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Mali : nouveau syndicalisme ou politisation des luttes ?

Le constat permet de considérer l’hypothèse d’une politisation des luttes syndicales au Mali. 

 

L’avènement de la troisième République au Mali a consacré le pluralisme politique et syndical. Nous avons d’abord assisté au renforcement des syndicats à travers une réorganisation. Puis, dans un second temps, a suivi la prolifération des corporations syndicales, dans le seul but, au départ, de permettre l’amélioration des conditions de vie et de travail suivant les règles démocratiques.

Nous pouvons citer, entres autres, la Centrale syndicale des travailleurs du Mali (CSTM), le Syndicat national de l’éducation et de la culture (SNEC), l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM), le Syndicat des producteurs de coton (SYCOV), le Syndicat des exploitants de l’Office du Niger (SEXAGON), le Syndicat national des commerçants détaillants du Mali (SYNACODEM) qui sont, pratiquement, représentés dans tous les cercles et régions du Mali. Ils se trouvent que ces syndicats avaient tout prévu sous le régime démocratique, sauf d’être les grands oubliés. Ce qui expliquerait la reprise des luttes syndicales qui prendront désormais un caractère routinier.

En effet, la priorisation des partis politiques par les normes démocratiques en termes de conquête et d’exercice du pouvoir ne pouvait pas profiter aux corporations syndicales, obligées de procéder à des grèves dans l’intérêt de faire aboutir des revendications. Puisque, de façon constante, les politiques une fois au pouvoir ne prêtaient que des oreilles distraites aux revendications au motif d’absence de ressources financières.

Mais cet argumentaire ne tenait pas dans la mesure où le constat est établi que le train de vie de l’État, sous les régimes respectifs, est époustouflant. A cela, il faudrait ajouter le détournement des fonds et les financements publics de certaines actions politiques qui, difficilement, étaient admissibles comme prioritaires par les corporations syndicales elles-mêmes.

Poids des corporations syndicales

Ce sont ces pratiques qui, une fois étalées dans le temps, ont visiblement pu entrainer un revirement de la situation dans les luttes syndicales avec un changement de méthode allant désormais dans le sens du seul rapport de force au Mali. « Le gouvernement ne cède que lorsqu’il est acculé » est devenu le discours le plus populaire des syndicats. Mais le poids de ces corporations syndicales a pu constribuer, à chaque fois durant les mouvements de grève, à paralyser l’administration publique dans le pays. Nous l’avons vu récemment en 2021 avec l’UNTM, et plutôt en 2020 avec les syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016.

Pourtant, la donne n’a visiblement pas changé, bien au contraire les politiques se contentent seulement de déplacer les véritables problèmes posés par les revendications syndicales. Nous l’avons vu avec l’article 39 dont on se souviendra des repercutions directes et indirectes dans l’histoire des récentes crispations sociales. Cette façon de déplacer les problèmes posés par les revendications syndicales et non de les résoudre efficacement a fait naître un type de syndicalisme qui ne tient aucunement compte de l’équilibre budgétaire, ni ne partage la souffrance des populations maliennes.

Nouveau syndicalisme

La légitimité des grèves et les rivalités syndicales ces derniers temps, surtout dans un contexte de fragilité limite dans laquelle le Mali se retrouve, est questionnée. Les revendications syndicales au Mali ont pris une nouvelle tournure, qui amène à faire deux observations.

En premier lieu, certaines revendications syndicales sont faites dans le dessein d’affaiblir politiquement le pouvoir en créant les conditions d’instabilité gouvernementale. Le pire est la rivalité naissante entre l’UNTM et certains syndicats comme ceux des magistrats (SAM, SYLIMA), mais aussi principalement les syndicats de l’éducation signataires du 15 octobre 2016. Cette dernière voit en l’UNTM un rival qui remettra en cause les acquis de ses luttes syndicales. Le constat permet de considérer l’hypothèse de transformation des luttes syndicales en luttes politiques.

En second lieu, certaines revendications syndicales ont été placées dans le seul carcan financier, sans tenir compte de l’équilibre budgétaire. C’est ce que nous enseignent les tiraillements autour de l’article 39, qui serait même actuellement à l’origine de l’uniformisation des grilles salariales des fonctionnaires. Et ce conformément à la volonté politique des autorités actuelles, qui ont même adopté en Conseil des ministres un projet de loi portant grille indiciaire unifiée des militaires et des personnels relevant des statuts des fonctionnaires de l’État, des Collectivités territoriales et des statuts autonomes.

Certains observateurs avancent l’hypothèse de satisfaire des velléités lucratives. Sinon comment comprendre la rétention des notes décidée par les syndicats signataires du 15 octobre 2016 en réaction à l’initiative de l’abrogation de l’article 39 ? Surtout que la synergie menace d’arrêter le travail en cas de refus d’accorder les 15% que la loi leur garantit, si le gouvernement aligne les fonctionnaires sur les mêmes grilles que celles des enseignants.

Même le contexte de crise qui prévaut au Mali n’inspire plus personne. On se poserait même la question de savoir quel politique peut réussir à mettre un terme au caractère routinier des revendications par les corporations syndicales.

Source : Benbere

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