Le procès intenté par des membres de la Cour constitutionnelle contre le fondateur et directeur de publication du journal « Le Pays » Boubacar Yalkoué, pour « diffamation » a repris hier, jeudi 13 décembre 2018, au tribunal de grande instance de la commune V du district de Bamako. Le délibéré est prévu pour le 27 décembre prochain. A l’issue du débat au fond du procès, les avocats de la défense ont donné leurs impressions. Lisez !
Me Demba Traoré, avocat de la défense à l’issue du débat au fond du procès opposant la Cour constitutionnelle au journal Le Pays : «L’introduction de la plainte n’a pas été faite dans les règles de l’art »
« Nous sommes venus à la deuxième séance du jugement de Yalcoué. Vous savez que la première audience a été faite il y a deux ou trois semaines. Le tribunal avait demandé à ce que Manassa Dagnoko et ses camarades payent 500 000 FCFA pour que le jugement soit fait. Effectivement, on n’a vu aujourd’hui que cette somme a été payée. Et le procès a commencé. Les défauts, failles que ce jugement a, nous avons tout développé devant vous hommes de médias. Car quand tu veux faire un jugement dans le pays, d’abord, la loi dit qui et qui doivent le faire. En le faisant, comment tu dois le faire. La loi a détaillé tout cela. De notre remarque, nous avons vu que ceux qui ont déclenché le jugement, Manassa Dagnoko et ses alliés, devraient respecter certaines parties de la loi. Mais ils ne l’ont pas fait. Ils ont dit qu’ils ont fait la plainte en leur nom, mais si tu lis la plainte, tu te rends compte qu’elle est faite au nom de la Cour constitutionnelle. Alors qu’il n’y pas de décision que la Cour constitutionnelle a prise qui prouve que c’est elle qui a introduite la plainte. Ils ont mis une partie de la loi dans leur plainte que des services judiciaires du pays peuvent se servir de ces genres d’accusations. Ainsi, on s’est dit que si toutefois vous n’avez pas parlé de la Cour constitutionnelle, la loi qui parle de la Cour constitutionnelle est dans votre texte. Pourquoi mettre ça dans votre texte ? On a interrogé sur cette faille. Puisque le tribunal n’a pas donné de réponse d’abord. Le verdict est annoncé pour ce 27 décembre 2018, on va attendre cela. On est venu pour que la vérité soit connue, soit dite. La vérité, elle est relative. On ne peut pas arriver au fond d’une affaire sans parler de la forme. La loi même a dit ça. La lettre qu’eux-mêmes ont faite, ils ont dit en premier que la forme, il y ait acceptation avant d’entrer dans le fond. Et puisque la forme n’a pas été conforme à la loi, nous avons fait ressortir les lois qui condamnent cette irrégularité. De plus, il y a eu un jugement dans ce pays il n’y a pas longtemps entre Karim Kéita et Adama Dramé du Sphinx. Le tribunal de la Commune III a tranché l’affaire en démontrant que l’introduction de la plainte n’a pas été faite dans les règles de l’art. Les choses qui ont été reprochées à cette affaire, ce sont les mêmes erreurs, errements qui sont avec le dossier de Manassa et ses amis. On s’est dit qu’on est dans le même pays. La loi ne peut être changée en disant qu’hier était Moussa, aujourd’hui Birama. La loi n’a pas été changée entre les deux décisions, donc la décision de justice ne saurait être changée. Les gens avec qui on était opposés aujourd’hui, tout le monde a remarqué qu’ils se sont fâchés. Au lieu qu’ils nous parlent exactement du contenu du dossier, ils s’en sont pris à Yalcoué, jusqu’à entrer dans sa lignée. Ils ne devraient pas faire cela. Je salue Yalcoué car ça me fait 20 ans que je vienne au tribunal. Il y a des paroles, si on le dit à des gens, ils se fâchent, s’énervent, disent des paroles maladroites. Aujourd’hui Yalcoué est resté égal à lui-même. Vraiment, c’est un client formidable. Je suis très heureux de ce comportement. Je suis fier d’être à ses côtés pour le soutenir. Car si tu veux aider un client, il faut que ce dernier respecte la loi d’abord. Il a respecté toutes les lois dans ce sens. Il est venu de lui-même, cela prouve qu’il veut la justice de ce pays sinon on allait le menotter et le faire venir par la force.
Les difficultés qui sont dans ce pays sont connues, ce n’est pas la faute des journalistes. Ils ont dit que la société est menacée par la presse. Ça va au-delà même de la personne de Yalcoué. La société est menacée par des gens qui violent nos filles, qui pillent les caisses de l’Etat, des gens qui ont enlevé le juge de Niono. C’est eux qui menacent aujourd’hui la paix et la quiétude dans notre pays. Chaque jour que Dieu fait, les civils sont tués au Nord du Mali. Les peulhs et les Dogons s’entretuent au centre du pays. C’est des problèmes qui menacent notre pays et non la presse. Et ce n’est pas ce que Yalcoué a écrit. Je pense que c’est des paroles qu’on ne doit pas prononcer en défendant ces genres de procédures. Car cela dénote que tu n’a pas d’arguments valables à fournir, à avancer. Ils ont proféré toutes sortes de paroles sur Yalcoué. Tout le monde doit être respecté devant la justice qu’on soit magistrat, citoyen simple, président de la République. La constitution elle-même a dit cela. Nous sommes tous libres et égaux devant la loi. Les uns ne valent pas mieux que les autres au tribunal. Pour nous, tout ce qui peut amener les problèmes, les révoltes dans ce pays, c’est un mauvais jugement. Parce qu’en continuant comme ça, que les gens se rendent justice eux-mêmes ne sera pas bien à voir. Je pense que le travail que nous devons faire pour défendre notre client, nous l’avons fait, conformément à la loi. On l’a fait dans le respect, sans insulter quelqu’un, dans les règles de l’art. Nous, on s’est mis au dessus des insultes, car c’est pour ceux qui n’ont pas d’arguments et qui se mettent à insulter les justiciables à la barre. Ce n’est que le début. La décision qui sera prise le 27 décembre, nul ne saurait la prédire. Mais on est préparé en conséquence. Car en cas de recours, on ira à la Cour d’appel, etc.
– Me Maliki Ibrahim, avocat de Boubacar Yalcoué : « Comme dans le dossier Rasta, ce dossier aussi va faire pitch »
Il s’est passé qu’aujourd’hui nous avons accusé la défense de M. Yalcoué qui est poursuivi pour diffamation, on ne sait à l’encontre de qui ? Vous étiez à l’audience du début jusqu’à la fin, nous avons estimé qu’il ne méritait pas d’être devant ce tribunal. Parce que ceux qui l’ont appelé ne sont pas connus. On ne sait pas si c’est le président de la Cour constitutionnelle qui l’a poursuivi, on ne sait pas si ce sont des juges à titre personnel qui l’on poursuivi. Donc, c’est par voie de citation directe qu’il a été assigné ici. Et donc la partie civile manque de qualité. Et dès lors que la partie civile manque de qualité, le recours est irrecevable. Et il n’a pas à donner des explications sur sa source ou pas. Donc nous, nous n’avons pas de doute que, comme dans le dossier Rasta, ce dossier aussi va faire pitch. Ca va faire pitch parce qu’il y a une tentative d’instrumentalisation de la justice. La justice du Mali refusera de se faire instrumentaliser. Nous, nous disons que si les choses doivent être faites, elles doivent être faites dans les règles de l’art. Dans le cas d’espèce, le recours est irrecevable. Et on n’a aucun doute que le juge va constater cela et puis mettre monsieur Yalcoué hors de cause.
Hadama B. Fofana
Source: Lerepublicainmali