré, qui y avait accompli son devoir citoyen, manquait, ce dimanche, à l’appel quand nous quittions le centre.
Qui du vote des candidats malheureux ?
Ils sont vingt-deux candidats malheureux à être recalés au premier tour. Pour la plupart, ils n’ont pas donné de consignes de vote à leurs électeurs. À la veille du premier tour, les cellules de communications des candidats ont alerté les Rédactions sur les heures de vote de leurs candidats. L’objectif était de donner plus de visibilité à leurs porte-étendards. Mais, pour les candidats recalés, c’est le silence radio au niveau de leurs cellules de communication respective. Les quelques rares communicants que nous avons eus au bout du fil sur l’heure de vote de leurs candidats, n’étaient pas à même de nous renseigner. Iront-ils voter après avoir dit qu’ils ne soutiennent aucun candidat ? Mystère et boule de gomme.
Pour cet observateur, il est impératif pour eux d’aller voter ; même si c’est à blanc. Car, le vote est un acte citoyen et un candidat qui se refuse à cet acte parce qu’il n’est pas au second tour n’est pas « digne » de solliciter le suffrage des Maliens.
Jusqu’à la fin de la journée, les centres de vote n’étaient pas pris d’assaut. Ce n’était pas le grand rush. Le calme a prévalu toute la journée dans la capitale avec des pick-up remplis de militaires qui faisaient la ronde.
Mohamed Sangoulé DAGNOKO : LE COMBAT