Le temps des vacances pour la communauté éducative est terminé. Le ministère de l’Éducation nationale annonce pour le 1er octobre la date de la rentrée scolaire 2018 – 2019. Les défis du relèvement du niveau des élèves par la formation et la réouverture des classes dans les régions du nord et du centre seront au cœur de l’action gouvernementale. La combinaison de tous les ordres d’enseignement au sein d’un seul département obéit-elle à cette volonté ?
« Le 1er octobre, c’est le jour de la rentrée ». Ils sont rares ceux qui n’ont pas lu ou entendu cette phrase au primaire. Même si l’époque de « Ada, René ou Kipic » est révolue, la rentrée scolaire d’octobre est ancrée dans la conscience collective du monde éducatif. « L’ouverture de toutes les écoles est programmée pour le 1er octobre. Après, nous allons faire le point pour savoir là où nous n’avons pas pu ouvrir », dit Mamadou Kanté, Directeur national adjoint de l’Enseignement fondamental. Des parents aux élèves, du personnel enseignant à l’administration scolaire, c’est toute la communauté éducative qui se mobilise pour cette période cruciale. Sur les visages se lit l’enthousiasme et la joie de renouer avec ce milieu de socialisation. Du préscolaire au fondamental et jusqu’au secondaire, l’envie de reprendre le chemin de l’école est perceptible, après plusieurs mois de repos et de détente.
Pour l’enseignement secondaire général, seules les classes de 10ème accuseront du retard. « Elles vont attendre peut-être deux semaines, car les orientations ne sont pas encore faites. La répartition n’est pas facile, vu le nombre d’admis au DEF cette année », souligne Djiguiba Konaté, Directeur national de l’Enseignement secondaire général. « On a envoyé des équipes de certification sur le terrain pour recenser les établissements qui seront en mesure de recevoir les enfants ». Dans la nouvelle grille de recommandation, les établissements privés sont invités à inscrire le tiers de leurs professeurs à l’INPS, faute de quoi ils ne recevront pas les enfants orientés par l’État.
Ce qui change
Toujours est-il que l’apprenant doit acquérir au niveau de chaque ordre d’enseignement des compétences lui permettant de s’insérer dans la vie active ou de poursuivre ses études. Si l’objectif énoncé dans la Loi d’orientation sur l’Éducation de 1999 est constant, les avancées et les circonstances diffèrent à chaque rentrée.
La rentrée 2018 – 2019 poursuit la même ambition de l’État d’éduquer le maximum d’enfant pour relever les défis du développement de notre pays. Pour ce faire, tous les ordres d’enseignement sont sous la tutelle du ministre de l’Éducation nationale, le Professeur Abinou Temé. Un choix inédit dans la gestion du système, qui s’explique par souci de souplesse. « La nouveauté cette année est d’avoir un seul ministère, qui gère l’éducation du niveau préscolaire, fondamental et secondaire jusqu’au supérieur. Nous reconnaissons quand même que la charge est très lourde, mais cela créera une coordination entre les différents ordres d’enseignement et permettra d’aplanir beaucoup des difficultés », soutient Mamadou Kanté, Directeur national adjoint de l’enseignement fondamental. En cette veille de rentrée, c’est un ballet incessant dans les locaux du ministère. Son Secrétaire général, Kinane Ag Gadeda, mesure la tâche énorme du moment et justifie la création du département. « C’est un choix politique d’abord qui vise à ramener tout le système éducatif dans un seul espace, afin de mieux appréhender les différentes passerelles, les différentes politiques éducatives, et de mieux organiser le secteur, de telle sorte que les objectifs qui lui sont assignés soient atteints de façon efficace », commente-t-il. Pour l’heure, le système d’enseignement – apprentissage dans les écoles continue. Selon toujours le Secrétaire général, le curriculum de l’enseignement normal pour les enseignants a été finalisé cette année, alors ceux des écoles fondamentales et pour l’approche par compétences dans les écoles secondaires sont en cours. « Ce sont des démarches pédagogiques qui ont montré toutes leurs forces si elles sont bien appliquées. Et il n’y a pas de raison de changer ce qui marche », souligne Kinane Ag Gadeda.
Rentrée amère au centre et au nord
Les conséquences de la crise de 2012 se font encore sentir dans le secteur de l’éducation et de l’enseignement. Dans le nord et le centre du pays, environ 750 écoles sont restées fermées pendant l’année académique 2017 – 2018. Selon le Directeur adjoint de l’enseignement fondamental, Mamadou Kanté, la situation s’est détériorée au fil des années. « En avril 2018 nous en étions à 750 écoles fermées, mais en mai de la même année leur nombre s’est réduit à 735 », explique-t-il, espérant une réouverture accrue des écoles. Selon l’Unicef, plus de deux millions d’enfants en âge scolaire cette année sont en dehors du système éducatif. Si au centre du pays, certaines classes sont fermées depuis quatre ans, au nord c’est depuis le début de la crise. Alors que l’éducation est un droit pour tous les enfants de la Nation, des milliers d’entre eux continuent d’errer sans aucune possibilité d’en profiter. Ils se forgent chaque jour un destin qui n’est point le leur dans des zones où la peur et les dangers règnent au quotidien.
Interpellées, les autorités entendent prendre des mesures urgentes pour amoindrir les effets de la situation. « Le gouvernement, sous l’impulsion du Premier ministre, est en train de mettre en place un programme d’urgence pour la réouverture des écoles. Pour réussir, il se propose de faire fonctionner les services sociaux de bases : l’éducation, la santé, l’action humanitaire », révèle Mamadou Kanté. Trois départements, la Solidarité et l’action humanitaire, la Santé et l’hygiène publique et l’Éducation nationale se coordonnent à cet effet et ont identifié « des actions et stratégies pour que le plus grand nombre d’écoles soient ouvertes le 1er octobre et le restent dans un avenir proche », indique le Secrétaire général Kinane Ag Gadeda.
Menaces de grèves
En cette veille de rentrée, certains syndicats d’enseignants menacent d’aller en grève à cause de doléances insatisfaites. A Gao, le collectif des enseignants de la région a déposé un préavis pour les 1er et le 2 octobre 2018. Abdel Aziz Ibrahim Maiga, Secrétaire général du Syndicat national des enseignants fonctionnaires des collectivités territoriales (SYNEFCT) en explique les raisons. « Le retour des services financiers, toujours à Bamako depuis 2012, le non-respect de l’accord signé le 22 mai 2017 entre le ministère de l’Éducation et nous, la sécurité des enseignants, entre autres », énumère-t-il. Au même moment, dans la région des Kayes, une autre grève de trois jours est prévue. Mais le Secrétaire général de l’Éducation nationale affirme que « toutes les dispositions seront prises pour que les acteurs s’entendent et que la rentrée ne soit pas compromise ». De même, le Directeur national de l’enseignement secondaire général invite chacun « à la sagesse et à l’esprit patriotique ».
Quid du niveau ?
Malgré les différents efforts entrepris dans le domaine de l’éducation et de la formation, le niveau des élèves et étudiants maliens n’enchante plus. Dans cette descente, la responsabilité de tous les acteurs de l’école semble être engagée. Les élèves peinent à être performants en lecture, écriture et calcul, les fondamentaux. Pourtant, « le Mali a toujours été le Quartier latin de l’Afrique francophone », se souvient Djiguiba Konaté, Directeur national de l’Enseignement secondaire général, indiquant que le souci du gouvernement est de cultiver l’excellence. Pour Kinane Ag Gadeda, les problèmes sont connus et il suffit de mettre en œuvre les solutions adéquates. Il cite par exemple la mise en place, depuis quatre ans, de l’approche équilibrée, concernant 4 500 écoles des régions de Ségou, Bamako et Koulikoro, avec des résultats satisfaisants. « On peut combler ce déficit et faire en sorte que notre système produise des enfants qui savent lire, écrire et calculer et sont capables d’améliorer leurs compétences », en misant sur les enseignants.
La rentrée scolaire de cette année, même si elle est fort similaire à la précédente, est très attendue. Le challenge est que tous les acteurs convergent vers le même but pour redonner à notre système éducatif ses lettres de noblesse d’antan.
Source: journaldumali