«L’état des lieux de l’armée du Mali et Stratégie de Défense et de Sécurité du pays et Stratégie de Défense et de Sécurité du pays». C’est le thème d’une conférence-débats animée samedi 17 janvier à la Pyramide du Souvenir par le général Mamadou Doucouré. Organisée par l’Association Alliance pour la Démocratie au Mali (Adéma-association), sous l’égide de sa présidente Mme Sy Kadiatou Sow, cette conférence-débats a enregistré la présence d’éminentes personnalités dont l’ex-président de la Transition, Dioncounda Traoré et son épouse, des généraux à la retraite, d’anciens ministres ; du représentant spécial de la Cédéao au Mali, Cheaka Abdou Touré ; d’hommes politiques dont le président du Parena, Tiébilé… la modération étant assurée par l’ex-président de l’Assemblée nationale, Aly Nouhoum Diallo.
À la veille du 20 janvier, fête de l’Armée du Mali, l’Association Alliance pour la démocratie au Mali (Adéma-Association) a jugé utile de s’attaquer à une question épineuse qui gangrène notre République : la déliquescence de notre Armée nationale eu égard à son incapacité actuelle à faire face au cycle infernal de la rébellion au Nord du pays et aux attaques à répétitions ces derniers temps des terroristes et jihadistes.
Faisant un diagnostic sans complaisance de la situation qui prévaut actuellement au sein de la Grande muette, l’Adéma-Association, toujours à l’avant-garde des idéaux de notre Nation que sont la laïcité, l’unicité, l’intégrité territoriale, la paix et la cohésion sociale, propose une batterie de solutions en vue de la réforme et de la refonte de notre Armée nationale afin qu’elle joue pleinement son rôle.
Selon le conférencier, au cours de ces dernières années, l’armée malienne a fait davantage parler d’elle pour son implication dans le coup d’État du 21 mars que pour sa capacité à reprendre le Nord. Peut-elle aujourd’hui se ressaisir ? Selon lui, après avoir renversé, le 21 mars, un président démocratiquement élu quelques jours avant la fin de son deuxième et ultime mandat, l’armée malienne n’en finit pas de se singulariser.
Mise en déroute dans l’immensité saharienne, elle semble pour l’instant incapable de reprendre l’offensive pour restaurer l’intégrité et l’unité territoriale. De janvier à mars, les Touaregs du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (Mnla), composé alors de 600 hommes, ont dans un premier temps avancé sans entraves.
Et aujourd’hui, les «assaillants» -composés également du mouvement islamiste Ansar Eddine et d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) – contrôlent les trois grandes régions du Nord : Tombouctou, Kidal et Gao. Grâce au pillage des arsenaux libyens et à une meilleure connaissance du terrain, rebelles et jihadistes disposent à présent d’une puissance de feu supérieure à celle des loyalistes, empêtrés dans l’imbroglio politico-tragique de Bamako.
La chute de Kadhafi, ce déséquilibre sur le terrain et la chronique bamakoise n’expliquent pas à eux seuls cette «défaite éclair». Comment une institution considérée au début des années 1990 comme l’une des plus puissantes en Afrique subsaharienne a-t-elle pu subir une telle débâcle ?
Pour les uns, il n’y a pas de doute. En rompant brutalement la chaîne de commandement, les officiers subalternes du 21 mars, dirigés par le capitaine Amadou Haya Sanogo, sont les premiers responsables de cette «humiliation suprême». En s’en prenant au chef des armées, le président Amadou Toumani Touré, les putschistes seraient les fossoyeurs de la Grande Muette.
En exacerbant les fractures entre un état-major déconnecté des casernes et accusé de corruption et la troupe envoyée au casse-pipe face aux rebelles, ils auraient fini de semer le désordre. La «guerre des bérets», le 30 avril, entre les commandos-parachutistes dirigés par le lieutenant-colonel Abidine Guindo, resté fidèle à ATT, et les éléments de l’armée de terre régnant en maître au camp de Kati a de ce point de vue révélé au grand jour ce profond malaise.
Soulevant la méfiance du nouveau pouvoir politique, l’armée a été progressivement dévitalisée. Le népotisme et la corruption, jadis phénomènes proscrits dans les casernes et mess d’officiers, ont atteint le commandement. «Le coup de grâce a été donné avec le pacte de paix avec la rébellion touarègue, en avril 1992.
L’une des dispositions de l’accord prévoyait l’intégration des combattants rebelles dans l’armée, le plus souvent comme officiers. L’ennemi d’hier est devenu frère d’armes sans que la confiance soit totalement restaurée. Cette situation a fortement dégradé l’image de la hiérarchie aux yeux de la troupe», explique le général Doucouré.
Par ailleurs, entre autres solutions, le conférencier a mis un accent particulier sur l’avant-projet de politique de défense et de sécurité nationale qui a pour ambition d’envisager un cadre d’ensemble dont il définit les objectifs. Il se décline en Concept d’Emploi des Forces (CEF) et en Lois d’Orientation et de Programmation Militaire (LOPM). Dans ce cadre, révèle-t-il, il a été décidé d’approfondir le projet de Politique de Défense et de Sécurité nationale en l’élargissant particulièrement en ce qui touche les dimensions non militaires.
Quant à l’avant-projet de loi d’Orientation et de Programmation Militaire (LOPM) 2015-2019, c’est un programme qui s’étend sur 5 ans et qui doit permettre aux forces armées maliennes d’acquérir des capacités leur permettent d’exécuter leurs missions. C’est ainsi que le programme doit permettre d’arriver à terme à des objectifs spécifiques. Ceux-ci vont de l’amélioration de la capacité opérationnelle des unités combattantes au soutien logistique et à l’appui à la mobilité et contre mobilité en passant par l’amélioration du cadre de vie et de travail du personnel et du commandement.
L’adoption de cette réforme est d’autant plus opportune qu’elle interviendra à un moment où le Mali sort d’une des crises les plus difficiles de son histoire contemporaine et qui a montré à bien des égards les difficultés et les insuffisances de son armée.
Nul doute que cette réforme marquera le renouveau de la Grande muette avec une nouvelle carte d’identité et une nouvelle cartographie en vue de tenir tête aux menaces multiformes comme le terrorisme transnational.
Bruno E. LOMA
Source: Le Reporter