Des tirs à balles réelles à des agressions physiques sur des citoyens désarmés, les récriminations ne manquent pas contre le régime d’IBK. Prenant à témoin l’opinion nationale et internationale, plusieurs chefs de partis et candidats à la présidentielle du 29 juillet 2012 ont condamné la répression de la marche du 2 juin 2018, qui visait à réclamer des élections libres et la fin de la censure sur l’ORTM, la télévision publique.
* Mohamed Ali Bathily, candidat APM : «Celui qui aime son pays ne tire pas à balles réelles sur les citoyens à mains nues »
Ibrahim Boubacar Keïta, tu as eu trop peur. Tu n’as pas joué ton rôle d’homme d’Etat. Tirer sur les citoyens à mains nues n’est pas digne d’un homme d’Etat. Utiliser des balles contre tes concitoyens à mains nues alors qu’ils jeûnent, ce n’est pas digne d’un homme d’Etat. Ibrahim Boubacar Keïta, dans le livre qui a été écrit sur lui, a déclaré au sujet des évènements de 1991, que celui qui aime son pays ne fait pas cela. J’ai présenté le livre qui a été écrit sur toi et tu as dit que celui qui aime son pays, celui qui aime ses concitoyens désarmés ne leur tire pas dessus. C’est ce que tu es en train de faire aujourd’hui au Mal.
* Soumaila Cissé, le chef de file de l’opposition : «Il y a eu des tirs à balles réelles sur la foule »
Il y a eu des tirs à balles réelles sur la foule. Nous sommes dans un domicile privé. Il n’y a aucun trouble à l’ordre public, il y a des blessés graves. Il semble que c’est le cortège du Premier ministre qui a tiré à balles réelles, c’est vraiment inacceptable. Que le Premier ministre vienne voir ses propres dégâts. Voilà une des douilles, c’est la preuve devant l’opinion nationale et internationale qu’il y a des violations graves des libertés.
* Aliou Boubacar Diallo, le candidat de l’ADP-Maliba : «La mascarade électorale qu’ils sont en train de préparer ne passera pas ».
Pour moi c’est du déjà vu. La démocratie malienne est née dans des douleurs pareilles. En 1991, ils ont réprimandé la foule de la même manière, mais ça n’a pas empêché le Mali d’accéder à la démocratie. Cette démocratie chèrement acquise, nous allons la défendre. Ce qui s’est passé aujourd’hui est très grave. On nous a agressés au siège de mon parti, alors que nous étions dans la cour. C’est une agression, ils répondront à cette agression. Je ne suis pas seul, je suis avec des dirigeants de partis politiques, des candidats à l’élection présidentielle. Ce qu’ils sont en train de préparer, la mascarade électorale qu’ils sont en train de préparer, ça ne passera pas.
* Mamadou Igor Diarra, candidat indépendant : « Qui a donné l’ordre de tirer? »
Mon premier appel s’adresse d’abord à la communauté internationale qui appuie ce pays depuis la crise de 2012, grâce à laquelle ce pays tient encore. Ce sont de grandes démocraties dans lesquelles, il y a la marche. Le deuxième appel, c’est que dans ce pays, il y a eu un grand procès pour crime de sang. Et la question fondamentale était : qui a donné l’ordre de tirer?
* L’honorable Amadou Thiam, président de l’Adp-Maliba : « Le régime à franchi le rubicon, ils ont décidé de remettre en cause la démocratie qui a été chèrement acquise »
Nous sommes très surpris par l’attitude de ce régime qui a décidé de tirer à balles réelles, qui a décidé de gazer les citoyens paisibles, parce qu’ils ont décidé de marcher tout simplement, comme ils ont fait en centaine de milliers sans casser aucun feu, aucune branche, et réclamer des élections transparentes et crédibles. Cette répression en dit long sur l’intention de ce régime. La marche était faite pour demander la libération de l’Office des radiotélévisions diffusion du Mali (Ortm), pris en otage depuis quelques mois. Il y a plus de 15 blessés dont l’état de certains est assez critique. Je pense que, le président, le régime à franchi le Rubicon. Ils ont décidé de remettre en cause la démocratie qui a été chèrement acquise. Les dégâts matériels sont importants, nous avons été agressés à notre siège. Nous allons nous réunir pour parler des prochaines étapes, ce qui est sûr, on ne s’arrêtera pas. Nous n’allons pas admettre à ce que cette démocratie soit remise en cause.
* Tiébilé Dramé, président du Parena, directeur de campagne du candidat Soumaïla Cissé : « Nous sommes face à un gouvernement irresponsable qui crée des troubles »
Nous avons dit que la mesure d’interdiction est un abus de pouvoir, c’est une provocation et c’est un trouble à l’ordre public. Nous sommes une opposition responsable, nous avons rassemblé des centaines de milliers de personnes qui sont sortis sans aucun incident, sans une ampoule cassée parce que nous avons conscience de l’état de notre pays, nous sommes sérieux et nous sommes responsables. Nous sommes face à un gouvernement irresponsable qui crée des troubles, Dieu seul sait pourquoi. La mesure d’interdiction de la manifestation procède d’arrière pensée électorale. Ils veulent créer des troubles pour qu’on n’aille pas aux élections.
Le droit de manifestation est un droit constitutionnel au Mali qui n’est pas soumis à autorisation, c’est une conquête démocratique depuis 1991. Nous avons un gouvernement qui porte atteinte aux acquis de la démocratie, aux acquis de la révolution de 1991. Les forces démocratiques de ce pays n’acceptent pas les atteintes aux droits démocratiques, à la constitution. Ils ont interdit cette manifestation, c’est pourquoi tôt ce matin (samedi 2 juin), ils ont démonté le podium pour porter atteinte aux droits de réunion, aux droits de manifestation pacifique, c’est pourquoi, ils ont commencé à matraquer. J’arrive de l’urgence de l’hôpital Gabriel Touré où deux principaux leaders du Mouvement sont là. L’un, Etienne Fakaba Sissoko a perdu connaissance à la suite d’un matraquage sans nom à la bourse du travail ce matin (samedi 2 juin).
L’autre, Mme Wadidiè Founè Coulibaly qui est une jeune femme leader qui joue un rôle de premier plan dans le mouvement qui a été également frappée comme on ne peut pas l’imaginer. Ils sont tous aujourd’hui aux urgences à l’hôpital Gabriel Touré. Etienne a repris connaissance fort heureusement, n’empêche, il est dans une civière à même le sol aux urgences de Gabriel Touré, en attendant les examens complémentaires. Vous voyez comment est le gouvernement de ce pays, vous voyez comment il se comporte vis-à-vis de la jeunesse de ce pays, vis-à-vis des femmes de ce pays, vis-à-vis des forces démocratiques. Ils ont peur du peuple, ils ont peur de la mobilisation d’aujourd’hui, ils ont voulu l’interdire et vous voyez, vous n’avez pas fini de voir encore, le peuple de Bamako sortira massivement.
Les objectifs de cette manifestations sont les suivants : que la présidentielle à venir ne soit pas bâclée, contre la fraude électorale programmée, deuxièmement, c’est pour libérer la radio et la télévision publique. La façon dont ce pouvoir procède vis-à-vis de la radio et de la télévision publique est une façon honteuse. Et vous avez vu le président de la République, il y a quelques jours, faisant sa déclaration de candidature à l’élection présidentielle, convoque la radio et la télévision publique à son domicile privé et pendant 15 minutes, dans le journal télévisé, parle aux Maliens. Par la suite ce discours a été traduit dans toutes les langues nationales, et diffusé la même nuit. Quant il y a les activités de l’opposition, le ministre Bathily à coté, Soumaïla Cissé et d’autres, ces activités sont survolées en 2 minutes.
Il y a un traitement inéquitable, injuste, inacceptable que l’Ortm fait. Il est important de libérer l’Ortm, de la colonisation dont cet office fait l’objet aujourd’hui. Bien entendu, nous faisons tout cela, parce que nous voulons l’alternance, nous voulons envoyer un message très fort à ce pays pour dire que le président sortant ne peut pas gagner au premier tour comme ils le prétendent, c’est impossible qu’il gagne au premier tour. En 2013, il avait le soutien de la junte de Kati, il avait le soutien des milieux religieux, il n’a pas pu gagner au premier tour, il avait un ami à l’Elysée, il n’a pas pu gagner au premier tour, il a eu 39%. Et 5 ans après, il a un bilan catastrophique. Ça été un immense gâchis.
La situation malienne est pire qu’en 2013 de tous les points de vue, je ne vous parle pas de la corruption qui a atteint un sommet jamais égalé au Mali, l’insécurité qui s’est répandue du nord au centre jusqu’au porte de Ségou. Le président a été lâché par presque tout le monde. Ses principaux soutiens politiques l’ont lâché. Vous avez une dizaine de ministres, de premier ministre, de directeur généraux qui se présente contre lui, qui se sont rendus compte qu’il n’a pas été à la hauteur, qu’il a déçu le peuple malien. Je ne vois pas comment un candidat, avec un bilan catastrophique, avec le feu au centre, avec le nord non stabilisé, peut gagner au premier tour. Mathématiquement, c’est impossible.
La manif aujourd’hui est une mise en garde pour que le président ne soit pas tenté de proclamer au soir du 29 juillet qu’il a gagné avec un score de 51,01%, ça serait faut et ça serait inacceptable, donc, aujourd’hui, le peuple sort aujourd’hui massivement pour dire attention, il faut des élections régulières et transparentes. Et puis il y a la quasi guerre civile au centre. Les initiatives du président ont envenimé la situation au centre, les initiatives du premier ministre ont envenimé la situation au centre. La situation est grave.
Propos recueillis par Aguibou Sogodogo & Soumaïla T Diarra
Source: Le Républicain