En ce 21e siècle, on imagine mal que dans certains pays, surtout ceux qui se glorifient comme étant les champions en matière de promotion et de protection des droits et de la dignité humaine, que l’on continue toujours à enregistrer des propos et des prises de position qui frisent le racisme. C’est en tout cas ce qui a cours au pays du Président François Hollande où la « Lepénisation » est en train de gagner les rangs des partis, des hommes politiques et même de la société de l’Hexagone.
La dernière en date remonte au 25 octobre dernier quand la ministre de la Justice s’était rendue, à Angers, l’élue guyanaise a été conspuée par une bande de vilains garnements la comparant à un primate. Tenant une peau de banane, une fillette d’une dizaine d’années, faisant partie d’un groupe d’opposants au mariage homosexuel réunis devant le palais de justice où se trouvait Mme Taubira, à lâché : «C’est à qui cette banane ? C’est pour la guenon».
Comme si cela ne suffisait pas, l’hebdomadaire d’extrême droite Minute a publié, à sa Une, la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, accompagnée du titre aux allusions racistes: «Maligne comme un singe, Taubira retrouve la banane.»
Par cette caricature, l’extrême droite vient d’importer, à visage découvert, une idéologie de l’Amérique ségrégationniste des années 50. Les insultes raciales et les attaques racistes lancées contre Christiane Taubira sont dignes du Ku Klux Klan. Aujourd’hui c’est un lynchage verbal. Demain, ce sera quoi ?
Si ces attaques aux relents racistes ont provoqué l’émoi et l’indignation au sein de classe politique française, l’on ne manque pas de rappeler que cette taubiraphobie primaire est symptomatique d’un mal plus profond qui est en train de gagner ce pays dont le fondement de son pacte républicain est : l’Égalité et la Fraternité.
Mais le hic est que cette référence à la peau noire pour dénigrer à une personnalité politique n’est pas une nouveauté en France.
L’on se rappelle comme si c’était hier, ce 29 janvier2012 quand le maire UMP (parti au pouvoir à l’époque) de Francoville, Francis Delattre, s’en est pris verbalement, lors d’un meeting, à la tête de liste PS d’origine malienne en tenant des paroles «empreintes de préjugés» : «Au début, j’ai cru que c’était un joueur de l’équipe réserve du PSG. Mais en réalité, il est premier secrétaire de la section de Villiers-le-Bel. Ça change tout !» Tels sont, honteusement et malencontreusement, les mots utilisés par ce responsable politique français pour qualifier Ali Soumaré. Plus choquant encore, c’est que ces propos méprisants ont été tenus lors d’un meeting des régionales auquel assistaient les ministres Valérie Pécresse, Rama Yade et le numéro un de l’UMP Xavier Bertrand.
Quid encore en novembre 2006, quand un homme politique, cette fois-ci du PS, avait déclaré à propos de l’équipe de France : «dans cette équipe (de football, NDLR), il y a neuf Blacks sur onze. La normalité serait qu’il y en ait trois ou quatre (…). S’il y en a autant, c’est parce que les Blancs sont nuls (…). Bientôt, il y aura onze Blacks. Quand je vois certaines équipes de foot, ça me fait de la peine.»
Pourquoi la peau noire est-elle devenue une fixation pour certaines catégories de personnes qui ne ratent aucune occasion pour la dévaloriser ? Ont-elles oublié que c’est cette peau noire, qu’elles aiment à dénigrer, qui est aussi, en partie, à la base de la libération de leur chère et tendre France du joug de la domination nazi ? N’est-ce pas cette peau noire qui était en première ligne des combats alors que les peaux blanches, dont elles se glorifient actuellement, se terraient derrière nos ancêtres pour ne pas essuyer les balles ennemies.
L’hebdomadaire d’extrême droite Minute et cette jeune fillette, aux âmes mal éduquées (dont se cachent derrière elle ses parents qui pensent régler leurs comptes), pensent-ils, en ce siècle, qu’ils (peau blanche) ont plus de droits que notre « cousine » Christiane Taubira (peau noire) ? Ou encore croient-ils que ce sont les seules peaux blanches (eux) et non pas le contraire qui peuvent aspirer à une fonction politique ou accéder à une responsabilité comme celle de Garde des Sceaux ?
Il est insupportable et insoutenable que le monde politique français continue aujourd’hui d’être la scène de telles prises de paroles, empreintes de préjugés.
En tout cas, qu’ils soient d’origine racistes, ou visant la condition sociale de Christiane Taubira, ces propos sont empreints de stéréotypes. Ils donnent la garantie à une banalisation des préjugés et à une libération de la parole stigmatisante.
Source: Info-matin