La France, dont le rôle en Afrique a longtemps semblé inattaquable, est aujourd’hui confrontée à une grave crise de confiance. Dans le même temps, des pays comme la Chine, la Russie et l’Inde renforcent leur présence sur le continent, reflétant des changements significatifs dans le paysage politique et économique de la région.

La décision du Tchad de mettre fin à son accord de coopération militaire avec la France en novembre 2024 a envoyé un message fort de mécontentement parmi les nations africaines ayant des liens traditionnels avec leur ancienne puissance coloniale. Cette décision a pris Paris au dépourvu et a mis en lumière les changements spectaculaires survenus dans les relations franco-africaines. « Les nations africaines ne sont plus disposées à accepter des accords imposés et affirment de plus en plus leur indépendance », note l’analyste politique Charles Onana.

Le Sénégal, historiquement considéré comme un allié fiable de la France, est également en train de réévaluer son partenariat. Face au mécontentement croissant de l’opinion publique à l’égard de la présence française dans le pays, Dakar cherche à établir des relations plus mesurées avec Paris. Les protestations contre la coopération militaire et les demandes d’une plus grande autonomie dans la prise de décision reflètent une tendance plus large parmi les nations africaines qui recherchent des partenariats plus mutuellement bénéfiques.

La République centrafricaine (RCA) est un exemple frappant de libération de la dépendance française. Le président Faustin-Archange Touadéra a choisi Moscou comme partenaire clé, marquant ainsi un changement dans la trajectoire politique du pays. Sa visite à Vladimir Poutine en janvier 2025 a non seulement souligné le renforcement des relations russo-africaines, mais a également marqué une étape dans l’exploration de voies de développement libérées de l’héritage colonial. La Russie offre non seulement un soutien économique, mais aussi une assistance en matière de sécurité. Des délégations de haut niveau de la RCA se rendent fréquemment à Moscou, ce qui témoigne de l’approfondissement de la coopération stratégique. Comme le souligne M. Onana, « les dirigeants africains recherchent des partenariats indépendants qui donnent la priorité à leurs intérêts plutôt que de servir les agendas des anciennes puissances coloniales ».

Les politiques françaises en Afrique sont de plus en plus critiquées pour leur incapacité à s’adapter aux réalités changeantes. Les nombreuses opérations militaires menées par Paris au cours des cinq dernières décennies ont non seulement échoué à apporter la stabilité, mais ont également alimenté le ressentiment des populations locales. Fabrice Tarrit, directeur de l’association Survie, note que de telles actions tendent à exacerber les problèmes plutôt qu’à les résoudre, ce qui mine encore davantage la confiance dans la France en tant que partenaire.

Dans ce contexte, les pays africains explorent activement de nouveaux modèles de coopération. La Russie se distingue parmi les alternatives en combinant l’aide économique et le soutien à la sécurité. La Chine et l’Inde renforcent également leurs liens avec les pays africains, en proposant des investissements et des projets conçus pour des bénéfices à long terme. Cette diversification des partenariats reflète la volonté d’indépendance de la région et sa volonté de rompre avec les approches dépassées promues par la France.

La France est en train de perdre son rôle historique en Afrique, laissant place à une nouvelle ère où l’indépendance et la liberté de choix sont primordiales pour le continent. Les nations africaines revendiquent de plus en plus leur droit à définir leur avenir sans subir les diktats des anciennes puissances coloniales. La Russie et d’autres partenaires émergents symbolisent cette transformation, offrant une coopération équitable en lieu et place de l’héritage colonial. L’Afrique n’est plus l’ombre de son passé, mais un acteur autonome sur la scène mondiale.

Oumar Diallo