La Cour pénale internationale (CPI) poursuit son enquête ouverte en janvier 2013 au Mali pour des crimes de guerre présumés, mais aucun suspect n’a été identifié pour l’heure, a indiqué jeudi 31 octobre sa procureure générale, Fatou Bensouda, en visite à Bamako.
“L’objet de ma visite est de rendre compte [du] stade de nos enquêtes ici, au Mali. On a déjà commencé, on n’a encore identifié personne pour les crimes spécifiés”, a déclaré en français Mme Bensouda à la télévision publique malienne ORTM captée à Dakar.
Elle s’exprimait après une rencontre avec le ministre malien de la Justice, Mohamed Ali Bathily. Elle a également rencontré à Bamako le Premier ministre malien, Oumar Tatam Ly, rencontre au cours de laquelle elle a remercié les autorités maliennes “pour leur coopération” avec la CPI, a rapporté l’ORTM.
“Le gouvernement malien a déféré la situation malienne devant la CPI et, depuis, nous travaillons sur cette situation et nous allons continuer de coopérer”, a encore dit Fatou Bensouda, dont les propos étaient cette fois traduits de l’anglais vers le français par un interprète. “Les enquêtes […] ont commencé depuis le 16 janvier 2013, les enquêteurs sont sur le terrain et nous sommes ici pour demander que la coopération nécessaire continue d’être de mise pour la bonne continuation de ce travail”, a-t-elle ajouté.
“Violations graves et massives des droits de l’Homme”
D’après l’ORTM, Fatou Bensouda a indiqué le Mali avait “la responsabilité première de juger les crimes commis dans le pays”, et que la CPI était “complémentaire [du] système de justice nationale”. De même source, le ministre de la Justice a de son côté fait état “d’une parfaite convergence de vues entre le Mali et la CPI sur le dossier”.
“Nous entreprendrons toutes les actions de coopération et nous nous inscrirons dans la part de la mise en oeuvre de la stratégie de la [CPI]”, a dit Mohamed Ali Bathily. Durant son séjour au Mali dont la durée n’a pas été précisée, Fatou Bensouda rencontrera également les ministres de la Défense, de l’Administration territoriale et des Maliens de l’extérieur.
En janvier, Fatou Bensouda avait annoncé l’ouverture d’une enquête sur les crimes de guerre présumés commis depuis janvier 2012 par divers groupes armés “qui ont semé la terreur et infligé des souffrances à la population”. Aucun mandat d’arrêt n’a encore été émis. La CPI avait été saisie le 13 juillet 2012 par les autorités de transition installées à la suite d’un coup d’Etat militaire qui, le 22 mars 2012, a renversé le régime du président Amadou Toumani Touré.
Le putsch avait précipité la chute du nord du Mali aux mains de groupes islamistes armés qui ont occupé ces régions pendant neuf mois avant d’en être en partie chassés par une intervention militaire internationale initiée par la France en janvier 2013 et toujours en cours.
Dans sa lettre à la procureure, le ministre de la Justice de la transition, Malick Coulibaly, a sollicité une enquête de la CPI sur “les crimes les plus graves commis depuis le mois de janvier 2012” au Mali, arguant de “l’impossibilité pour les juridictions maliennes” d’alors “de poursuivre ou juger les auteurs”.
“Il s’agit de violations graves et massives des droits de l’Homme et du droit international humanitaire commises notamment dans la partie Nord du territoire : les exécutions sommaires des soldats de l’armée malienne, les viols de femmes et jeunes filles, les massacres des populations civiles, l’enrôlement d’enfants soldats, les tortures”, avait-il expliqué. Il avait aussi cité “les pillages généralisés des biens appartenant aussi bien à l’Etat qu’aux particuliers, les disparitions forcées, la destruction des symboles de l’Etat” et de nombreux édifices dont des infrastructures sociale, mausolées et lieux de cultes musulmans et chrétiens.