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PR. Clément Dembélé sur la première année d’exercice de pouvoir d’IBK : “IBK ne peut plus gérer ce pays et relever les défis tant qu’il ne s’attaque pas à l’impunité et à la corruption “

4 septembre 2018-4 septembre 2019, nous voilà à un an d’exercice de pouvoir du président IBK. Pour cerner le bilan de cette première année du 2ème et dernier mandat, le Professeur Clément Dembélé a accordé une interview à notre organe pour parler des acquis, les manquements et les défis à relever. Lisez…

Mali tribune : Nous sommes à un an d’exercice de pouvoir par IBK, que peut-on garder de ce bilan ?

C. D. : Ce qu’on peut prendre d’abord positivement de ce bilan c’est l’expression de la volonté d’amorcer la crise postélectorale par la mise en place d’un gouvernement de large ouverture géré par Dr. Boubou Cissé. Ce qui a permis à une partie de l’opposition de se retrouver dans le gouvernement. Cette stratégie a permis à IBK de souffler, d’amoindrir les atrocités et les animosités. Je parle ici du cas de Tiébilen Dramé qui a eu le ministère des Affaires étrangères, qui peut surprendre tout le monde. On sait que juste après les élections, Ibrahim Boubacar Keita n’était pas reconnu. C’était le président avec qui il ne fallait jamais travailler. Tiébilen avait été traité par IBK de petit monsieur”. Aujourd’hui on le voit dans le gouvernement d’IBK comme un des ministres régaliens. Ce qui montre qu’IBK est un homme politique averti, un très bon stratège. Qu’il faut reconnaitre. Qui est même capable à un moment, de donner une part à ses ennemis afin de les faire taire. Cela est quelque chose de positive pour deux choses, cela a permis de calmer le jeu, en tout cas provisoirement et aussi de permettre à une bonne partie des Maliens de découvrir le vrai visage de certains politiciens qui confondent l’art alimentaire à la conviction politique. IBK joue ce grand rôle aujourd’hui qu’il faut reconnaitre. Ce qui a marché aussi, c’est une prise de conscience aujourd’hui. Il faut reconnaitre qu’IBK permet cette liberté d’expression. On peut se permettre de dire beaucoup de choses. Aujourd’hui il ya moins d’arrestation de journaliste moins d’arrestation d’hommes politiques, il y’en a presque pas. Aujourd’hui même s’il n’ya pas de liberté de mouvement parce qu’il ne reste que Bamako, on a quand même la liberté d’expression.

 

Mali Tribune : En dehors de ces éléments, qu’est ce qu’IBK a apporté d’autres, voire sur le plan économique ? On dit que notre indice de croissance est de 6 points aujourd’hui. Qu’en dites-vous ?

C. D. : En dehors de ces éléments ce qu’IBK a apporté au peuple malien ? Rien du tout. Notre indice de croissance est de 6 points ne veut rien dire. Parce que l’indice de croissance repose sur l’indicateur de mesure économique d’un certain nombre de secteurs économiques que le Mali ne gère même pas. Je dis par exemple, la téléphonie, les banques et les cas des mines. Si on dit que le Mali a fait une croissance de 6 points cela ne veut rien dire. Parce qu’il suffit de regarder dans le panier de la ménagère pour se rendre compte que le rapport est dans le paradoxe. Si le Mali avance dans la croissance économique, le paradoxe est que quand on regarde le rapport de l’Office des produits alimentaires du Mali (Opam), il y’a une famille sur 3 qui ne mange pas 3 fois par jour depuis juin 2011. Il y’a 43 % de jeunes maliens selon les chiffres de l’Office français de l’immigration, qui sont candidats à l’immigration par manque d’emploi.

 

Mali Tribune : Quels sont défis qui restent à relever pour les quatre années restantes d’IBK ?

C.D. : Le problème du Mali c’est le chômage des jeunes. C’est la mauvaise gestion démographique, la mobilité sociale et économique. La décentralisation a été mal faite. Surtout sur le plan sécuritaire, il faut une nouvelle doctrine sécurité basée sur les renseignements, la communication et des bonnes stratégies de relation communicationnelle et de proximité. Il faut développer le Mali en arrêtant de voler. Il faut un vrai homme d’Etat. Il y a 250 milliards de F CFA de détournés chaque année au Mali dans l’impunité totale. En 2014, c’était l’année de la lutte contre la corruption au Mali. L’année da la lutte contre la corruption a battu le record de la corruption au Mali. IBK ne peut plus gérer ce pays et relever les défis tant qu’il ne s’attaque pas à l’impunité et à la corruption. Et IBK est le dernier homme politique des 26 marsiens. Après lui, il n’y aura plus de chef d’Etat malien qui viendra de cette génération si on veut la survie du Mali.

 

Mali Tribune : La crise au centre a beaucoup marqué ce premier an d’IBK, qu’avez-vous à dire sur cette crise qui a fait tant de morts au centre ?

C. D. : L’impunité et la corruption sont au cœur même de l’enjeu du centre du Mali. C’est parce qu’un moment il y a eu une justice corrompue, des forces de l’ordre et de sécurité corrompues. Tout ce qui incarnait l’autorité de l’Etat était corrompu. Donc la corruption a donné naissance à l’injustice à tel point qu’Amadou Kouffa s’est levé pour renvoyer les gens dans ce sentiment de protection au nom de l’islam en appliquant la charia et les gens l’ont suivi. Et malheureusement, ce dernier est peulh. Et dans la confusion, l’Etat malien a privatisé, vendu et bradé la sécurité n’étant pas capable de faire face à Amadou Kouffa, il a créé des milices en donnant des récépissés. On n’a jamais vu des chasseurs avec AK-47, des Kalachnikovs et des grenades. D’où viennent ces armes militaires détenues par ces milices ? Parce qu’on a voulu contrebalancer, on a armé d’un côté. Et comme cela ne va pas, puisqu’on veut alimenter, il y a quelques généraux de hauts gradés qui se sont mêlés, qui ont trouvé un créneau commercial dans tout cela. Et quand il n’ y a pas de tueries, ils vont tuer eux-mêmes pour justifier des fonds et continuer à voler et à détourner. Il faut savoir aussi, le conflit au centre n’est pas un problème militaire, c’est un problème sécuritaire. Il relève du ministère de la sécurité. C’est un problème de guerre asymétrique.

 

Mali Tribune : Aujourd’hui, l’un des grands espoirs pour le Mali demeure le Dialogue politique inclusif, que pensez-vous de ce Dialogue et que préconisez-vous ?

C.D : Si aujourd’hui le souci d’IBK, est de ramener le Malien dans une sorte de schizophrénie politique appelée Dialogue politique, moi je vous dis que depuis 1236, nous dialoguons au Mali. Le problème du Mali n’est pas dans le dialogue. Avant de dialoguer, il faut d’abord appliquer l’existant. Les dialogues qui ont eu lieu déjà, il y a eu des accords et des recommandations. Rien n’est appliqué d’abord, on veut encore rajouter un nouveau dialogue en changeant juste de terminologie. Est-ce que c’est cela la solution ? Il y a l’impunité et la corruption dans ce pays. Et IBK n’arrive pas à relever ces défis.

Le Dialogue politique inclusif, cela montre à quel point IBK a tiré leçon du mouvement  “An Tè A bana.  Il a tiré leçon des résistances populaires. Et aujourd’hui, il doit d’abord commencer à dépêcher les acteurs qui pouvaient être résistants. Je parle du ministre Amadou Thiam, Tiébélin Dramé des Affaires étrangères, Kadidia Fofana Chargée de Mission,  Aboubacar Yacoub Doucouré Chargée de Mission aussi. Cela  démontre à quel point IBK a cette volonté d’apaiser, peut être pas sincèrement, mais en tout apaiser en voulant partager. La large ouverture aujourd’hui démontre tout son sens, le large partage.

Entretien réalisé par

Koureichy Cissé

 

Source: Mali Tribune

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