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Mariage : le refus de reconnaitre le viol conjugal

Il est plus facile de réanimer une personne décédée que de parler de viol conjugal au Mali. Lorsque nous essayons d’expliquer que le mariage ne donne pas le droit à un mari d’avoir à tout moment des rapports sexuels avec sa partenaire (la réciproque aussi est vraie), nous faisons face à une incompréhension systématique.

 

On peut parler de violences sexuelles voire de viol sur la partenaire lorsqu’il n’y a pas de consentement de sa part. En parlant de cela, nous sommes confrontés à des idéologies oppositionnelles, et des réponses comme « c’est un concept de blanc que vous promouvez. »

Cependant, cela ne devrait pas nous surprendre car le Mali est un pays où l’on essaye de justifier la violence conjugale même lorsque le partenaire tue la victime. Cela est l’une des formes de violences basées sur le genre.

Au Mali, le mari peut punir la femme en refusant toute relation sexuelle, tandis que la femme est maudite par les anges lorsqu’elle fait de même. Il s’agit d’un pays où les femmes sont renvoyées chez leurs agresseurs pour sauver la face de la famille. Alors, chers défenseurs de la justice sociale, ne soyez pas surpris que notre société phallocratique ne veuille pas nous entendre, ni même entamer un dialogue sur la question du viol conjugal. Cela étant dit, faisons donc savoir qu’on ne nous fera pas taire avec des idéologies qui sacrifient les femmes au nom des agendas patriarcaux.

La nuit dans la chambre nuptiale et la question de la virginité

Qu’on veuille nous entendre ou non, le viol conjugal est horriblement récurrent dans nos sociétés. Parfois, il commence dès le premier jour du mariage. En fait, parfois, quand elles sont envoyées dans la chambre nuptiale, c’est là que l’enfer commence pour de nombreuses épouses nouvellement mariées, qui n’ont aucune expérience sexuelle.

C’est alors qu’elles doivent prouver qu’elles n’ont jamais eu de relations sexuelles, et cela pour préserver l’honneur de leur famille. J’ai vu et entendu des cas où le marié est aidé par des membres de sa famille ou des amis pour tenir la mariée afin qu’elle puisse avoir ses premiers rapports sexuels. Tout cela pour s’assurer qu’elle est vierge et qu’elle a honoré sa famille.

L’histoire d’une « fille aux yeux noirs »

En écrivant ces lignes, l’histoire de la « fille aux yeux noirs » m’est venue à l’esprit, et elle m’a autorisé à parler du calvaire qu’elle a souffert. Elle avait quinze ans et a été mariée à un homme plus âgé, sans même qu’on lui demande son avis. La nuit du mariage, l’homme n’a pu passer à l’acte sexuel, car elle a été excisée et fermée pour la garder vierge. On appelle ce type de mutilation génitale féminine l’« infibulation ».

Elle a passé toute la nuit sans sommeil. Le matin, la «magnabaga», la femme âgée chargée de prendre soin d’elle, est venue et n’a trouvé aucun sang. Alors, elle est allée voir la famille et a crié qu’elle n’avait pas vu de sang. Tout le monde était surpris. L’aînée des tantes est allée voir la fille aux yeux noirs dans la chambre nuptiale.

– « Qu’est-ce qui ne va pas ? », demande la tante au mari

– « Elle avait peur et je ne pouvais rien faire »

Pourtant, il a essayé toute la nuit mais n’a pas pu, car elle était « fermée ».

– « Tu as déjà connu un homme ? Tu as déjà eu un enfant ? Tu n’as pas encore vu ni expérimenté la douleur, n’est-ce pas ? Couche-toi pour que le sang coule, avant que les tantes ne viennent dans l’après-midi pour le “Demba foli“», s’emporte la tante. Puis, elle ajoute en s’adressant au mari : « Fais tout pour que le sang coule, même si elle doit crier et que tout le quartier l’entende ! »

La virginité pour l’honneur de la famille

Ainsi, le sang a coulé, car il fallait une preuve de sa virginité. La preuve de sa virginité devait être montrée aux tantes qui viendraient le soir. Cependant, ce que cette femme a subie pour l’honneur de la famille est une injustice. Une petite fille a été violée pour satisfaire leur exigence. Ne devrions-nous pas aussi parler du « Demba foli » qui encourage cette violence ? Pourtant, certains disent que c’est une bonne tradition. Mais d’après ce que je sais, c’est juste pour féliciter la mariée d’être restée vierge. À cause de cela, de nombreuses femmes et filles subissent le viol conjugal. Beaucoup d’entre elles n’ont aucune préparation à la vie sexuelle, ni par les parents, ni par les « magnabaga », encore moins par les maris.

Revoir nos pratiques qui causent du tort aux femmes et aux filles

Je crois qu’il nous est difficile de rechercher une société harmonieuse et sans VBG si nous ne réfléchissons pas à ces actes que nous perpétrons encore. Même si le mariage est un événement très excitant et heureux, pour certaines femmes, surtout des jeunes filles sans expérience sexuelle, c’est un événement traumatisant qui a un impact terrible sur le bien-être mental et général. Je crois que si nous voulons combattre l’injustice, nous devons nous attaquer aux problèmes engendrés par nos croyances et refus de communiquer dessus, qui nuisent à certaines franges de nos sociétés.

Source : Benbere

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