Ce qui aurait pu marquer un tournant décisif dans la stabilité du secteur minier malien s’enlise aujourd’hui dans une crise aux ramifications économiques, juridiques et humaines. Dans un communiqué publié le 15 avril, le géant minier Barrick Gold Corporation, opérateur de la prestigieuse mine de Loulo-Gounkoto, accuse l’État malien de bloquer, délibérément, un accord déjà négocié et validé par le ministère de l’Économie et des Finances depuis février dernier.
En toile de fond, un protocole d’accord prêt à être signé, qui aurait permis de solder plusieurs litiges en suspens entre les deux parties. Barrick affirme avoir fait preuve de bonne foi, allant jusqu’à verser 85 millions de dollars américains dans le cadre d’un processus engagé depuis octobre 2024.
Pourtant, l’accord peine à se concrétiser, et le climat de confiance se dégrade de jour en jour. Selon la multinationale canadienne, les relations ont brutalement empiré après l’arrestation jugée arbitraire de plusieurs de ses employés maliens, toujours en détention. En parallèle, le gouvernement a suspendu les exportations d’or et fermé les bureaux de Barrick à Bamako, menaçant même de placer la mine sous administration provisoire. Une décision que la société juge contradictoire, rappelant qu’il est exigé d’elle le paiement d’impôts sur des revenus qu’elle n’a pas été autorisée à générer, en raison du blocus imposé sur ses exportations. Une position jugée intenable par l’entreprise, qui souligne avoir continué à remplir ses obligations : salaires, soutien aux sous-traitants, et maintien des chaînes d’approvisionnement.
Dans son communiqué daté du 15 avril dernier, Barrick pointe du doigt « un groupe d’acteurs » au sein de l’administration, qui ferait obstacle à la signature de l’accord pour des raisons personnelles ou politiques, au détriment, selon elle, de l’intérêt national. La compagnie rappelle que la mine de Loulo-Gounkoto est un actif stratégique pour le Mali, contribuant significativement au budget national via les redevances et les impôts.
Vers un arbitrage international ?
Face à l’impasse actuelle, Barrick envisage sérieusement de recourir à l’arbitrage international. L’entreprise affirme vouloir toujours privilégier une solution négociée, mais se dit prête à user de tous les moyens juridiques disponibles pour défendre ses droits et obtenir la libération de ses employés.
Au-delà du différend commercial, c’est toute une économie qui vacille. Le blocage des exportations d’or prive l’État de précieuses ressources, tandis que les tensions autour d’un acteur majeur du secteur minier pourraient saper la confiance des investisseurs étrangers dans le climat des affaires malien. Dans ce contexte, Barrick appelle les autorités à agir rapidement dans l’intérêt du peuple malien, en finalisant l’accord déjà prêt à être mis en œuvre.
Adama Coulibaly