Nous pouvons aimer le régime en place ou pas, choisir un camp ou pas, détester la démocratie ou pas, cependant, ce qui reste indéniable, c’est le fait que nous sommes tous maliens et que personne ne peut occulter aujourd’hui la réalité que notre pays se trouve dans une impasse terrible.
La justice fait peur aux citoyens, la religion sectarise, l’économie est à terre, l’armée s’isole du peuple tout en pensant être pour lui, la technologie nouvelle libère la parole et faute de normes, crée un monde d’anarchie indescriptible et dangereux pour la quiétude de la nation.
Pourrions-nous survivre dans la configuration actuelle en maintenant une attitude désinvolte et une posture de clivage assumé ?
Le droit n’est plus dit au Mali. Les gouvernants laissent faire et souvent même profitent de la situation. Des juges se sont starisés, enrichis et jouissent du pouvoir qui fait d’eux des surhommes. Avant, on pensait que c’était des dieux qui s’ignoraient, maintenant, beaucoup parmi eux en ont pris conscience et agissent en divin sur terre le plus naturellement possible. Alors, les faibles en pâtissent, et des riches en tirent allègrement avantage ou font des tribunaux des rings de titans. Les pleurs des sans voix et leurs résignations forcées déstructurent la société et aigrissent une grande majorité du peuple. Pourtant tout va bien dans le monde normal du Mali.
Et, très souvent, le peuple égaré va chercher sa résilience dans la religion. Le mal s’est incrusté dans ce milieu également. Des leaders ont flairé la bonne occasion. Dieu, parle à eux. Et eux, ils endoctrinent, exploitent, dépouillent au nom du divin, les pauvres adeptes. Dieu, le bon, le très miséricordieux devient business, piédestal et même lègue. L’humilité, la modestie, la piété sont prônées, pourtant le luxe criard et l’opulence sautent aux yeux. Des dynasties se bâtissent entourées de courtisans soumis, et qui enfanteront certainement d’autres soumis. Les leaders de chaque courant s’égosillent pour se faire remarquer, les frontières sont souvent dépassées exprès pour faire le buzz. Les gouvernants sont caressés, mais parfois aussi menacés, il faut risquer pour prendre du poids. Eh oui, la religion ne répare plus les hommes, elle s’est mise désormais au service de certains et assujettie d’autres. Voici une autre facette du Mali Kura.
Ce Mali, où l’économie n’est plus une priorité, même si l’impact de son écroulement s’affiche sans détour. Des quémandeurs sont partout, dans les rues, devant les portails des domiciles, certains se sont même professionnalisés, devenant des circonstanciels durables. Il existe aussi des sectoriels, qui évoluent dans les administrations, ou qui visitent les boutiques de luxes, et même il y en a qui sont spécialisés des bureaux de la douane, des impôts etc…Les routes entre les villes sont de nos jours moins sûres rendant les approvisionnements hypothétiques, dans beaucoup de contrées les champs se remplissent de broussailles, ou s’ils sont cultivés se voient partir en fumée. Des pactes sont signés par certains groupes sans l’Etat pour le maintien de leur survie locale.
Le Mali s’affiche en exigeant le respect de sa souveraineté, celui de ses choix stratégiques et celui du choix de ses partenaires. Sachons que la souveraineté ne se réclame pas, elle s’impose à travers des comportements. Et les intérêts d’une nation sont naturels quand on sait bien les négocier. Formons nos jeunes, créons des entreprises, valorisons notre centralité par notre inventivité, et la considération se fera d’elle-même. Le Maliba c’est de savoir s’élever à travers la clairvoyance.
Il faut reconnaître que l’armée a réussi un formidable réarmement moral des troupes depuis quelque temps. Des efforts énormes ont été consentis au niveau du matériel. En ce qui concerne la maîtrise de l’information, du travail reste encore à faire. En outre, les militaires qui gouvernent n’ont pas pu jusqu’à maintenant régler la gestion politique. Des manquements à la liberté individuelle sont également constatés. La planification de la stratégie politique n’est pas clairement établie. La transition n’a pas encore définie de façon limpide sa trajectoire. Des supputations sont balancées par-ci par-là par des experts de tout genre. Cet état de fait désoriente et fragilise parce qu’il augmente le clivage au sein des populations. L’armée est une composante majeure de la population, elle doit contribuer à sa sécurisation sur tous les plans y compris socialement. Elle doit être pour tout le peuple. Surtout, elle doit être neutre et régulatrice. Si elle sort de son rôle d’arbitre, elle peut s’affaiblir. Et une armée affaiblie condamne à coup sûr le pays. Le Mali de Soundiata doit intégrer cette logique.
La parole est en principe libre. Cependant, on constate qu’elle l’est plus pour les supporteurs du régime. Sur les réseaux sociaux on étiquette et on identifie les bons maliens et les mauvais. Des laudateurs martèlent en longueur de journée sur les réseaux sociaux à travers des vidéos dans des studios flambants neufs que la transition n’a pas de défaut. Que le régime doit rester ad vitam æternam. Que la démocratie est notre problème. Le pouvoir ne réagit point à ces assertions. Ne dit-on pas que qui ne dit mot consent ? Pourtant, dans un pays se trouvant dans la situation du Mali actuel, c’est-à-dire ballotté, appauvri, les plans de survie et l’opportunisme ambiant doivent pousser les dirigeants à être de véritables pédagogues. Car les réseaux sociaux sont mille fois plus puissants et plus impactants que la radio mille collines qui a mis en ébullition le Rwanda. La paix dans le Mali kura a besoin d’engagement sincère.
Pour terminer nous pensons que devant l’histoire, le nom et la responsabilité du président Assimi seront les plus mis en exergue. Alors, quels que soient les éléments néfastes ou la difficulté des manœuvres, il doit s’appuyer sur la vérité et se reposer uniquement sur le peuple du Mali. Toutes les autres considérations ne seront que des jeux d’intérêts sordides qui ne pourraient apporter que des ennuis énormes plus tard. Ce pays a besoin de communion et de vision. Les clivages et les éloges futiles n’apporteront que le regret et le nuisible, et quand cela concerne toute une nation la désolation pourrait être incommensurable sur des générations et des générations. Sauvons notre nation, sauvons notre passé et sauvons notre futur. Le Mali doit être mémoire et mesure.
Moussa Sey Diallo
Élu municipal