Le bras de fer entre les syndicats de la magistrature et le gouvernement est en phase de prendre un nouveau tournant. Les deux parties s’adonnent à des menaces aboutissant à des révélations désastreuses sur les plus sombres affaires de la République, mais gardées dans le plus grand secret jusqu’à ce jour.
Pour mettre un terme à l’incessante grève entamée par les magistrats depuis mi-juillet pour réclamer une amélioration des conditions de travail, mais aussi et surtout pour la prise en compte de leur sécurité, le gouvernement du Mali a décidé de procéder à des intimidations, à travers la décision de retenue de salaire chez tous les magistrats à partir de ce mois de septembre. Mais cette décision brandie par le ministre de l’Economie et des finances connaît déjà un retour de manivelle puisqu’elle a été l’occasion pour tous les citoyens d’en savoir davantage sur les dossiers noirs de la République, notamment des complots que les institutions ourdissent sur le dos des citoyens.
Suite à cette menace du gouvernement, le Syndicat Autonome de la Magistrature (SAM) et le Syndicat Libre de la Magistrature (SYLIMA) se sont réunis au siège du SAM le lundi 24 septembre 2018. A l’issue de la rencontre, les deux syndicats ont publié un communiqué conjoint à l’effet d’une véritable bombe qui explose, puisqu’il contient, en riposte au gouvernement, une révélation qui fait sourciller tous les citoyens : 3 500 000 000 FCFA se sont évaporés au sein du ministère des Finances, lit-on dans le communiqué. Pareille information ne tarde pas à faire le tour du monde, surtout par la magie de l’Internet. Ce qui donne aussi du grain à moudre aux nombreux activistes qui vont encore cribler de critiques acerbes la gestion des affaires publiques du régime IBK.
Mais où est passé l’argent ? Dans ce communiqué, nous apprenons que « Cette importante somme d’argent a été détournée au profit d’une seule entreprise de la place et dans des conditions scabreuses […] » Pour les Syndicats de la magistrature, une telle somme ne peut pas disparaitre ainsi au sein d’un État et que ce dernier ne soit pas en mesure d’assurer une incidence financière s’élevant à seulement 2 000 000 000 FCFA par an pour près de 600 magistrats. Cette posture de dénonciation que viennent d’adopter les syndicats de magistrats, même si elle arrive un peu sur le tard, ne peut être que bénéfique pour le Mali et pour le monde entier, dans la mesure où elle permettra de découvrir les sales affaires des institutions publiques.
Dans ce sens, nous ne pouvons que souhaiter que cela soit une continuité et que le pouvoir exécutif se prête également à ce jeu, en dévoilant, lui aussi, dans les prochains jours, des affaires sales gardées jalousement par le pouvoir judiciaire, même si, à ce jeu, le grand perdant risque d’être le président de la République et son gouvernement, parc qu’appelés à répondre de tout ce qui sera dévoilé.
En tout cas, les syndicats se disent déterminés à poursuivre avec les révélations si jamais le gouvernement ne détend pas la corde tendue. « Les syndicats de la magistrature encouragent le Gouvernement à poursuivre cette campagne de provocation, tout en se réservant le droit de faire d’autres révélations et même d’entreprendre des actions plus fortes visant le même ministre, voire d’autres membres du Gouvernement de la République, impliqués dans d’autres scandales non moins sulfureux. »
Cette affaire nous rappelle celle du sorcier qui, une fois pris au piège, fait des révélations alarmantes sur les drames qu’il a commis dans le passé. Ce bras de fer entre l’exécutif et la judiciaire aboutissant à ce genre de révélations étale sur la place publique la profondeur de la délinquance financière au sein d’un pays se disant pauvre. Ce qui constitue une honte nationale.
Mais par ailleurs, la justice est aussi en train de prouver qu’elle en sait beaucoup trop sur des délits graves contre la République, mais tarde à agir. En effet, dénoncer ne suffit pas, surtout lorsque cela vient des magistrats qui ne doivent aucunement ancrer dans la tête des citoyens que l’impunité est une réalité au Mali.
Fousseni TOGOLA
Source: Le Pays