Alors que le Niger a été frappé pour la première fois jeudi par deux attentats-suicides, la confusion règne ce vendredi matin sur les commanditaires. Dans la soirée, les islamistes du Mujao (Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest) ont revendiqué ces actes perpétrés contre l’armée nigérienne et le groupe nucléairefrançais Areva. Plus tard dans la nuit, le porte-parole du groupe «Les signataires par le sang» a assuré que son dirigeant, le jihadiste algérien Mokhtar Belmokhtar avait «supervisé» ces attentats. Le même jihadiste que l’armée tchadienne affirmait avoir tué début mars dans le massif des Ifoghas dans le nord du Mali. A l’époque, le gouvernement français se refusait à confirmer l’information alors qu’une photo d’un homme mort lui ressemblant avait semé le trouble.
Ces deux attentats-suicides sont les premiers du genre dans l’histoire de ce pays sahélien. Une vingtaine de personnes y ont laissé la vie. «Vingt morts côté ami», a déploré jeudi soir le ministre nigérien de la Défense, Mahamadou Karidjo, alors que Une quinzaine de militaires ont été blessés, dont six graves, et au moins trois assaillants tués.
Attaque conjointe avec le Mujao ?
Très pauvre, le Niger est engagé depuis début 2013 au Mali voisin, aux côtés de troupes françaises et africaines, contre des mouvements jihadistes. Ce qui, selon le Mujao, justifie une telle attaque: «Grâce à Allah, nous avons effectué deux opérations contre les ennemis de l’islam au Niger», a déclaré le porte-parole Abu Walid Sahraoui. «Nous avons attaqué la France, et le Niger pour sa coopération avec la France dans la guerre contre la charia», a-t-il poursuivi.
«C’est Belmokhtar qui a supervisé lui-même les plans d’opération des attaques», a lui assuré le porte-parole de son groupe, El-Hassen Ould Khlil alias «Jouleibib», cité par l’agence mauritanienne en ligne Alakhbar. Il affirme que «plus d’une dizaine de combattants ont participé à ces attaques», menées conjointement avec le Mujao. Jouleibib a également indiqué que l’opération avait été nommée du nom d’Abou Zeid, le dirigeant d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) tué fin février dans les Ifoghas (Mali) par l’armée française. Belmokhtar, également ancien dirigeant d’Aqmi, avait lui quitté le groupe fin 2012 pour créer son propre mouvement, dont la première action d’envergure avait été une prise d’otages massive et sanguinaire en janvier sur un site gazier à In Amenas, dans le sud de l’Algérie. C’est le président tchadien Idriss Déby Itno, dont l’armée intervient au Mali avec l’armée française, qui avait affirmé en avril qu’il s’était «fait exploser» peu après la mort d’Abou Zeïd. La France avait confirmé le 23 mars la mort d’Abou Zeid mais pas celle de Mokhtar Belmokhtar.
Après ce double attentat au Niger, le gouvernement a décrété un deuil national de trois jours à compter de ce jeudi. Le pays a subi ces dernières années plusieurs attaques et enlèvements perpétrés par des groupes islamistes, notamment dans le nord du pays. Sept employés d’Areva et d’un sous-traitant avaient été enlevés le 16 septembre 2010 à Arlit par Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi). Quatre Français restent aux mains de leurs ravisseurs. Le gouvernement français a d’ailleurs condamné jeudi «avec la plus grande fermeté» le double attentat. Le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a assuré son homologue nigérien de «la pleine solidarité de la France avec les autorités nigériennes dans la lutte contre les groupes terroristes. […] Nous appelons les Français présents au Niger à suivre les consignes de prudence qui leur sont passées», a ajouté le porte-parole du Quai d’Orsay Philippe Lalliot.
Publié le 24.05.2013, 07h06 | Mise à jour : 07h58
Source: Le Parisien