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Porte-parole du CNSP à propos des sanctions de la CEDEAO: ‘‘ c’est une ingérence’’

Dans un entretien accordé à nos confrères de TV5-Monde, ce mercredi 26 août 2020, le porte-parole du Comité national pour le salut du peuple (CNSP), le Colonel major Ismaël WAGUE, parle de la durée de la transition politique en gestation dans notre pays. Il a aussi évoqué, la question sécuritaire ainsi que la libération du Chef de file de l’opposition malienne. Dans ses propos, il estime que les sanctions de la CEDEAO contre le Mali constituent une ingérence dans les affaires intérieures de notre pays.

« On a suggéré que les trois ans du mandat restant [du président déchu Ibrahim Boubacar Keïta] pourraient être mis à contribution pour mettre en place la transition, c’était juste une idée». «La décision finale se fera entre Maliens », a indiqué Ismaël WAGUE.

TV5-Monde : Bonjour Monsieur le Colonel major Ismaël WAGUE ! Merci de nous recevoir. Vous êtes le porte-parole du Comité national pour le salut du peuple (CNSP). Des négociations sont en cours avec la CEDEAO, des négociations qui n’ont pas abouti pour le moment. Quels sont les différents points de blocage ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Bonjour, merci bien. On ne peut pas dire qu’on est en négociation avec la CEDEAO.
Après qu’il y ait eu l’action qui a amené la démission de l’ancien président, Ibrahim Boubacar KEÏTA, la CEDEAO a mis en place une mission de compréhension, de médiation. Donc, le but principal de leur mission, c’était déjà de nous voir, ensuite de s’assurer que l’ancien président, Ibrahim Boubacar KEÏTA, va bien et de s’assurer qu’effectivement il a démissionné et de nous demander, c’est quoi la suite ?
Donc, on leur a dit que la suite, pour nous, c’est d’organiser rapidement la transition pour aller vers un système normal. Donc, le but même de leur visite c’était surtout ça. Comme aussi il y avait des sanctions qui ont été mises en place, donc, on leur a demandé de voir dans quelle mesure ils peuvent alléger les sanctions.

TV5-Monde : Vous avez parlé de la suite, c’est-à-dire de la transition, cette transition sera-t-elle gérée par un civil ou paramilitaire ?
Colonel major Ismaël WAGUE : C’est la même question qui revient régulièrement. On a dit que l’architecture de la transition, la durée, vont se préciser à l’issue des concertations entre Maliens et qui va être confirmée par une charte de la transition, une feuille de route.

TV5-Monde : Par rapport à la durée, on parle de 2 à 3 ans. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Pendant les phases d’échanges avec l’équipe de médiation de la CEDEAO, il y a plusieurs scénarii qui sont sortis. L’équipe de médiation de la CEDEAO a en tête son concept de transition, conforme à leur protocole, où il parle de, ‘’il faut que le président soit un civil’’ ; ‘’il faut qu’il y ait un Premier ministre’’, ‘’le gouvernement et la durée de la transition entre 6 et 9 mois et qui dépasse rarement un an.
On a échangé avec eux, on a dit que pour nous, le cas malien est différent. Il y a les problèmes qui sont énormes, il faut que la transition soit mise à profit pour, au moins, prendre en partie une grande partie du problème et commencer sur de nouvelles bases. Et que ce n’est pas forcément que ça puisse se faire en un an. Donc, dans les discussions, nous avons suggéré, que dans la mesure où l’ancien président (KEITA) était là pour cinq ans ; qu’il a fait 2 avant sa démission, et que les trois ans de son mandat restant pourraient être mis à contribution pour mettre en place la transition.
C’était juste une idée, une proposition, des échanges comme ça. Après quand on s’est retrouvé, ils ont dit que notre proposition d’hier de trois ans, c’est long. On a dit, bon, on peut revoir peut-être à deux ans, mais que de toutes les façons, la décision finale, ça, ça va se faire entre Maliens.

TV5-Monde : Vous parlez de décision finale entre Maliens. Est-ce que vous considérez que les différentes sanctions qui ont été édictées par la CEDEAO et par d’autres communautés sont une ingérence au niveau des affaires maliennes ?
Colonel major Ismaël WAGUE : J’estime clairement que c’est une ingérence au niveau des affaires maliennes. Parce qu’il faut plutôt avoir une approche au cas par cas, que d’avoir une approche de façon organisationnelle avec des protocoles. Déjà, quand il est dit, à l’issue de telle action, clairement que c’est un coup d’État ; il y a des batteries de sanctions qui tombent. Là, l’ancien président a dit clairement qu’il a démissionné sans pression, et de façon spontanée. Et la vacance du pouvoir a été constatée. Ça veut dire tout simplement qu’on n’est plus dans l’architecture d’un Coup d’État. En principe, les chefs d’État de la CEDEAO ne devraient pas mettre en place des sanctions par rapport à ça. Et ensuite, il y a la liesse populaire, c’était un soulagement pour la population après ce changement qu’il faut prendre en compte.

TV5-Monde : On parle de populations, du coup, de société civile, comment comptez-vous associer la société civile et les différents partis politiques à la transition ?
Colonel major Ismaël WAGUE : En fait, pendant les concertations, comme je vous l’ai dit, il y a l’architecture de la transition qui va être précisée clairement. Le président de la transition, la charte la transition, le gouvernement, la durée, qui va rentrer dans la transition. Et en fonction de ça, ça se décidera.

TV5-Monde : Est-ce que la majorité des chues participera cette transition, selon vous ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Tout le monde est appelé pour mettre en place les instances de la transition.

TV5-Monde : Notamment les groupes armés signataires de l’Accord de paix d’Alger aussi ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Tout le monde sans exception.

TV5-Monde : Hier, le syndicat national de la magistrature dénonçait des délibérations extrajudiciaires. Qu’en est-il aujourd’hui ? Et est-ce que ça ne décrédibilise pas finalement un petit peu votre mouvement ?
Colonel major Ismaël WAGUE : En fait, effectivement, il y a eu des cas de libérations qui ont été signalés. Donc, il y a des dispositions qui sont en cours. D’autres mêmes ont déjà été réglées avec le secrétariat général du ministère de la Justice pour prendre cet aspect en compte. Nous sommes là-dessus, ça fait partie des priorités, parce que nous avons dit que l’État va continuer. Donc, tout ce qu’il y a comme erreur, comme dysfonctionnement est train d’être réglé.

TV5-Monde : Concernant la justice, y aurait-il des poursuites ou des audits qui vont être menés sur la gestion qui a été faite par la magistrature précédente ?
Colonel major Ismaël WAGUE : A priori oui. Mais ce n’est pas le CNSP qui va le faire. Il y a le gouvernement qui va être mis en place, une équipe de transition. Et le département et les institutions agréées et autorisées pour le faire pourront le faire.

TV5-Monde : Quand est-ce que le président Ibrahim Boubacar KEITA sera libre de ses mouvements ?
Colonel major Ismaël WAGUE : L’ancien président Ibrahim Boubacar KEÏTA est en fait libre de ses mouvements. Il est sécurisé dans un endroit de sa convenance pour des raisons évidentes de protection.

TV5-Monde : On parle aussi, potentiellement d’un départ du président Ibrahim Boubacar KEÏTA. Qu’en est-il ? Est-ce que c’est des points de négociation avec la CEDEAO ?
Colonel major Ismaël WAGUE : L’équipe de médiation de la CEDEAO nous a demandé de l’autoriser à aller se soigner à l’extérieur en cas de besoin. Cette demande a été accordée. Donc, dans un délai raisonnable, dès qu’il estime le besoin d’aller se faire soigner à l’extérieur, sous réserve de son médecin, ça se fera.

TV5-Monde : Est-ce qu’il a pu regagner son domicile revoir sa famille depuis une semaine ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Il est sécurisé dans un endroit de sa convenance. C’est tout ce que je peux vous dire pour le moment.

TV5-Monde : Un rapport du Comité d’experts des Nations Unies épinglait, il y a deux semaines, une partie de la hiérarchie militaire. Qu’est-ce que vous souhaitez faire par rapport à ce sujet ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Quand le gouvernement de transition sera mis en place, toutes ces affaires dont vous parlez, avérées ou pas, feront l’objet d’enquête par le département agréé pour le faire. Si ça nécessite des poursuites, ça se fera.

TV5-Monde : Sur la situation plus globale, au niveau de la sécurité du Mali, 70% du territoire et contrôlés par des groupes armés ou en profonde insécurité. Comment allez-vous procéder pour pallier cette situation ?
Colonel major Ismaël WAGUE : De toute façon, ce n’est pas un travail facile, ça fait partie des raisons qui nous ont poussés à mettre en place le CNSP. Ça veut dire tout simplement que ceux-là qui sont sur le terrain, les opérations militaires vont continuer en coordination avec les forces partenaires comme la MINUSMA et Barkhane. Maintenant, les Accords avec les groupes armés signataires aussi, on va poursuivre la négociation, surtout l’application des Accords d’Alger et mettre tout ça, bout à bout, et de faire en sorte que, quand tous ces mécanismes seront activés, de voir dans quelle mesure on peut réduire les violences.
Le travail de sécurisation du territoire dans sa globalité est extrêmement difficile et compliqué. Ça fait partie de nos objectifs d’aller vers cette situation, de sécuriser la totalité du territoire avec l’aide de tout le monde.

TV5-Monde : Alors, le dialogue national inclusif préconisé, en décembre dernier, de négocier avec les djihadistes. Ibrahim Boubacar KEÏTA s’y était résolue au moment il était toujours la tête du pouvoir. Est-ce que, selon vous, il faut négocier avec les djihadistes ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Nous avons dit, dès le début, que nous allons travailler avec les conclusions du Dialogue national inclusif. Donc, si ces dispositions sont prévues dans ce dialogue, ça va faire partie de nos axes de travail.

TV5-Monde : Il y a une semaine, on a eu l’occasion d’avoir des différentes preuves de vie de Soumaila CISSE qui ont été transmises à sa famille, grâce au concours du CICR. Aujourd’hui, il est toujours retenu. Est-ce qu’on peut dire qu’une libération, bientôt, dans les jours qui viennent, est possible ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Nous avons pris le dossier à bras le corps depuis que nous sommes en place. Et je vous dis qu’on travaille dessus sérieusement. À ce stade, c’est tout ce que je peux vous dire.

TV5-Monde : Au terme d’une transition, est-ce que des élections sans Soumaila CISSE, le chef de file de l’opposition, est-elle imaginables ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Nous espérons sérieusement qu’on puisse obtenir sa libération avant la phase des élections. Ça, c’est vraiment notre souhait. On espère, nous espérons y arriver.

TV5-Monde : Ça fait une semaine que le comité national pour le salut du peuple est à la tête du Mali. La question que je me pose, et ça sera la dernière ; est-ce que c’était un coup préparé ?
Colonel major Ismaël WAGUE : Nous ne pouvons pas dire que c’est un coup préparé. Nous ne pouvons pas dire aussi que le c’est spontané. Depuis un certain moment, nous regardons la situation sécuritaire, la dégradation, les troubles sociopolitiques. Forcément, ça donne à réfléchir. Voilà c’est tout ce que je peux vous dire.

TV5-Monde : Merci nous avons accordé cet entretien.
Colonel major Ismaël WAGUE : Merci beaucoup !
Transcription libre

Source : INFO-MATIN

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