Jean-Daniel Lévy, directeur du pôle politique & opinion de l’institut Harris Interactive, décrypte la dernière vague du baromètre Harris Interactive / Délits d’Opinion. Remontée de la cote de popularité de François Hollande, difficultés du premier ministre à imprimer, conflit en Centreafrique : Chiffres à l’appui, Jean-Daniel Lévy fait le point des défis de l’exécutif à l’aube de l’année 2014.
1. En gagnant 2 points, François Hollande reprend un peu d’oxygène en cette fin d’année. Quelles catégories de Français contribuent à ce léger regain de popularité ?
Tout comme l’inversion de la courbe du chômage, l’évolution de la confiance à l’égard du Président de la République ne peut se mesurer que sur le moyen terme. Au cours de ce dernier mois, la confiance s’est socialement accrue parmi les catégories supérieures (32%, + 4 points), politiquement au sein des sympathisants de Gauche et notamment socialistes (82%, + 4 points). Reste que, sur le moyen terme, ces deux franges de populations sont celles qui auront le plus marqué leur désaffection. Rappelons-nous qu’en juillet 43% des « CSP + » accordaient leur confiance dans le Président, tout comme 92% des sympathisants socialistes. En juillet dernier, 35% des Français indiquaient donner crédit au Président de la République. Ils sont 28% aujourd’hui. Il est frappant de remarquer que les soutiens du Président ne mentionnent pas les enjeux récents comme, par exemple, l’intervention en centrafrique. On se souvient qu’au moment du Mali, l’effet avait été doublement bénéfique pour le Président (aussi bien en terme d’image que de confiance). Aujourd’hui, dans les circonstances actuelles, ce n’est pas le cas. Les seules personnes parlant de cette intervention sont critiques.
2. Jean-Marc Ayrault ne semble pas profiter de cette hausse, restant crédité d’une cote de confiance très basse à 24%. Est-la marque d’un nouveau désaveu ou d’une forme d’indifférence envers le Premier ministre ?
C’est, peut-être, une manière pour les Français d’acter les conséquences du quinquennat. Le rôle assigné (que s’assigne) le Président n’offre que peu de latitude au Premier ministre. Il ressort, par ailleurs que le Premier ministre souffre d’une double difficulté : difficulté « d’imprimer » un message d’une part, difficulté à être véritablement perçu comme le leader la majorité. La difficulté « d’impression » peut être identifiée par le contre-exemple : la réforme fiscale n’est quasiment pas mentionnée par les Français lui accordant son soutien. Elle l’est un peu plus par les interviewés critiques. Ajoutons à ce constat que nombre de personnes interrogées considèrent un déficit d’autorité à l’égard de ses ministres.
3. Alors que les troupes Françaises opèrent en CentreAfrique dans un climat tendu, comment sont perçus Jean-Yves le Drian et Laurent Fabius, en première ligne dans ce conflit ?
Il s’agit, nous l’avions souligné, des personnalités – après Manuel Valls – inspirant le plus de confiance. A ce titre ils progressent respectivement de 4 et 3 points au cours de ce dernier mois. La place de la France à l’étranger constitue l’un des socles de la confiance. Contrairement à ce que l’on peut croire, les Français – loin s’en faut – ne sont pas inintéressés par la politique internationale. Et celle-ci peut avoir des effets positifs pour l’exécutif. Nicolas Sarkozy en a profité pleinement au cours de son quinquennat, Dominique de Villepin quelques années plus tôt.
4. A l’aune d’une année électorale 2014 charnière et tandis que la courbe du chômage peine à s’inverser, quelles peuvent-être les ingrédients d’une réconciliation durable entre l’exécutif et les Français ?
Il n’est pas tant question de l’exécutif et des Français mais de l’ensemble des responsables politiques et des citoyens. S’il devait y avoir un défit, ce pourrait être celui-ci : décrire le réel, s’assurer que l’ensemble des Français s’y retrouve et offrir des perspectives. Une des forces de François Hollande au cours de la campagne électorale avait été d’y parvenir. Aujourd’hui il ne s’agit pas d’un des traits d’image le qualifiant. Quant à l’inversion de la courbe du chômage, elle n’est pas relevée par les Français que nous avons interrogés. On le sait, dans cette période de suspicion, le temps pourra être long entre l’évolution réelle et la perception de cette évolution. Préjuger qu’il y aura un lien intime entre évolution des courbes (du chômage et de la confiance) apparait volontaire. Jusqu’à présent, cela ne s’est jamais produit.
SOURCE / delitsdopinion.COM