Au Mali, 32 civils peuls ont atrocement été tués le samedi 23 juin dernier dans une attaque attribuée à des assaillants qui portaient des habits des chasseurs traditionnels dozo.
Encore des peuls pris pour cible! Le fait est assez inquiétant et pratiquement itératif pour être passé sous silence ou simplement relégué dans la rubrique des chiens écrasés. En attendant des investigations plus poussées et surtout une punition exemplaire des auteurs de ces meurtres, il faut relever que depuis près de trois ans, cette ethnie dénonce des expéditions régulières qui sont menées contre ses membres. Soit ces violences prennent source des luttes intercommunautaires classiques entre Peuls, de tradition éleveurs et Bambara et Dogon, ethnies majoritairement agriculteurs. Soit ce sont des exactions qui sont menées au nom de la lutte anti jihadiste. Même des opérations militaires, dont certaines meurtrières ont été menées contre des Peuls, toujours au nom de la lutte antiterroriste.
L’amalgame est triste et dangereux pour une ethnie qui n’est pas forcément la seule à servir de vivier au terrorisme. Pire cette stigmatisation, selon les victimes peules serait encouragée par les autorités maliennes qui en seraient des complices actives ou passives. Certes, dans cette guerre asymétrique dans laquelle, les militaires de la Force française Barkhane et les éléments de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma) et encore moins l’armée malienne, ont souvent montré leurs limites, tous les moyens sont mis en œuvre pour mettre hors d’état de nuire les jihadistes. Mais c’est encore plus dangereux de frustrer une partie de la population, qui n’est pas moins malienne que les autres nationalités. La cohésion nationale ne s’en portera que plus mal, pour un pays qui en a besoin pour aborder bientôt des échéances électorales qui s’annoncent bien mouvementées compte tenu des parties et candidats en présence. Mieux l’unité et l’union des Maliens sonnent plus que jamais comme une urgence si le pays veut recoller ses morceaux et plus particulièrement, reprendre le Nord aux mains des terroristes et autres bandits du même acabit.
Du reste, cette stigmatisation n’est pas l’apanage du Mali, mais est bien présente dans d’autres pays africains, partout où des politiciens sans vision et en mal de popularité entendent tirer un profit diabolique des confrontations nourries par les fumiers de la religion, de la race ou de l’ethnie. Parfois, ce sont ces trois ingrédients dont la dangerosité a été prouvée qui sont utilisés dans un cocktail hyper explosif qui renforce la fracture sociale. Toutefois, la nouvelle ruse des terroristes étant de se déguiser en militaires de l’armée nationale, il se pourrait bien que ces assaillants de Koumaga au centre du Mali, ne soient pas de vrais chasseurs dozos. Au gouvernement malien de faire donc diligence pour tirer cette affaire au clair afin de ramener la quiétude entre communautés du même pays. Les Peuls, tout comme d’autres nationalités ne sauraient systématiquement, pour une raison ou une autre, assimilés à des terroristes. De la même façon, des fidèles appartenant à telle ou telle religion ne doivent être considérés comme des jihadistes, des hommes sans foi ni loi.
Par Wakat Séra