Le problème foncier constitue l’un des principaux maux dont souffre le Mali. Pas mal de maires ou tout simplement toute l’administration de certaines mairies ne vivent que des sales affaires de ventes illicites de parcelles. Contre ces genres de pratique, la population de Moribabougou a mis en place un collectif qui vient de remporter une victoire contre le « secrétaire général » de leur mairie. Ce denier aurait donné l’autorisation à un occupant de prendre possession d’une rue, obstruant ainsi ce passage. Grâce aux multiples démarches de ce collectif, la procureure de la commune I a demandé la démolition des constructions. Chose qui a déjà commencé.
Contre l’occupation « illégale de la servitude de passage de l’ilot N°242/241 du TF 9095 » et de construction non autorisée à Moribabougou, le Collectif pour la Défense du Patrimoine Foncier de Moribabougou (CDPF-MD) a entamé des démarches auprès des juridictions compétentes du Mali afin d’obtenir la démolition de ladite construction qui obstrue un passage.
À la date du 5 septembre 2018, Me Mamadou Balla Camara, Huissier-Commissaire de Justice, a fait une sommation interpellative à M. Aly Ballo, chef d’Antenne de l’Urbanisme et de l’Habitat des Domaines de Moribabougou pour lui faire part du constat du collectif datant du 1er septembre 2018. Selon la copie de cette constatation à laquelle nous avons eu accès, on peut remarquer des soubassements érigés sur la servitude, une plaque d’autorisation N°18.0045M.CRM, des nouveaux poteaux érigés, des croix sur les réalisations en cour. « Sur ladite servitude est construit le soubassement d’un bâtiment obstruant complètement la rue de 10 mètres. Malgré nos multiples interventions afin d’empêcher leur construction illicite, les travaux évoluent tous les jours ni titre de propriété et sans autorisation de construire », lit-on dans la constatation de Aly Ballo. Il est aussi écrit dans le même document : « Sur lesdites constructions illicites et illégales, le service technique lors de son passage a procédé à la mise des croix sur lesdits travaux en cours dans le but de dissuader leur tentative d’occupation illégale. Les convocations délivrées ont été interceptées par le secrétaire général de la Mairie qui se trouve derrière ces constructions illicites sur ladite servitude ».
Ces constatations se sont effectuées en présence de Me Cheick Oumar T. Dagno, Huissier-Commissaire de justice et de Modibo Kouyaté, sympathisant du collectif. Dans la sommation interpellative de Me Camara, les questions suivantes ont été posées à M. Ballo : « Pouvez-vous nous dire si le numéro d’autorisation visé ci-dessus émane bien des services techniques compétents ? Si oui, cette autorisation permet-elle l’obstruction de la rue ? Si non, avez-vous pris de nouvelles dispositions pour faire arrêter les travaux ? » Le dénommé Aly Ballo a de ce fait apporté des éclaircissements. À la question N°1, il appose un non : « Le numéro d’autorisation de construire n’émane pas du service compétent, du service technique de la mairie qui a déjà fait un rapport N°003/2018-AUH.M.NGD pour confirmer que cette construction est illicite. » À la question N°2, il appose le même non avant de préciser pour la troisième question que de nouvelles dispositions ont été prises pour demander l’arrêt des travaux, du marquage des croix sur les réalisations, de la rédaction des procès-verbaux de constat …
En ce qui concerne la demande d’authentification du rapport N°043-2018/ du 6 avril 2018 du chef d’antenne de l’urbanisme et de l’habitat de Moribabougou au maire de la commune rurale de Moribabougou pour demander l’arrêt des travaux, Aly Ballo laisse entendre à Me Sory Ibrahima Traoré, Huissier-Commissaire de Justice près le ressort de la cour d’Appel de Bamako : « Je confirme que ledit rapport est de nous. » Cette sommation interpellative a été faite le 12 juin 2018.
Sur la sommation d’arrêt des Travaux faite à M. Eklo Komlan le 12 septembre 2018 par Me Mamadou Balla Camara, Huissier commissaire de justice près la Cour d’appel de Bamako, on peut lire « De immédiatement et sans délai arrêter les travaux qu’il effectue sur la servitude de passage de l’ilot N°242 sise à Moribabougou, à compter de la date de réception de la présente sommation. » Et de préciser : « Faute par lui de satisfaire à la présente sommation, le requérant se pourvoirait par tous les moyens et voies de droit pour l’y contraindre. » M. Eklon a laissé alors entendre qu’il reconnait avoir « acheter ladite parcelle à la mairie » et d’avoir un permis pour cette parcelle ainsi que l’autorisation provisoire de construire ».
À la date du 18 décembre 2018, le Collectif a adressé une plainte contre X pour occupation illégale de servitude et faux et usage de faux à Madame la Procureure du tribunal de la commune I. À lire la plainte dont nous possédons une copie, le collectif explique que cette occupation illicite a été révélée suite à une plainte de leurs voisins. Chose qui a ouvert la voie à des investigations des services techniques de l’urbanisme en avril 2018. « Une visite de terrain ayant abouti au constat d’une occupation illicite d’une rue de 10 mètres et à la mise de croix à titre d’avertissement », lit-on dans la plainte. Des tentatives de sensibilisations seraient ensuite organisées à l’adresse de l’occupant, Eklon Komlan.
Nonobstant toutes les démarches entamées, les travaux de construction se sont poursuivis, pire, une plaque a été installée comportant le numéro d’identification. Le CDPF-MD a alors porté plainte pour « faux et usage de faux ».
Toutefois, « Le service technique demande à la mairie le respect strict des plans approuvés. Il demande également la libération totale de la servitude de passage et toutes les autres constructions illicites sur le site. Le Maire doit prendre toutes les mesures idoines pour mettre la rue dans son état et si les travaux évoluent le secrétaire général de la mairie se tiendra responsable devant les faits », indique-t-on dans la constatation du chef d’Antenne, Aly Ballo.
Selon notre source, suite à la demande du procureur, l’occupant illicite a entamé la démolition de ses constructions depuis le samedi 23 mars 2019.
Fousseni TOGOLA
Source: Le Pays