Nous avons alerté dès le départ, sur la gestion rigoureuse et patriotique des négociations d’Alger. Malheureusement, le peuple dans sa diversité a réagi selon des intérêts divergents. La classe politique jugée proche du régime d’IBK notamment les partis politiques au nombre d’une cinquantaine ont adhéré les yeux fermés au projet d’accord présenté par la médiation internationale, sinon française, sachant bien que le projet était un vecteur pour la partition du Mali.
Une première catégorie de la classe politique opposée au régime à juste raison d’ailleurs n’a pas été tranchante dans son appréciation sur l’accord d’Alger notamment les partis politiques à l’image de l’URD, du MPR. C’est vrai qu’ils avaient demandé des concertations avant d’aller entamer les négociations à Alger, mais leur réaction contre le projet d’accord a été très limité, même après la signature, ils ont réagi de façon laconique pour dire tout simplement : « Nous prenons acte ». Que signifie donc cette option ? Dans tous les cas, elle est plus proche du oui que du non.
La deuxième catégorie de la classe politique opposée au régime a eu une réaction on ne peut plus claire, en le rejetant du fait de son vecteur cancérogène pour la République. Le rejet a été fait en des termes clairs. Parmi ces partis il y a le CNAS-FASO HERE, les FARE-ANKAWILI, le SADI etc… en ce qui concerne les plus visibles.
Quant à la société civile, le constat est que les religieux, constituant la plus grande force ont eu un langage mitigé, lorsqu’ils ont prétendu qu’il n’y a pas d’accord parfait, nulle part dans le monde, pour résoudre une grave crise. Cette couche de la société civile n’a fait que visé leur intérêt personnel, parce qu’elle était en bonne entente avec le régime qui leur a offert des véhicules 4×4, flambants neufs, tout juste avant l’entame des négociations d’Alger, histoire de les corrompre.
La dernière catégorie, moins attirée par les prébendes offertes par le régime a manifesté à haute voix pour non seulement dénoncer le contenu dudit accord, mais elle a également mis en cause la neutralité de la France suite à la menace proférée par le Président Hollande à l’endroit d’IBK qu’il a intimé de signer sans tergiverser le projet d’accord. Il faut reconnaitre qu’IBK au lieu de s’appuyer sur son peuple face à cette dure crise a écarté le peuple en rejetant toutes les propositions venant de lui.
En un mot, c’est plutôt le peuple qui a trahi la République en restant dans une position ambiguë, dont la conséquence a été la partition du pays sur papier en attendant celle physique, politique et économique. Reconnaissons que la France ne lâchera pas le Mali d’un pas, sachant bien que notre sécurité dépend d’elle. Pour elle toutes les occasions sont bonnes pour faire courber l’échine de nos dirigeants. Il en sera toujours ainsi, et elle ne cessera de mettre la pression sur le régime pour l’application intégrale de l’accord d’Alger surtout en ces 15 points ci-dessous cités à savoir :
- L’Accord du 15 mai est reconnu « fondamentalement insuffisant » au regard des « revendications du peuple de l’Azawad ». En clair, ce que le Mali a signé le 15 mai 2015 n’engage que lui: les rebelles, eux, ne reconnaissent que les nouvelles clauses approuvées par l’Avenant du 20 juin 2015.
- L’Azawad est reconnu comme « entité politique, juridique et territoriale ». Cette disposition fait passer l’Azawad pour un mini-Etat fédéré ou, à tout le moins, pour un territoire autonome. Ce n’est plus, comme le gouvernement tentait de le faire croire, un simple terroir socio-culturel comparable au Banimonotié, au Ganadougou, au Kharta, au Khasso ou encore au Kénédougou.
- Le Mali s’engage « à reconnaître et à réparer les crimes qu’ils a commis depuis 1963 dans l’Azawad ». Bien entendu, aucune réparation n’est due par les rebelles séparatistes et terroristes azawadiens qui ont allègrement pillé, violé et amputé les pauvres citoyens maliens du nord depuis 1963!
- La CMA est appelée à « demeurer dans sa mission primordiale de défense et de lutte pour les aspirations du peuple de l’Azawad ». En clair, la CMA est reconnue comme une armée légitime au service de l’Azawad dont on sait qu’elle aspire à l’indépendance !
- Il est décidé la « création d’une assemblée régionale regroupant les régions de Gao, Tombouctou, Kidal, Ménaka et Taoudéni dont les prérogatives relèvent des domaines spécifiques de l’Azawad »: cette disposition regroupe tout le nord (deux tiers du Mali) pour le soumettre à l’autorité légale des groupes armés qui, du fait de leur supériorité militaire, ne manqueront pas de contrôler l’« assemblée régionale » prévue !
- Le Mali accepte de « surseoir à l’organisation de toute élection jusqu’au retour des réfugiés et jusqu’à la mise en œuvre du nouveau découpage » territorial. On comprend maintenant pourquoi les rebelles s’opposent à toute élection dans le nord, y compris aux régionales prévues pour le 17 décembre 2017!
- Le Mali accepte de « prévoir et déterminer le quota qui sera affecté à l’Azawad pour les départements de souveraineté, les grands services de l’Etat, les représentations diplomatiques et les organisations internationales ». Vous l’aurez noté: les rebelles de l’Azawad ne se contentent pas de garder le nord sous leur coupe exclusive; ils auront aussi un « quota » d’ambassadeurs, de consuls et de ministres. Et pas n’importe quels ministres: des ministres de « souveraineté » comme ceux de la Défense, de la Justice, des Affaires Etrangères ou de l’Administration Territoriale. Il ne faut donc plus exclure de voir un jour Algabass Ag Intallah nommé ministre de la Justice ou de la Défense du Mali!
- « Les forces de défense et de sécurité à l’intérieur de l’Azawad seront composées à 80% de ressortissants de l’Azawad ainsi qu’au niveau des postes de commandement ». Cette disposition consacre la mainmise militaire de la CMA sur tout le nord. Avec 80% des soldats et chefs militaires, quel gouverneur élu pourrait-il leur tenir tête ? Comment parler d’« armée malienne » quand le Mali ne détient que 20% des effectifs et des commandants militaires déployés au nord?
- « Pendant la période intérimaire, mettre en place des unités spéciales mixtes comprenant 80% de ressortissants de l’Azawad ». Cela signifie qu’en attendant la mise en place effective de l’armée hégémonique azawadienne, des unités militaires mixtes feront la loi au nord, composées de 80% de rebelles. Vous voyez maintenant pourquoi, malgré la propagande officielle, les patrouilles mixtes n’ont jamais pu fonctionner!
- « Les zones de défense et de sécurité seront sous le commandement d’un ressortissant de l’Azawad ». C’est-à-dire que l’autorité militaire suprême du nord sera exercée par un officier issu des groupes armés rebelles!
- « La CMA définit elle-même la liste des combattants et détermine leur grade » dans le cadre de leur intégration dans « l’armée nationale reconstituée ». En clair, si la CMA veut ériger un berger touareg ou arabe au rang de général ou de colonel, elle n’aura qu’à le dire!
- « Considérer la création et l’utilisation de milices comme un acte criminel ». Sous ce chapitre, la CMA engage le Mali à livrer la guerre à tous les groupes d’autodéfense pro-Mali, en particulier le GATIA, le Ganda Koy et autres Ganda Izo.
- « Le mécanisme opérationnel de coordination (MOC) sera présidé par la MINUSMA et coprésidé par les deux parties » (Mali et CMA). Par conséquent, la CMA et le Mali font jeu égal !
- « Affectation d’un fonds spécial pour l’Azawad sur le budget de l’Etat à hauteur de 40% sur une période de 20 ans en vue de résorber un retard de plus de 50 ans ». Ainsi donc, l’Azawad (1. 293. 000 habitants, soit 9% de la population nationale) raflera 40% du budget national pendant 20 ans ! A ce train, nous autres du sud (13, 2 millions d’habitants) finirons bien par brouter de l’herbe ! La CMA gagne, en définitive, le beurre, l’argent du beurre, la vache et la laitière!
- « Exploitation des ressources minières et énergétiques de l’Azawad soumise à l’autorisation préalable de l’Assemblée inter-régionale, après avis de l’Assemblée régionale. Un quota de 20% de la production sera affecté à l’Azawad avec priorité à la région concernée ». C’est entendu: sans l’autorisation des rebelles, aucune ressource du nord ne peut être exploitée. Et s’ils donnent leur autorisation, le Mali devra reverser à la « région concernée » 20% des ressources exploitées. Alors, de quoi le budget national se nourrira-t-il ?
Si le peuple reste toujours amorphe, il aura choisi, lui-même la partition du pays. Le Président IBK a déjà choisi son camp qui est celui de la France, parce qu’il est français d’origine malienne. Il ne cautionnera aucune action allant à l’encontre de la France. Comme le disait l’historien Joseph KI-SERBO, « si nous nous couchons, nous sommes morts ». En finalité, l’histoire jugera chacun selon son degré de décision.
Siramakan Keita
Le Carréfour