Noyé dans un centre commercial bruyant et de plus en plus insalubre, il était loisible de constater que l’Institut National des Arts (INA) de Bamako ne répondait plus aux normes pédagogiques de l’apprentissage. Sans compter que le bâtiment ne répondait plus non plus aux normes sécuritaires à cause de sa vétusté.
Fallait-il alors fermer les yeux pour investir des milliards pour rénover le bâtiment dans un environnement inadapté à la formation de qualité et de référence qui avait jusque-là fait la fierté de cet établissement ? L’ancien ministre de la Culture, Mme N’Diaye Ramatoullaye Diallo a plutôt préféré demander au gouvernement un nouveau site convenable afin d’y implanter le nouvel INA dans un joyau avec tout le confort indispensable à un meilleur apprentissage. C’est ce choix qu’on peut lui reprocher peut-être, mais pas la vente de l’ancien site de l’établissement.
Qui a vendu ou bradé l’immeuble historique de l’Institut National des Arts (INA) de Bamako ? La question taraude sans doute les esprits depuis la révélation faite par l’actuel ministre de la Culture, des Arts et du Tourisme. Et certains sont aujourd’hui tentés de chercher des poux sur la tête de son prédécesseur tout en sachant que la vente des biens de l’Etat répond à un protocole clairement défini et qui ne relève que du Département des domaines de l’Etat. La faute de Mme N’Diaye Ramatoullaye Diallo serait-elle alors d’abord une vision et la volonté politique d’offrir aux futurs étudiants des conditions idoines à l’apprentissage en délocalisant l’INA ?
En femme politique de vision, Mme N’Diaye Ramatoullaye a opté pour cette délocalisation, autour d’un projet futuriste, novateur, parce que l’INA actuel ne répond plus aux normes pédagogiques et sécuritaires. Ne serait-ce que parce que l’Institut est noyé ces dernières années par un Grand Marché, donc dans le bruit, la pollution et l’insalubrité chronique. C’est ainsi que courant 2020, une Convention de partenariat a été signée entre le gouvernement du Mali et un entrepreneur malien pour la construction de l’Institut national des arts (INA) sur un nouveau site situé sur la route de l’aéroport international «Modibo Kéita» avec toutes les commodités requises pour redonner à l’établissement sa splendeur d’antan. L’ancien INA, ne devrait être la propriété d’un nouvel acquéreur qu’après la remise officielle des clés des nouvelles infrastructures, en contre partie des coûts de réalisation estimés à des milliards de F CFA, sur la base d’une expertise des services techniques nationaux.
La construction de nouveaux bâtiments pour l’Ina dans la zone aéroportuaire découle d’une seule logique : l’actuel INA, vieux de 91 ans, est vétuste avec des murs crasseux et ne respecte plus aucune norme académique, sanitaire et sécuritaire. «Les élèves ne parviennent plus à se concentrer en classe, les enseignants sont démotivés à cause de la promiscuité et des nuisances sonores et autres du Grand marché qu’il jouxte», ont indiqué de nombreux témoignage.
Ces constats alarmants ont motivé les autorités de l’époque à le délocaliser sur un site encore vierge pour l’épanouissement des élèves et de leurs professeurs. Et cela à l’image du Conservatoire Balla Fasséké Kouyaté, logé au flanc de la colline du Point G.
La Convention de Partenariat public-privé (PPP) a été ainsi signée entre les ministres de l’Urbanisme ; des Domaines de l’Etat ; et de la Culture sous la supervision du Premier ministre. Le ministère de la Culture n’a rien à voir avec la vente des domaines de l’Etat. Et même la direction de l’INA, qui y a apposé son sceau, est partie prenante du processus de signature de la convention et de l’approbation du plan. Nulle part il n’est question dans le document de vente ou de cession de l’INA. Aucun prix de vente n’est dégagé si ce n’est le coût de l’expertise évalué à plusieurs milliards de F CFA.
Ainsi, le promoteur devait réaliser les travaux à ses propres frais, sur la base de l’expertise conçue par les techniciens de la Direction nationale de l’urbanisme. En retour, il prend possession de l’ancien site après la réception définitive des nouveaux bâtiments. «L’expertise, les plans d’urbanisme, le choix du terrain et du site ont été réalisés sous la responsabilité de la direction nationale de l’urbanisme, qui en est le maître d’ouvrage», nous indique une source proche du dossier.
Il a juste exprimé le besoin d’avoir un bâtiment de dernière génération pour le confort des étudiants. Conformément à la Convention, le nouvel INA devait être bâti sur 3 hectares et a été conçu comme l’une des infrastructures scolaires ultramodernes du pays. Les travaux sont supervisés sur place par des techniciens de l’urbanisme et l’ingénieur en génie civil, le Turc Kaoroba Mahrumi, directeur du Consortium malien de construction (CMC).
Les travaux qui sont exécutés à hauteur de souhait (à 40 % il y a peu de temps) avançaient normalement. Sur le plan de construction, le style architectural allie modernisme et tradition, avec un goût prononcé de l’architecture Soudano-sahélien, à l’image de l’actuel INA.
«Nous travaillons sur la base des besoins exprimés par la direction de l’école en terme de conforts académiques», a assuré aux officiels l’ingénieur en chef, M. Mahrum, lors d’une visite du chantier. A ses dires, il y a deux blocs : le bloc A construit sur 400 m2 en R+2, est conçu pour abriter l’administration avec des salles de spectacles de 200 places et d’exposition à l’étage. Le bloc B en R+1 bâti sur 1 800 m2, va abriter les salles de classe et ateliers. En plus, le projet prévoit des terrains de sports (football, basket, volley, etc.), des parkings, espaces verts…
Les besoins en électricité seront assurés par un branchement en moyenne tension de l’EDM, relayé par un groupe électrogène de 400 KVa. Au vu de la convention, qui n’offre aucune autre garantie au repreneur que le droit à la propriété de l’ex-Ina à la fin des présents travaux, cet acte doit être salué à sa juste valeur. Selon, des experts, l’Etat est le principal gagnant dans ce partenariat public-privé avec à sa possession les clés d’une infrastructure académique aux normes internationales.
Comme on le constate, si on a quelque chose à reprocher à l’ancien ministre de la Culture, c’est sans doute cette noble vision d’offrir de meilleures conditions d’études aux futurs étudiants de l’INA dans un cadre sain et sécurisé. De toute façon, les bradeurs de l’économie nationale et des immeubles de l’Etat sont bien connus de presque tous !
Dan Fodio
Source: Le Matin