Notre pays dispose d’un département spécialisé dans le domaine et garde une bonne longueur d’avance sur bon nombre de ses voisins. Nos spécialistes ont fabriqué sept médicaments traditionnels améliorés qui sont en vente dans les officines pharmaceutiques.
Le recours à la médecine traditionnelle est une pratique courante, notamment aux recettes de grand-mère, à un moment donné. Ce constat général rappelle l’importance de cette médecine, bien acceptée dans nos différentes communautés et qui doit s’inscrire dans la complémentarité avec la médecine conventionnelle, c’est-à-dire moderne.
Ainsi, notre pays, qui garde une bonne longueur d’avance sur nombre de ses voisins, a adopté une politique nationale en la matière. Cette volonté de valorisation de la médecine traditionnelle s’est traduite par la création du département de médecine traditionnelle de l’Institut national de la santé (INSP), lui-même bâti sur les cendres de l’ex-Institut national de recherche en santé publique (INRSP).
Ce département de médecine traditionnelle, qui dispose d’une équipe de recherche compétitive, est à l’origine de la fabrication de médicaments traditionnels améliorés (MTA) auxquels on prête de nombreuses vertus. Sept médicaments sont actuellement vendus dans les officines pharmaceutiques à des prix accessibles. Il s’agit de l’hépatisane, du malarial contre le paludisme, de la pommade psorospermine contre les infections de la peau, du sirop balembo, utilisé contre la toux, du laxacassia indiqué contre la constipation et du dysenterial prescrit contre la diahrrée et du gastrosédal contre la gastrite. D’autres molécules seraient aussi sur le marché.
Dans un pays où, il vaut mieux aller au boulanger qu’au médecin, c’est-à-dire où le médicament coûte plus cher que la nourriture, la médecine traditionnelle apporte un véritable bol d’air aux malades. Ceux-ci n’ont pas forcément les moyens de se procurer des médicaments génériques encore moins des spécialités.
Nos compatriotes utilisent les médicaments traditionnels améliorés pour se soigner contre certaines pathologies courantes, notamment le paludisme qui reste un fréquent motif de consultation dans nos établissements de santé, les maux de ventre et certains malaises au cours de la grossesse. La médecine traditionnelle s’est révélée surtout d’une très grande efficacité dans la prise en charge de certains problèmes de santé publique. Malades et spécialistes du domaine intègrent ce potentiel dans l’arsenal thérapeutique de notre pays contre les pathologies assez répandues.
VENDEURS D’ILLUSIONS- Sékou Kouyaté est une personne du troisième âge. Du haut de ses 90 ans et de ses nombreuses années d’utilisation de cette médecine, il sait de quoi il parle. Cet habitant de Sabalibougou prête de nombreuses vertus thérapeutiques aux plantes. « J’accorde de l’importance à la médecine traditionnelle. Il y a quelques années, il n’y avait pas un éventail assez large de médicaments modernes. On utilisait les décoctions et d’autres recettes de grand-mère ». Le nonagénaire pousse son analyse un peu plus loin. Il estime qu’il y a une énorme différence entre les enfants de sa génération et ceux d’aujourd’hui qui brillent par leur fragilité. L’argumentaire paraît saugrenu et pourrait être contesté par tout esprit cartésien. Mais le doyen d’âge voulait simplement rappeler que depuis des lustres, cette médecine continue d’administrer la preuve de son efficacité dans la prise en charge et dans la prévention de certaines préoccupations de santé publique.
Adiaratou Togo, résidente à Kalabancoro, partage les mêmes observations que son prédécesseur et soutient que du début de sa grossesse à l’accouchement, elle n’utilise que des produits traditionnels. « Par la grâce d’Allah, mon enfant se porte comme un charme », explique cette mère de famille.
La médecine traditionnelle représente un maillon essentiel de la chaîne de soins du fait que les tradipraticiens représentent parfois le premier contact du malade. Il y a donc une notion de complémentarité à établir entre la médecine conventionnelle et celle traditionnelle. Cette dernière reste confrontée à un problème d’organisation et de réglementation pour mieux en tirer profit parce que c’est une discipline qui recèle de grandes potentialités.
Au-delà des médicaments, les thérapeutes traditionnels offrent des recettes à base de feuilles ou d’écorces d’arbres, de poudre. Sur le marché, ces produits sont accessibles pour le citoyen lambda.
Les prix de ces médicaments traditionnels varient entre 25 et 250 Fcfa. Mais pour des croyances qui perdurent, certains médicaments sont cédés au prix symbolique de 5 Fcfa. En outrepassant cette exigence, le médicament perdrait tout son principe actif et donc son efficacité. Jadis, certains tradithérapeutes ne percevaient pas le moindre kopeck du malade avant sa guérison. Ces maîtres de la médicine traditionnelle étaient sûrs de leur science. Mais aujourd’hui, les vendeurs d’illusions ont pignon sur rue et se livrent à des pratiques pas très catholiques.
On leur reproche une méconnaissance des plantes et de leur mode de conservation. La médecine traditionnelle a franchi les âges et semble avoir encore de beaux jours devant elle. À Kalabancoro, Mah Diarra est tradipraticienne depuis le bas âge. Cette mère de famille arrive à vivre de son art et à subvenir aux besoins de sa famille. Quant à Abdoulaye Bakayoko, 70 ans, lui a hérité la science de la médication de ses ancêtres. Il souligne vivre bien de ses connaissances thérapeutiques.
Au marché de Sabalibougou, Youssouf Dembélé est un vendeur de plantes médicinales. Quotidiennement, il se rend à Sanankoroba, Ouélessébougou, Kabé, Baguinéda pour se ravitailler en plantes qu’il revend dans la capitale. Il cède ses cueillettes journalières au détail, et il ne manque pas de clients.
Les thérapeutes traditionnels utilisent beaucoup les plantes comme « goulobè », « djoun », « Ségou fali » contre le paludisme. Le « silen » est conseillé aux malades de l’hémorroïde ou « koko ». « Farakolo kanchi » facilite la dentition des bébés. Le « gountigè » aide l’enfant à marcher vite et le « sidjan lili » traite les maux de ventre.
Fatoumata T
Diawara
Source: Journal l’Essor-Mali