Les dégâts engendrés par les fortes précipitations tombées dans notre pays et notre sous-région, durant cette saison des pluies posent une fois de plus l’impérieuse nécessité de connaître et maîtriser les paramètres de développement de nos cités afin de pouvoir prévenir et gérer les conséquences éventuelles des catastrophes naturelles. Etat, société civile, partenaires au développement nous nous trouvons tous interpellés.
Les différents ouvrages et équipements d’une cité étant conçus à partir des contraintes déterminées, il faut ici préciser que d’une manière absolue aucun établissement humain n’est à l’abri d’une catastrophe naturelle. En effet, tout est une question de seuil, le seuil au-delà duquel les ouvrages et équipements prévus ne sont plus opérationnels.
En conséquence la gestion de nos cités d’une manière urgente doit absolument être complétée par :
- Un système d’alerte précoce de catastrophes naturelle ;
- Un plan de sauvetage par type de catastrophes ; schéma d’évacuation des personnes et biens, mode d’organisation et d’administration des secours et de protection des biens ;
- Un kit de secours spécifique par type de catastrophe, pour circonscrire rapidement les conséquences sociales sanitaires de la catastrophe.
L’administration, au préalable de toutes mesures préventives, doit au niveau national régional et communal procéder à un inventaire des localités menacées par le phénomène pluviométrique, préciser la nature des menaces et les conséquences pouvant en résulter et enfin faire un classement de ces localités en fonction de la probabilité du risque. Au niveau de la cité, elle doit déterminer les différentes zones concernées, les circonscrire, préciser la nature des menaces et les risques encourus en fonction de l’ampleur du phénomène.
Nécessité de prévenir
Les conséquences d’une catastrophe naturelle sont d’autant plus graves quand elle surprend les populations. Il nous faut donc obligatoirement doter chacune de nos cités d’un dispositif d’alerte précoce.
Ce dispositif dans le cadre des phénomènes pluviométriques doit fixer :
- Des seuils d’alerte en fonction de l’historique de la pluviométrique, de l’aménagement de la cité, de l’état des ouvrages de drainage, et
- Un moyen approprié d’alerte de la population.
En fonction des paramètres de la précipitation en cours trois seuils peuvent être déterminés :
- Un seuil d’alerte des gestionnaires de la cité pour les permettre :
- D’évaluer la nature des menaces et les dégâts pouvant en résulter et,
- D’adopter le plan de sauvetage approprié des personnes et des biens;
- Un seuil d’alerte des acteurs du dispositif de sauvetage,
- Et un seuil d’alerte des populations concernées.
Pour être opérationnelle, l’alerte doit être très largement diffusée dans la cité et reconnue sans ambiguïtés par les populations comme :
- Les différentes notes d’un clairon dans une garnison militaire,
- Les sons du tambour de guerre dans nos villages d’hier ou
- La sirène de l’administration coloniale sonnant en dehors des heures habituelles.
La cheville ouvrière du dispositif de sauvetage déclenché par l ‘alerte est constituée essentiellement par le personnel socio sanitaire, les forces de l’ordre et les forces vives de la nation, à savoir les jeunes principalement qui pour l’occasion doivent être organisés et formés pour une telle mission.
Par contre l’efficacité de ce dispositif dépendra de :
- L’inventaire précis des personnes et biens à sauver par ordre de priorité,
- La solidarité entre voisin et,
- La synergie entre la population et l’administration (commune cercle etc.). Cette synergie doit en effet permettre la connaissance et la maîtrise des différents plans de sauvetages prévus par toutes les composantes de la population concernée,
- La large diffusion et vulgarisation de ces plans, et à travers des exercices grandeur nature.
En dehors des malades, des handicapés, des enfants, des femmes et des personnes âgées une attention particulière doit être portée à la sauvegarde des vivres et denrée alimentaires. Généralement la sauvegarde désordonnée et en urgence des vivres occasionne beaucoup de pertes en vie humaines. En fonction du risque, il est recommandé de demander aux populations de faire stocker leurs vivres dans des entrepôts aménagés à cet effet par l’administration.
Dans notre situation actuelle, l’après catastrophe faute d’anticipation se révèle parfois plus désastreuse et meurtrière que la catastrophe elle-même.
S’il s’agit pendant l’intempérie de sauver des vies et ce qui est indispensable, la gestion de l’après catastrophe par contre est plus délicate et complexe car il s’agit de :
- Soigner les cas sanitaires survenus pendant la catastrophe
- Soutenir moralement, physiquement et socialement,
- Protéger contre les maladies endémiques et épidémiques,
- Traiter le site sinistré (désinfection appropriée) et
- D’étudier la réinsertion des populations sinistrées.
L’urgence dans cette phase au-delà du secours apporté aux victimes, est la protection sanitaire de l’ensemble des populations de la cité. L’eau potable à cet effet joue un rôle capital dans cette prévention. L’administration dès les premières heures après la catastrophe doit en disposer en quantité suffisante.
L’objectif du kit de secours est de doter nos cités en fonction de chaque type de catastrophe, d’un minimum d’équipement, ouvrage, stock d’eau potable, de vivre et de produit sanitaire pour gérer les premières heures de l’après catastrophe avant sa prise en charge par les services appropriés.
Pour que nos villes ne demeurent des victimes éternelles des caprices de la nature !
L’alerte précoce et le plan de sauvetage qui le complète est un dispositif de prévention et d’anticipation face à une catastrophe, qui au lieu de surprendre et devenir meurtrière, sera attendue et gérée à la hauteur de sa fureur. En d’autres termes ce dispositif permettra de dompter la catastrophe et d’en faire un fait urbain, soit périodique ou cyclique.
Les prévisions météorologues nous servirons dorénavant à faire face aux caprices de la nature en sauvant et sauvegardant des vies et des biens. Ainsi la météo, cette science combien utile pour l’humanité, mais combien ignorée dans la gestion de nos régions et cités retrouvera toute sa place dans le développement de nos cités.
Après le sinistre de plusieurs de nos localités y compris Bamako notre capitale, devons-nous encore attendre passif et craintif les prochains caprices la nature et regretter encore ses victimes ?
Diallo Sébastien
Architecte, août 2024
Source: Mali Tribune