Cela fait maintenant 9 mois que les cheminots de la ligne reliant Bamako à Kayes n’ont pas été payé. Il y a trois semaines, ils ont entamé une grève de la faim pour montrer leur détermination. Reportage.
Il y a un an quasiment jour pour jour, le 20 février dernier, nous faisions un reportage sur la réouverture de la ligne de chemin de fer Bamako – Kayes. Depuis plusieurs mois, la ligne est de nouveau fermée, les locomotives, trop vétustes, sont toutes en panne.
De fait au chômage technique, les cheminots n’ont pas été payé depuis 9 mois. Pour protester, une partie d’entre eux est en grève de la faim depuis 3 semaines.
Une cinquantaine de cheminots occupent le rail tous les jours.
« Nous n’entendons rien de l’état, il n’y a pas de rencontre, on est pas convoqué, on est pas approché, le département n’est pas venue une seule fois pour nous rencontrer. Si on est payé aujourd’hui, nous allons déguerpir, nous allons quitter ici. » , explique Bolidiandian Keita, Président de la corporation des conducteurs de trains du Mali.
496 agents sont concernés. L’état leur doit 1 600 000 Francs CFA par personne en moyenne.
Bolidiandian se rend chez lui pour la seconde fois en 22 jours. Sans revenus et père de 6 enfants, c’est aujourd’hui sa femme vendeuse au marché qui paie les charges du foyer.
«Si il faut que je m’occupe de tous les besoins, acheter du riz, payer les condiments, le loyers, les factures, l’eau et l’électricité, vraiment, ce n’est pas du tout facile. » Samaké Sadio Keita, Vendeuse au marché, femme de cheminot
« C’est difficile pour nous, mais surtout pour l’avenir de nos enfants. Aujourd’hui vous voyez quand je suis arrivé, le bol qui est là bas, j’ai trouvé les enfants en train de manger, c’est ceux qui l’ont mangé, de la bouillie, c’est difficile, ça donne les larmes aux yeux, mais que faire? Nous sommes obligés d’avoir du courage car si nous nous pleurons, et nos femmes, qu’est ce qu’elles vont faire? » Bolidiandian Keita, Président de la corporation des conducteurs de trains du Mali
A la nuit tombée, les cheminots débattent de leurs propositions. Le lendemain, une rencontre est prévu avec la direction de Dakar Bamako Ferroviaire, le consortium Malo sénégalais propriétaire du rail. En attendant et comme depuis le début de leurs grève de la faim, les agents dorment dans ce campement, résignés.
« Si tu vois que nous mêmes, nous nous couchons entre les rails, ça veut dire qu’il n’y a plus de rail, ça veut dire que les trains sont morts. Il n’y a pas de train, donc c’est vraiment malheureux. » Bolidiandian Keita, Président de la corporation des conducteurs de trains du Mali et Coordinateur traction à Dakar Bamako ferroviaire
Depuis le 18 mai 2018, seuls les piétons fréquentent la voie de chemin de fer. Tous les trains, rongés par la vétusté, sont à l’arrêt. Coté malien comme sénégalais. Les deux états ont promis de relancer l’activité en injectant 20 milliards de Francs CFA. Pour l’heure aucun fond n’a été débloqué.
« Tous les fonctionnaires cheminots du Mali et du Sénégal attendent que les états du Mali et du Sénégal s’acquittent de ces dix milliards pour que l’administrateur puisse amener les locomotives et commencer à réparer pour que nous puissions redémarrer. » Mahamane Thienta, Secrétaire général des travailleurs du rail
Reliant Bamako à l’Ouest du Mali – difficile d’accès autrement – le train est plus qu’un moyen de transport. Il est pourvoyeur de devises grâce au commerce pour la cinquantaine de village qu’il traverse jusque Kayes.
TV5