L’ancien ambassadeur de France au Mali, Nicolas Normand, vient de publier aux éditions Eyrolles « Le grand livre de l’Afrique », qui est une description faite par l’auteur, des réalités politique, économique et culturelle de l’Afrique. Il s’intéresse notamment au Nord du Mali.
A l’occasion, il parle de l’intervention française à Kidal, après l’offensive de Serval pour libérer le Nord du Mali. Il écrit : « l’armée française est allée rechercher ce groupe – c’était le MNLA à l’époque –, ces séparatistes touaregs, d’une tribu particulière qui était minoritaire au sein même des Touaregs, les Ifoghas. Ce groupe, on est allé le chercher et on lui a donné la ville de Kidal. Et ensuite, ultérieurement, il y a eu les accords d’Alger, qui mettent sur une sorte de piédestal ces séparatistes, à égalité en quelque sorte avec l’Etat. Cela, c’est une erreur importante. » Les révélations sont graves, dans la mesure où la France est indexée d’avoir aidé le MNLA à occuper Kidal. A propos de l’Accord pour la Paix, l’ancien ambassadeur critique un accord qui a donné un statut fort avantageux et toutes sortes d’avantages matériels aux signataires. « Actuellement, a-t-il écrit, ils sont payés pour participer à des comités de gestion. Il n’y a pas d’élection et il n’y a pas de désarmement immédiat. Le fait qu’ils puissent garder leurs armes jusqu’à la fin du processus – et ils ne sont toujours pas désarmés pour l’essentiel – a créé une sorte d’instabilité dans la région, parce que les groupes majoritaires non touaregs se sont sentis un peu menacés. Donc tout le monde s’est armé, il y a eu une tribalisation armée qui s’est produite au Nord du Mali. Ils se sont dits : « Pour avoir des avantages, il faut prendre les armes. En plus, l’aboutissement de l’accord, c’est le désarmement et ce sont des élections. Et cette noblesse Ifoghas minoritaire n’a pas intérêt à des élections. Parce qu’à ce moment-là, elle serait sans doute balayée par la majorité non Ifoghas. » C’est sous ce prisme que Nicolas Normand a analysé la situation qui continue de prévaloir à Kidal.
Mossa ag Attaher, porte-parole du MNLA et membre de la délégation de la CMA au Comité de suivi de l’accord d’Alger, n’a pas tardé à réagir aux propos de l’ancien ambassadeur. En effet, il a déclaré à la presse internationale : « L’analyse qui présente le problème du Nord en général et de la situation à Kidal comme étant liés à la volonté des Ifoghas à imposer leur diktat à une autre communauté touarègue, je pense que cette analyse est tout simplement tronquée ». Il a aussi indiqué que l’analyse de Nicolas Normand tombe au mauvais moment : « au moment où, a-t-il dit, nous sommes, toutes les communautés de l’Azawad, ou du Nord du Mali, selon l’appellation, dans une dynamique de réconciliation, de dialogue, et on prévoit très bientôt une rencontre qui va réunir toutes ces communautés dans la région de Gao, pour justement mettre derrière nous, les conflits fratricides, les guerres intestines. Donc cette analyse est complètement à contre-courant. C’est la réalité du moment et elle est en inadéquation totale avec les réalités du moment et les analyses mêmes du moment ».
B.D.
Source: Canard Déchainé